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Alison, Denis & Richard Sunee – Trois générations au service de l’excellence

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Alison, Denis & Richard Sunee – Trois générations au service de l’excellence
Denis, Alison et Richard Sunee

Trois générations ; deux champions et un segatier populaire des années 70. Denis Sunee, plus connu sous le nom de Yoyo, a de quoi être fier de sa descendance. Le nom de son fils, Richard Sunee, est inscrit en lettres d’or dans l’histoire de la boxe mauricienne et africaine. Sa petite fille, Alison, est déjà une championne d’haltérophilie. La famille Sunee compte des personnalités qui ont marqué l’histoire chacun à sa façon.

Pour avoir l’opportunité de rencontrer Denis Sunee, il faut surtout s’y prendre à l’avance, son agenda étant particulièrement rempli. Arrivé au Jour J fixé par le patriarche après presque trois semaines, direction Eau Coulée, où ce dernier vit depuis trois décennies. Nous y sommes rejoints par Richard Sunee et sa fille, qui habitent Malherbes. “C’est lui le boss. Difisil gagn li sa misye la”, lance le champion de boxe pour chambrer son père. Alors qu’Alison taquine avec enthousiasme son grand-père, lui touchant les oreilles et les cheveux. Une rencontre rythmée d’anecdotes, de souvenirs et surtout d’émotions avec un trio détonnant.

Denis Sunee, plus connu sous le nom de Fam La Zenes, Soley Sizer, Koko Mamzel, Selibater ou encore Metye Peser

Soley Sizer

A l’adresse de son père, Richard lance : “Je suis sûr que vous avez déjà dansé sur sa musique.” En effet, même si Yoyo n’est pas un nom qui parle à tous, ses chansons sont des classiques du répertoire local depuis les années 70. Très peu de Mauriciens peuvent affirmer n’avoir jamais entendu Soley Sizer, Selibater, Fam la zeness, Metye Peser, Kapitenn Nicolas ou encore Fiesta la fiesta. Des chansons à succès de la discographie de Denis Sunee, reprises par la suite par Mario Justin, Nancy Dérougère ou encore Sylvain Kallycharan. Pourtant, depuis plus de 40 ans, Denis Joseph Sunee a tourné la page sur sa carrière musicale pour diverses raisons. C’est une voix qui s’est tue alors que le succès porte toujours ses tubes. Devenu pasteur, il a aujourd’hui trouvé sa voie au sein de l’église adventiste. L’homme a toujours gardé un œil sur ses enfants et petits enfants. Il se dit fier du parcours de son fils Richard et de celui sa petite-fille Alison.

L’excellence de père en fille

Richard Sunee, devenu entraineur dans sa discipline, est le boxeur mauricien le plus titré de l’histoire. Numéro 2 mondial de 1992 à 1996, il a été multiple médaillé d’or d’Afrique et de Maurice. A ce jour, le décoré de la République est le seul médaillé d’or mauricien des Jeux du Commonwealth. Côté palmarès, il est talonné de près par sa fille Alison, qui, du haut de ses 21 ans, est championne d’haltérophilie de Maurice et d’Afrique.

Richard avait peur d’avoir fait un mauvais choix en aiguillant sa fille vers cette discipline. “Depuis qu’elle est bébé, elle a toujours été costaude et avait beaucoup de forces dans les bras.” En voyant le parcours de cette dernière, qui a fait tout récemment la fierté de Maurice aux Jeux des Iles de l’Océan Indien 2019, il ne peut que se rendre à l’évidence. “C’est une championne comme son père et elle ira loin si elle reste fixée sur ses objectifs et garde surtout les pieds sur terre.”

La leveuse de fonte, estime pour sa part, que c’est un stress supplémentaire d’être la fille de Richard Sunee et la petite fille de Denis Sunee. Cependant le soutien de sa famille lui a conféré les bonnes valeurs pour alléger le poids et l’aider à aller plus loin. “En tant que sportive, pour devenir athlète de haut niveau, il faut de la discipline et aussi l’encadrement de sa famille. C’est l’éducation que mon père et que mon grand-père m’ont transmise qui m’ont motivée à me surpasser.”

Esprit de dépassement

Les Sunee, c’est surtout une famille soudée et solidaire, qui a fait du respect et de l’humilité ses valeurs primordiales. “J’ai grandi dans une fratrie composée de douze frères. Nous avons reçu une éducation stricte chargée de respect. Ce sont ces mêmes valeurs que j’ai transmises à mon tour à mes enfants et petit enfants”, souligne Denis Sunee. Son fils tient à ajouter que c’est de lui qu’ils ont “hérité de cet esprit de dépassement et de persévérance. Nous ne faisons pas les choses à moitié.”

Alison et Richard ne sont pas les seules fiertés de Denis Sunee. Ce dernier est père de huit enfants : sept fils et une fille. “Deux de mes fils ont suivi mes pas et sont devenus de bons chanteurs et musiciens. Emmanuel fait carrière en France et Gilbert évolue dans le circuit hôtelier et a accompagné de grands artistes”, confie Yoyo. Pour Gilbert Sunee qui rejoint la conversation : “J’ai suivi ses traces et son héritage m’a porté très loin. Je voyage aujourd’hui à travers le monde pour accompagner des artistes mauriciens et étrangers.”

Certes, Alison n’a pas hérité de la voix de son grand-père ou du talent de ses oncles pour la musique. N’empêche que : “Dans la famille, nous sommes tous un peu mélomanes”, dit la leveuse de fonte. “Elle a plutôt eu la voix de Garou”, lance alors Richard, avant d’éclater de rires. “C’est notre Petite Marie de la famille”, plaisante son oncle. Alison révèle que ce dernier “a une chanson pour chacun de ses enfants et petits-enfants”.

Légende du sega

Malgré notre insistance et celle d’Alison, Yoyo se refuse à nous chanter un petit air. Lui qui a débuté sa carrière aux cotés de Jean-Claude Gaspard, Claudio Veeraragoo et Jocelyn Perreau, entre autres, dans les années 70, garde un souvenir amer de ce passé dans la musique. Etant quelqu’un de très soucieux d’autrui, il est aussi très tranchant dans son regard sur le milieu musical à Maurice. Yoyo a connu le succès pendant deux décennies. Il a sorti une quinzaine de 45 tours et a fait des tournées à travers l’océan Indien et en Europe. “Mais tout métier se doit de faire vivre son maitre, mais ce n’était pas le cas quand j’étais ségatier. Composer un texte et une mélodie représente énormément de travail. Au bout du compte, ne pas être en mesure de payer ses musiciens et ses collaborateurs comme ils le méritent n’était pas normal pour moi.” De plus, “Je sentais à un certain moment que j’étais exploité. J’étais devenu un esclave de la musique. Je ne tirais plus de plaisir à chanter.” Richard Sunee se souvient de ce père qui quittait souvent la maison pour se produire “tantôt a l’hôtel de Ville de Curepipe, tantôt dans les radios crochets.” Un ségatier investit énormément de temps à son métier aux dépends de sa famille, souligne Denis Sunee.

Yoyo entouré de ses deux fils Gilbert et de sa petite-Fille Alison

Yoyo a aussi été marqué par toutes ces personnes à qui il a cédé des chansons de son répertoire. “Au final, ils se sont appropriés mes œuvres comme-ci c’étaient eux les auteurs originaux, et ils ont balayé complètement mon nom. Il n’y avait qu’à entendre les interviews de ces derniers à la radio et la télé a l’époque.”

Depuis, il préfère laisser dormir ses chansons bien au chaud dans les tiroirs, plutôt que de les vendre. Alison qui n’a pas quitté son grand-père des yeux tient à ajouter : “ Très peu d’auteurs et compositeurs dans la musique locale d’aujourd’hui sont autant inspirés que lui.” Richard prend conscience que : “Au lieu de pratiquer de la boxe, j’aurais pu reprendre tous ses chansons et les chanter. J’aurais fait fortune aujourd’hui”.

En fin de compte, que ce soit dans la marmite sportive ou musicale, Denis Sunee est conscient que le talent est gravé dans l’ADN de sa famille.