Courses truquées !

9e journée – 7e course. « Guet Six Degrees pe sorti li pe sanz so laligne pour alle genn tou so bane kamuad. Li pe serre sa peleton lazis pou laisse Pop Icon alle devant, gagne enn train facile, pena personne pe gene li. Mem Bonnie Prince finn rant 3e lors barre la bas. Ene lekours ranze. Mo conseille zot arret zwe lekours. Zot pe perdi zot letan. »

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Ce commentaire d’un turfiste sur les réseaux sociaux a été renforcé et crédibilisé par celui d’un propriétaire de longue date qui a nommément pointé du doigt une figure devenue indispensable pour bon nombre aujourd’hui dans l’hippisme mauricien , un parrain intouchable, adulé par ses sujets, craint pas ceux qu’il a pris en otage. Le propriétaire lui a intimé d’arrêter de prendre les professionnels de courses pour des imbéciles et, en substance, l’a accusé d’être derrière le déroulement très suspect de certaines épreuves qu’il qualifie sans coup férir de « courses truquées ». Et ils ont bougrement raison ces courageux whistle blowers sur le déroulement et la finalité de certaines courses choquantes depuis le début de la saison dans un contexte, aujourd’hui où la lâcheté fait malheureusement office de force de loi. En effet, il se trouve peu de personnes pour dénoncer cela. Pire, ceux qui gardent le silence sont à égalité avec ceux qui font mine de n’avoir rien vu au point même de justifier ces maldonnes.

Nous ne pouvons, comme eux, affirmer avec certitude que celui qu’ils pointent du doigt est le marionnettiste.  Mais le doute est permis même s’il faut faire crédit au bénéfice du doute lorsque des preuves ne sont pas clairement établies. Certes, dans la conjoncture ce personnage, au semblant angélique pour ceux qui ne le connaissent pas, jouit de la protection de là-haut, divine et surtout humaine, qui lui permet de commander une peur et panique intérieure sur ses sujets. Il a pris une telle ampleur sur le monde hippique mauricien et la politique locale, que son influence est considérable au point où il bénéficie aussi de largesses et de la mansuétude des instances étatiques et des dirigeants de la GRA et la HRD qui n’ont que des yeux de chimère pour lui. Parce qu’il côtoie  les grands dirigeants de ce pays,  gouvernement et opposition compris. Parce qu’il est aussi de son propre aveu, l’un des financiers du parti au pouvoir — c’est lui qui l’a admis –  et peut se muer en Kingmaker, s’il le juge utile, ce qui laisse planer un doute raisonnable sur sa totale probité et fidélité. Comme le dit le dicton populaire, limem assete, limem vande…

Aujourd’hui plus que jamais, sa mainmise sur l’organisation des courses et la propriété des chevaux est incontestable. Son contrôle sur le personnel hippique et le monde de paris est une lapalissade. Il est impossible aujourd’hui de l’absoudre de toute influence…D’autant que avant même son entrée en puissance à la tête du monde hippique, il était déjà considéré comme étant le parrain.

Quel que soit son rôle, ou pas, dans ces dérapages hippiques, le mot est donc lancé « course truquée ». C’est le mal majeur des courses depuis le début de la présente saison. Nous avions déjà attiré l’attention des autorités hippiques sur la monte scandaleuse d’Aucharaz dans la dernière course de la première journée sur Free To Win. Et puis, il y a eu les deux courses de Xenon, Candle Cove, Pin Drop, Gunston, Triple Fate Line parmi les plus choquants et il y en a d’autres… Ce qui inquiète c’est que cela se déroule impunément quel que soit l’organisateur des courses qui n’a plus son mot à dire, sans que les autorités, incompétente ou complice, — faites votre choix — ne réagisse

Ce n’est pas nouveau au Champ de Mars, mais c’est symptomatique d’une montée en puissance, voire exponentielle d’un phénomène qui est aujourd’hui à l’image de l’ambiance mafieuse dans laquelle vit et respire ce pays à plusieurs niveaux. La Covid-19 est de la pissette par rapport à cette maladie qui gangrène notre société, encouragée passivement par les autorités qui en récolte aussi des dividendes.

La corruption a toujours fait partie de l’actualité hippique durant ces quarante dernières années et nous l’avons toujours dénoncé sans peur, en assumant nos responsabilités en tant que journaliste et chroniqueur hippique. Le plus gros poisson a été Gemmayze Street qui avait abouti à la commission d’enquête Parry instituée par le gouvernement de l’époque. Cette affaire aurait pu et aurait dû être le temps de la révolution, comme celle qu’a vécu les courses hippique à Hong Kong dans les années 80, qui est aujourd’hui une référence mondiale. Malheureusement, ce rapport a été détourné à d’autres fins et nous sommes les témoins de l’institutionnalisation d’un système mafieux qui opère au nez et à la barbe des autorités pour ne pas dire avec leur complicité.

Et il n’y a pas que les autorités qui ferment les yeux, il y a des professionnels des courses (jockeys et entraîneurs) qui participent allègrement à cette délitation de l’hippisme mauricien en étant complice de ce système ou pire en faisant preuve d’une lâcheté coupable en acceptant de tout subir pour assurer une continuité sur de mauvaises bases ou tout simplement pour survivre. Avec pour résultat que pour chaque journée, que ce soit le samedi et le dimanche, tout est permis.

Au nez et à la barbe des stipes de la HRD, dépassés par les évènements parce que privés de moyens pour travailler et devant se baser sur Youtube pour les vidéos et de Google traduction pour comprendre ces jockeys étrangers qui ne parlent même pas l’anglais !  Ils subissent également des influences néfastes d’un environnement ou d’autorité qui ont d’autres priorités que les courses propres. La rotation des Chief Stipes est décidemment néfaste et n’assure pas une continuité dans l’action répressive et la qualité des sanctions. Par ailleur il est surprenant qu’un entraîneur condamné à n’avoir pas donné de bonnes instructions est moins sévèrement sanctionné qu’un jockey qui les a suivies. Le monde à l’envers et une conception « enbalao » des principes de justice.

Le pire aujourd’hui ce sont ces professionnels des courses qui crachent dans les mains de leur mère nourricière pour quelques roupies de plus. Comment osent-ils aller à l’encontre  des principes élémentaires de la bienséance en cautionnant et en participant au boycott des journées, organisées par la MTCSL d’où le programme maigrichon de la 10e journée de ce samedi. Tels des collabos, ils participent à l’étranglement économique du MTCSL pour Rs 5000. Quelle honte ! Quels lâches !

Pour mieux comprendre cette problématique, il faut expliquer que le CEO de People’s Turf (PTP), Khulwant Kumar Ubheeram, s’est rendu au Champ de Mars, mardi dernier, pour annoncer aux entraîneurs que tout cheval engagé dans les courses organisées par PTP  obtiendront automatiquement Rs 15,000 au lieu des Rs 10,000 déjà proposés à partir du prochain week-end. Il se défend d’avoir directement motivé certains entraîneurs à s’abstenir d’inscrire leurs chevaux au programme de cette 10ème journée — ce qui avait été pourtant confirmé par quelques entraîneurs — mais sa proposition de prime supplémentaire de Rs 5000 « juste pour courir » est en soi , à ce moment-là, peu avant la limite des entrées pour la journée de ce samedi, une invitation à garder leurs chevaux à l’écurie en vue de la double journée de PTP, le week-end prochain. Il faudrait voir de près si cette allocation ne constitue une sorte de  « bribe » pour influencer le choix initial de tout entraîneur, ce qui serait très malsain.

En tout cas, nul ne sait si ce changement d’allocation minimum a été discutée et approuvée par la HRD et par ricochet la GRA, mais il se pourrait bien que cette initiative, sa présence au Champ de Mars et son éventuelle incitation à boycotter la journée du MTC constituent une entorse aux conditions de sa licence octroyée par la GRA.

Mais au-delà de cette « Petty » affaire, la question d’une allocation « juste pour courir» mérite débat parce que la présence en courses de chevaux ne courant que pour avoir cette prime pose le problème dans la mesure où le handicap donne une chance égale à tous les chevaux et qu’en vérité ils ne le sont pas. La question est de savoir si tous les chevaux au programme participent vraiment à la course ou s’ils ne sont pas utilisés pour de basses besognes. Aider à truquer des courses par exemple !   

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