Services financiers – Séquelles de la Finance Act — Craintes du CCR Levy sur l’attrait du centre financier Maurice

– Mauritius Finance avait recommandé l’instauration d’un crédit d’impôt de 1,5% pour les GBC ne bénéficiant pas de régimes fiscaux préférentiels

Mauritius Finance a organisé une table ronde jeudi dernier sur le thème “Finance Act 2024 : perspectives et répercussions pour le secteur des services financiers” au Royal Green, Moka. L’événement a réuni des membres de Mauritius Finance et a été animé́ par Shamima Mallam-Hassam, Managing Director de Trident Trust Mauritius et présidente de Mauritius Finance. Le panel était constitué de  Samade Jhummun, Chief Executive Officer (CEO) de Mauritius Finance, Akshar Maherally, Managing Director de WTS Tax Consulting, Dovina Pillay-Naiken, Acting Director au ministère des Services financiers, et Kamal Hawabhay, Managing Director de GWMS Ltd.

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Le Corporate Climate Responsibility (CCR) Levy, introduit dans la Finance Act 2024, votée au Parlement ce 23 juillet, impose une taxe de 2% sur les bénéfices des sociétés, trusts, fonds et fondations générant des revenus supérieurs à Rs 50 millions, domestiques et Global Business Companies (GBC). Ce prélèvement servira à financer les projets de protection, de gestion et de restauration de l’écosystème naturel du pays, ainsi qu’à lutter contre les effets du changement climatique. Or, si Mauritius Finance concède que ces initiatives en matière de lutte contre le changement climatique sont importantes, ses membres s’accordent toutefois sur le fait que l’extension de cette taxe de 2% à l’ensemble du secteur du Global Business nuira à l’attrait du Mauritius International Financial Centre (MIFC) auprès des investisseurs et clients étrangers.

Samade Jhummun précise que les GBC ne pouvant prétendre à une exemption partielle seront pénalisées par l’introduction du prélèvement CCR. « Actuellement, les GBC offrant des services de conseil ou percevant des intérêts sur des dépôts à terme sont soumises à un taux forfaitaire de 15%; elles vont devoir faire face à une augmentation de 13,3% de leur charge fiscale », s’inquiète-t-il. Il estime ainsi qu’une catégorie de clients étrangers pourrait choisir de rapatrier leurs devises déposées dans le circuit bancaire local vers d’autres juridictions afin de ne pas être imposées sur les intérêts perçus à Maurice.

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Actuellement, un tiers des Fixed Deposits en devises dans les banques locales, soit un montant de Rs 12 milliards, provient du secteur du Global Business. Or, la Finance Act prévoyant que le CCR Levy sera appliqué de manière rétroactive, les revenus générés avant l’adoption de la loi seront donc aussi imposables.

Selon Kamal Hawabhay, les conséquences d’une telle disposition sont graves et ne peuvent être minimisées. Le Managing Director de GWMS Ltd considère que l’augmentation de la charge fiscale pourrait pousser des entreprises à délocaliser leurs opérations vers d’autres centres financiers internationaux (IFC), comme celui de Dubaï, réduisant ainsi de manière non négligeable les flux de capitaux actuels et futurs au sein du MIFC.

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« Les entreprises pourraient également chercher à réorienter leurs profits pour atténuer l’impact du prélèvement CCR Levy. Dans ce cas de figure également, il y aura une réduction significative de la collecte d’impôts sur les sociétés et cela affectera négativement les recettes gouvernementales », ajoute-t-il. Le secteur financier contribue à hauteur d’environ 70% aux revenus collectés par le gouvernement, et toute relocalisation aura un impact négatif, prévient Kamal Hawabhay.

Il poursuit en expliquant que l’exode des devises de Maurice contribuera à affaiblir davantage la roupie mauricienne, affectant ainsi non seulement le secteur des services financiers, mais aussi les Mauriciens dans leur ensemble. Dans leur majorité, les professionnels du secteur des services financiers craignent donc que la compétitivité future du MIFC soit directement menacée, car cette charge fiscale additionnelle entravera sa capacité à conserver les entreprises existantes et à attirer de nouveaux clients, qui choisissent d’ordinaire Maurice comme juridiction en raison de la Tax Certainty qu’offrait jusqu’ici le MIFC.

« Sous le texte de loi, il est clair que le CCR Levy est une taxe additionnelle. Ce qui m’intrigue, c’est surtout la définition élargie de Company pour inclure les Limited Partnerships, considérés comme Tax Transparent, ainsi que les implications du seuil de Rs 50 millions. Ces deux provisions auront sans doute des conséquences néfastes pour le secteur. Chaque entreprise aura un choix commercial à faire en se demandant s’il vaut la peine de rester au sein du MIFC ou si les propositions sont meilleures dans d’autres juridictions », explique Akshar Maherally.

Mauritius Finance appelle donc le gouvernement à examiner les impacts de cette nouvelle mesure fiscale, soulignant l’importance de trouver un équilibre entre les objectifs de responsabilité climatique et le maintien de la compétitivité et la stabilité du MIFC. « Maintenant que la loi a été votée, nous pensons qu’il est important d’ouvrir une discussion constructive avec le ministère des Finances afin d’établir des exemptions spécifiques, comme c’est déjà le cas pour l’exemption du CSR. Dans un contexte de compétition mondiale intense, une imposition supplémentaire réduira notre compétitivité et, par conséquent, la capacité du secteur des financiers à contribuer à la croissance économique du pays », s’appesantit Shamima Mallam-Hassam, présidente du conseil d’administration de Mauritius Finance.

Pour atténuer ces potentiels effets négatifs, Mauritius Finance avait recommandé l’introduction d’un crédit d’impôt de 1,5% sur le revenu imposable pour les GBC ne bénéficiant pas de régimes fiscaux préférentiels. L’institution préconisait aussi que cette formule entre en vigueur à partir de juillet 2024, sans effet rétroactif, et que les entités telles que les Limited Liability Partnerships soient entièrement exclues de cette taxe.

Dovina Pillay-Naiken, du ministère des Services financiers et de la Bonne gouvernance, également présente lors de ces discussions, a réitéré l’engagement des autorités à trouver des solutions qui soutiennent la croissance continue et la compétitivité du MIFC.

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