Débats UE/COI : Constat alarmant sur la qualité des forêts à Maurice

Des arbustes meurent sur l’île aux Aigrettes deux mois après l’échouement du MV Wakashio

La situation était déjà grave en 1997, alors que Maurice ne comptait déjà que 2% de forêts de qualité. Vingt-trois ans plus tard, malgré les efforts consentis, il n’en reste plus que 1,3%. Pire : plus de 95% du capital endémique est menacé. Un constat d’autant plus inquiétant que le pays est déjà frappé par le changement climatique. Sans compter le déblayage des terrains privés pour le développement d’hôtels et de projets IRS, qui aggrave encore le problème. Telles sont les conclusions des débats organisés sur le partenariat UE/COI au Caudan Arts Centre, placés hier sur le thème du “Changement climatique : quels enjeux et quelles actions concrètes en Indianocéanie ?”.

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Effectuant une présentation hier matin sur le thème « Changement climatique : quels enjeux et quelles actions concrètes en Indianocéanie ?”, le Dr Vikash Tatayah, directeur de la conservation auprès de la Mauritian Wildlife Foundation, estime que la perte de nos forêts résulte de l’élevage de cerfs, des projets IRS, du développement routier et de la construction de parcours de golf. « Nous perdons pas de mal de forêts en 2020, alors qu’il en reste déjà très peu », dit-il.

Pour lui, il devient impératif d’arrêter la déforestation. Il critique ainsi le grand nombre de projets de développement dits « verts », entrepris avec des organismes « durables », constatant qu’il existe une disparité entre le dialogue public et l’action, étatique ou privée. « Nous perdons beaucoup de forêts sur les terrains privés, et les lois sont en faveur du développement privé », lance-t-il ainsi, avant d’insister sur l’importance d’une sensibilisation sur la question.

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Par ailleurs, la “Cloud Forest” disparaît, ajoute-t-il. Selon ses chiffres, il ne resterait en effet que 2% de ce type de forêts à Maurice. « Et ce qu’il reste, nous le perdrons d’ici peu », prévient-il. Prenant pour exemple la construction de terrains de golf, il explique que ces projets « éliminent des réserves de rivières », qui étaient des “hot spots” pour les oiseaux à lunettes. « Nous avons perdu ces oiseaux à travers ces projets », déplore ainsi le chercheur. Et de critiquer dans le même temps la demande croissante de projets IRS en milieu montagneux, autrement dit dans des espaces qui, normalement, devraient être réservés aux forêts.

Dans sa présentation, il évoque par ailleurs la mort de plantes, depuis le naufrage du Wakashio, dans les régions sud et est de l’île aux Aigrettes, « qui ont été très touchées ». Il évoque notamment le “bois matelot“, un arbre « très costaud », dit-il, mais actuellement touché par l’huile lourde échappée du navire. S’agissant du changement climatique, il avance que la Mauritian Wildlife Foundation a essayé d’en comprendre ses effets sur la biodiversité. « On parle beaucoup du changement climatique, mais très peu de personnes mesurent cet impact. Sans compter que certains ne croient toujours pas au changement climatique », pense-t-il.

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Pourtant, le changement climatique est déjà une réalité à Maurice, dit-il, prenant en exemple la pluviométrie, en baisse, alors que paradoxalement, les jours de pluie ont connu une hausse. De ce fait, poursuit le chercheur, « les oiseaux ne peuvent pas sortir et n’arrivent pas à trouver de la nourriture pour leurs oisillons ». C’est notamment le cas de la Crécerelle de Maurice. « Les petits meurent dans le nid ou grandissent avec des déficiences », ajoute-t-il, rappelant que cette espèce a justement fait l’objet d’une étude afin de démontrer les effets du changement climatique sur la biodiversité.

Le Dr Vikash Tatayah a aussi évoqué le cas des oiseaux de mer, tel le Pétrel, qui se reproduit sur l’Île Ronde. Cette espèce, « qui est un hybride de quatre oiseaux », dit-il, est présente dans toute l’Indianocéanie. Mais sa reproduction est impactée, notamment en raison du phénomène El Nino. Aussi, cette espèce a déjà fait le voyage jusqu’au Brésil avant de revenir sur l’île Ronde. Une autre espèce, elle, est allée jusqu’en Australie, avant elle aussi de revenir. Le changement climatique, ajoute-t-il, a aussi des conséquences pour le Cardinal de Maurice, autre espèce d’oiseaux que l’on connaît très bien chez nous.

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