Le virus humain

Alors que comme le reste du monde, Maurice continue de se battre contre la Covid, il serait intéressant de se demander si, au fond, nous ne nous trompons pas d’ennemi. Après tout, la pandémie n’est jamais qu’une pure création de notre système globalisé, puisque nous avons non seulement permis au virus de nous atteindre, en ignorant d’abord les frontières naturelles entre certaines espèces sauvages et nous, mais avons de plus autorisé le virus à se répandre en un temps record aux quatre coins du globe, en lui offrant autant d’aller-retour qu’il le souhaitait sur nos plus grandes lignes aériennes et maritimes.

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Qui plus est, la Covid et l’homme ont ceci en commun qu’aucun des deux ne semble doté de bon sens, tant l’un que l’autre ayant pour seuls objectifs de coloniser le plus vite possible leur environnement immédiat et d’en épuiser, tout aussi rapidement, les principales ressources disponibles dans ce même espace. C’est un fait : en se multipliant de la sorte dans un organisme, la Covid court à sa propre perte, en tant qu’individus tout au moins, puisque mettant en péril le corps lui servant d’habitat. En somme, il fait exactement ce que l’humain fait depuis toujours : il épuise ses ressources, quitte à devoir en payer un jour le prix.

Pourtant, malgré cette étonnante analogie, des différences existent bel et bien entre nos deux « espèces ». Ainsi, le virus peut changer d’hôte, et donc de lieu à coloniser, autant de fois que l’on lui en laisse la possibilité. Contrairement à nous, qui n’avons pour l’heure qu’une seule planète à souiller. A contrario, l’homme, lui, est doté d’une extraordinaire capacité de raisonnement. La différence de complexité entre nos deux organismes, l’un n’étant en fait qu’une particule microscopique, devrait de fait nous prémunir des dangers. Certes, l’homme n’aura pas toujours eu cette faculté de comprendre la complexité de son environnement, au point de mesurer les effets négatifs de ses actions, mais nous ne sommes plus, que l’on sache, à l’époque des chasseurs-cueilleurs. Pourtant, alors que nous sommes capables de poser avec la plus infime des précisions un véhicule motorisé sur la surface de Mars, nous demeurons toujours incapables de prendre la mesure des désastres à venir sur notre propre planète. N’est-ce pas là un paradoxe, une preuve de notre incohérence ?

Résultat : pendant que le virus continue de faire son petit bonhomme de chemin, « sautant » d’un organisme à l’autre aussi facilement que le ferait une puce, assurant ainsi la survie de son espèce, l’homme, lui, oublie qu’il n’a pas la même faculté, et que ce n’est pas demain la veille qu’il pourra coloniser d’autres planètes. Et que cette Terre qui l’a vu naître pourrait très bien aussi être celle qui le verra disparaître. Aussi, puisque nous n’avons visiblement cure des autres membres du vivant partageant avec nous le même espace, au moins devrions-nous nous rappeler que nous n’avons qu’une seule planète, et que d’en épuiser les ressources précipitera, d’une manière ou d’une autre, notre disparition.

Peut-être ne serait-ce pas plus mal, diront les plus sarcastiques. Et c’est d’ailleurs peut-être vrai. Du moins tant que l’immense majorité d’entre nous n’aura pris la mesure de l’aberration de notre système capitaliste. Que nous soyons riches ou pauvres, que nous vivions au sommet d’un gratte-ciel ou dans la case d’un Pygmée ougandais, nous en payerons tous le prix. Et inutile d’espérer monnayer notre survie avec Dame Nature, car elle s’en fout royalement ! En vérité, la Nature, puisque c’est d’elle qu’il est question, nous aura fait un ultime « cadeau » avec la Covid. En quelque sorte une porte de sortie (peut-être la seule que nous aurons d’ailleurs). Un dernier rappel que nous avons dépassé les limites autorisées et que, si nous n’appuyons pas immédiatement sur la pédale de frein, l’impact sera terrible, irrémédiable. Sans plus aucun retour en arrière possible. Sans se soucier, bien sûr, que celle-ci se trouve en fait juste à côté de celle d’accélération, dont nous sommes si friands, incapables que nous sommes à faire un trait sur ce qui, pour un moment encore, participe au « bonheur » que l’on nous vend. Peut-être tout cela est-il écrit, après tout ! Autant alors attendre tranquillement que sonne le clap de fin assis dans un coin de notre terrasse, cocktail à la main !

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