Après plus de treize ans passés au poste constitutionnel de Directeur des Poursuites publiques (DPP), Me Satyajit Boolell, Senior Counsel, est en partance, ayant fait valoir ses droits au congé préretraite. Son départ de la Garden Tower est prévu demain après un Handing Over avec le Deputy DPP, Me Rashid Ahmine, devant assurer les affaires courantes.
Il reviendra à la Judicial and Legal Service Commission (JLSC) de procéder à la nomination à ce poste constitutionnel – qui a été au centre d’une animosité certaine avec le pouvoir Mouvement Socialiste Militant (MSM) post-législatives 2014. Dans les coulisses du judiciaire, on évoque des possibilités diverses pour la succession Me Satyajit Boolell SC, dont l’option d’un juge de la Cour suprême pouvant être appelé à assumer ces fonctions.
L’Office du Directeur des Poursuites Publiques est dans l’attente d’être fixé par la Judicial and Legal Service Commission (JLSC) sur le successeur de Me Boolell SC. Ce dernier a depuis la semaine dernière activé ses démarches pour son congé préretraite et devrait en cette fin de semaine effectuer un Handing Over au Deputy DPP.
Me Boolell a, en effet, rejoint le Parquet en 1986 et y a gravi les échelons de State Counsel au poste de Principal State Counsel en 1994. Il a par la suite été Assistant Solicitor General en 1998. Il a aussi servi comme magistrat au tribunal de Port-Louis et Pamplemousses. C’est en 2009 qu’il succède à Gérard Angoh au poste de DPP. Il quitte ainsi ce poste après y avoir passé plus de treize ans, n’ayant pas voulu faire le saut à la Cour suprême pour y servir comme juge.
Les relations entre l’Office du DPP et l’Hôtel du Gouvernement ont été des plus tumultueuses. Dans un premier temps, alors que le leader du parti soleil Pravind Jugnauth était sous le coup de poursuites dans l’affaire Medpoint, le gouvernement – alors mené par sir Anerood Jugnauth – avait entériné la décision de placer le Bureau du DPP sous la tutelle de l’Attorney General’s Office comme un département. Me Boolell a aussi été sous le coup d’une convocation de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) et a dû saisir la Cour suprême en juillet 2015 pour contester toute décision de la Commission anti-corruption de le convoquer, voire de l’arrêter dans le cadre de l’enquête sur l’affaire Sun Tan Hotels Pty Ltd. Il avait ainsi demandé et obtenu un ordre intérimaire contre l’ICAC et le Commissaire de Police (CP), interdisant à la Commission anti-corruption de le convoquer tant que la Cour suprême ne s’est pas prononcée sur sa demande d’injonction.
Par la suite, le gouvernement de SAJ a voulu mettre sur pied une Prosecution Commission qui a provoqué une levée de boucliers au sein de la classe politique avec, entre autres, la démission de Xavier-Luc Duval en tant que ministre et le départ du PMSD du gouvernement. Le souhait du gouvernement Jugnauth était de rendre le DPP redevable et que ce dernier réponde à la commission quant à l’abandon ou au maintien des poursuites.
Puis, il y a encore la MedPoint Saga d’autant plus que la poursuite a mené la vie dure au leader du MSM – de la Cour intermédiaire jusqu’au Privy Council en passant par la Cour suprême. Le MSM, notamment par le truchement de l’actuel Attorney General Maneesh Gobin, ne s’est d’ailleurs pas prié sous l’immunité parlementaire de s’en prendre DPP avec des sous-entendus politiques.
Désormais, ce Handing Over du DPP est suivi avec une attention redoublée du côté de Lakwizinn du PMO, avec notamment celui qui est considéré comme le fer de lance contre Pravind Jugnauth dans l’affaire Medpoint, Me Ahmine, étant le plus apte et le plus coté à prendre le relais de Me Boolell.
Dans la conjoncture, on laisse entendre que l’Establishment MSM aurait des réserves contre le Deputy DPP, ce dernier n’étant pas dans les bons carnets du pouvoir. D’ailleurs, le poste de DPP est le seul avec qui le MSM a eu des difficultés à s’imposer sur le front politique avec le dernier épisode en date, les positions conflictuelles entre l’ )Attorney General’s Office et le DPP sur la fuite du rapport de la Judicial Inquiry sur le meurtre de l’agent du MSM à Quartier-Militaire/Moka (No 8), Soopramanien Kistnen. Me Boolell avait clairement fait comprendre que son Bureau ne se laisserait pas intimider par les agissements de l’Exécutif, dont particulièrement de l’Attorney General.
La balle serait désormais dans le camp de la JLSC, qui est présidée par la cheffe juge Rehana Mungly-Gulbul pour nommer officiellement le remplaçant de Me Boolell . Dans les milieux judiciaires, l’on avance que certaines possibilités sont à l’étude, notamment en ce qui concerne l’aspect de séniorité dans le système d’administration de la justice.
Le nom d’un actuel juge, qui a été précédemment au Bureau du DPP est cité comme celui qui pourrait éventuellement être placé comme No 1 au DPP’s Office. Sauf qu’un tel scénario n’aurait pas de précédent. Il y aurait aussi le nom d’un ancien Assistant DPP, désormais affecté à un poste de responsabilité dans la hiérarchie de la Cour suprême qui est aussi évoqué.
Ces options s’inscrivent au cas où l’on devait couper court à une passation de relais à Rashid Ahmine. L’on devrait être fixé sur les intentions de la JLSC dans les prochaines semaines.
Affaire constitutionnelle à suivre…