Culture et Patrimoine: Tir de barrage de l’opposition sur Le Morne et droits d’auteurs

Stéphanie Anquetil du Parti travailliste a tiré la sonnette d’alarme à l’Assemblée nationale, la semaine dernière, sur les risques de déclassification du Morne comme patrimoine mondial de l’UNESCO. Le Management Plan qui était dû depuis 2014 n’a toujours pas été soumis, tandis que le conseil d’administration du Morne Heritage Trust Fund n’avait pas siégé pendant dix mois. D’autre part, Fabrice David a déploré une usurpation des droits des artistes de la part du gouvernement, qui a décidé d’exempter les opérateurs de l’hôtellerie et de l’aviation du paiement des Copyright Fees pendant un an. Franco Quirin a regretté que ce soient des fonctionnaires et des nominés politiques qui décident pour les artistes au Board de la Mauritius Society of Authors (MASA), en l’absence de leurs représentants.

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Stéphanie Anquetil s’insurge que pendant dix mois, le conseil d’administration du Morne Heritage Trust Fund, qu’elle avait dirigé par le passé, le conseil d’administration ne s’était pas réuni. Étant inscrit comme Patrimoine mondial de l’UNESCO, le site comprend un cahier des charges à respecter et peut même être désinscrit si tel n’est pas le cas. La ville anglaise de Liverpool a d’ailleurs, perdu son statut récemment pour cette raison spécifique.
Le ministre des Arts et du Patrimoine culturel, Avinash Teeluck, soutient que le contrat du Board avait expiré et qu’un nouveau venait d’être constitué, suite à la décision du conseil des ministres du 10 septembre. Toutefois, il a fallu attendre jusqu’au 28 octobre, soit plus d’un mois plus tard, pour convoquer une première réunion.

Une situation que Stéphanie Anquetil considère inacceptable. « Je trouve quand même scandaleux que le Board s’est réuni uniquement en quatrième vitesse jeudi, 28 octobre ! Je trouve scandaleux que dans le cas d’un site qui a été proclamé au patrimoine mondial de l’UNESCO, que le conseil d’administration ne s’est pas réuni pendant 10 mois ! C’est franchement déplorable », a-t-elle fait valoir.

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Elle n’a pas caché son exaspération non plus concernant le Management Plan du Morne, qui doit être revu chaque cinq ans, selon les directives de l’UNESCO. Le ministre Teeluck a répondu à cela, que quatre Management Plans, dont le Local Economic Development Plan, le Land Management Plan, le Lagoon Management Plan et l’Integrated Management Plan, avaient été préparés par Le Morne Heritage Trust Fund. Cependant, il a estimé que le point de vue de certains Stakeholders, dont des ministères et autres départements, n’avaient pas été pris en considération.

Problème dorénavant réglé, selon le ministre, qui a précisé avoir reçu ces points de vue le… 5 novembre – soit quatre jours avant la séance parlementaire – et qu’ils ont été envoyés au Morne Heritage Trust Fund, pour être inclus dans les Management Plans. Avec l’aval du Cabinet, les Management Plans seront envoyés à l’UNESCO.

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Une situation que Stéphanie Anquetil juge tout de même inacceptable et qui pourrait porter préjudice au statut du Morne en tant que patrimoine mondial de l’UNESCO. « Selon l’UNESCO, le Management Plan de chaque site classé doit être revu chaque cinq ans. Je déplore que le Management Plan préparé par notre équipe, en 2008 n’ait pas été révisé à ce jour ! Un Management Plan était près fin 2014. En raison du changement de régime, évidemment, le Management Plan est resté dans un tiroir », dira-t-elle.

Elle regrette ainsi que tous les efforts consentis dans ce travail soient tombés à l’eau. « Je connais la douleur pour avoir fait avec mon équipe, inscrire ce site au patrimoine mondial de l’UNESCO. Allez demander au Chef du Cabinet, M. Ballah, qui était le Permanent Secretary à l’époque, il vous dira comment on a trimé pour avoir ce site-là ! Alors, je déplore que le Management Plan, préparé par notre équipe en 2008, n’ait pas été révisé à ce jour ! Est-ce que le ministre réalise que son manque de sérieux et de gestion pourrait mettre le site en danger ? » ajoute-t-elle.

Le ministre a répondu qu’il connaissait également cette douleur, pour avoir été impliqué dans le dossier d’inscription du Séga Tambour Chagos en 2019. Concernant le Management Plan de 2013, préparé par le Professeur Odendaal, il a indiqué que celui-ci a été révisé en 2016 par le Professeur Aboungo. De nouveaux éléments ont aussi été apportés en 2020 et 2021. « Il y a des situations qui changent dans la région. On doit s’assurer que tout ceci soit pris en considération. Que ce soit au niveau de l’environnement, du lagon ou de l’aspect culturel. Il faut démontrer qu’on a pu conserver le site », souligne Avinash Teeluck.

La MASA et les droits privés

Le ministre des Arts et du Patrimoine culture s’est également retrouvé sous pression avec le député Fabrice David et des interpellations pertinentes par rapport aux Copyright Fees. Il a voulu savoir comment le gouvernement comptait compenser les artistes, après l’exemption de certains secteurs – notamment l’hôtellerie et l’aviation – du paiement des Copyright Fees aux artistes, pour l’utilisation de leurs œuvres.
Le ministre s’est lancé dans une longue tirade pour expliquer que c’est ce gouvernement qui est venu de l’avant avec une nouvelle grille tarifaire qui n’avait pas été revue depuis 2008, soit 12 ans. De même, l’assiette de collection avait été élargie, pour inclure de nouveaux opérateurs, permettant ainsi aux artistes d’avoir plus de revenus. Toutefois, a-t-il précisé, en raison de l’impact de la crise sanitaire sur le secteur du tourisme, le gouvernement est venu avec une Regulation, afin de repousser le paiement des Copyright Fees pour les opérateurs de ce secteur, à juillet 2022. Cette décision devrait être revue, après consultations, dépendant de l’évolution de la situation économique.

Toutefois, le ministre Teeluck n’a pas dit comment le gouvernement comptait compenser les artistes pour ce manque à gagner. Il s’est contenté de dire qu’avec l’élargissement de l’assiette de collection, les artistes auront davantage de revenus et qu’ils ont bénéficié du Self-Employed Assistance Scheme en deux occasions, soit en 2020 et 2021.

Fabrice David n’a pas lâché prise pour autant, demandant à Avinash Teeluck de préciser le montant que représentait ce manque à gagner aux artistes. Il a laissé entendre qu’un exercice de comptabilité était en cours et que le chiffre sera communiqué ultérieurement.
Fabrice David a alors lancé : « J’attendrai, donc, avec impatience ce calcul qui est en train d’être fait, bien que je sois certain que ces nouveaux utilisateurs ne parviennent pas à compenser ces gros utilisateurs qui sont exemptés pendant quasiment une année. »
Il n’a pas manqué non plus de relever la nature privée de la propriété intellectuelle et qui ne concerne que son détenteur. « La propriété intellectuelle et le droit d’auteur relèvent du droit privé. Et je crois savoir que M. le ministre est issu d’une profession légale. Puis-je, donc, demander au ministre de quel droit l’État a pu prendre une décision qui va à l’encontre d’un droit privé pour permettre aux utilisateurs de ne pas payer les droits d’auteur pendant quasiment une année alors qu’ils exploitent les œuvres des artistes ? », a-t-il demandé.

Franco Quirin (MMM) est venu avec une épineuse question concernant le conseil d’administration de la Mauritius Society of Authors (MASA). Celui-ci fonctionne sans les représentants des artistes depuis avril 2021, après l’expiration du contrat des membres élus.

Des élections prévues en juin avaient par la suite été annulées en raison des restrictions sanitaires. Ce qui fait qu’à ce jour, toutes les décisions prises à la MASA, le sont par le président ainsi que d’autres membres nommés par le gouvernement et… des fonctionnaires, représentant différents ministères.
Franco Quirin a fait ressortir que cette situation est au détriment des artistes et que des décisions leur concernant sont prises dans leur dos, comme cela a été le cas lorsqu’on a décidé de geler la nouvelle grille tarifaire pour l’utilisation commerciale de la musique, la veille de sa mise en application.

Le ministre Teeluck a répondu que les élections n’ont pu avoir lieu car la MASA a une assemblée de 400 membres et le quorum en constitue 70. Des discussions sont toutefois en cours avec la Commission électorale pour voir comment de nouvelles élections pourraient être organisées, tout en respectant le protocole sanitaire.

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