Dépréciation de la roupie : Amoncellement de nuages à prévoir ?

Importations plus coûteuses, nouvelle hausse des taux intérêt sur les emprunts, inflation encore plus élevée. C’est ce que prévoient des experts financiers avec la faillite de la Silicon Valley Bank, aux États-Unis, qui laisse d’ailleurs planer le doute quant à la possibilité que ce soit la première d’une longue série. À quoi les Mauriciens doivent-ils donc s’attendre dans ce sillage ?

- Publicité -

Takesh Luckho, docteur en économie, prévoit des importations plus coûteuses avec l’écart qui se creuse sans cesse entre la roupie et le dollar et l’euro. Ce qui l’amène à anticiper un taux d’inflation entre 7 et 9%. Si la FED augmente son taux d’intérêt, dit-il, « la BoM n’aura d’autre choix, au prochain MPC (Monetary Policy Committee), que de revoir à la hausse le taux », ce qui ne sera pas sans impact sur les entreprises et les ménages ayant contracté des prêts. Il suggère que le quantum de la hausse du taux d’intérêt ne soit pas trop élevé. Comme mesures budgétaires dans un tel contexte, il recommande de poursuivre avec la CSG Allowance, qui pourrait passer de Rs 1 000 à Rs 1 500. « Ensuite, de réintroduire des subsides sur les produits de base et chercher des importations alternatives », propose-t-il.

Reaz Chuttoo, leader syndical, prévoit que les « consommateurs et ceux devant financer les études de leurs enfants à l’étranger souffriront ». Il rappelle que les prix des médicaments ne sont pas épargnés. Pour lui, dans un contexte de forte inflation, il existe seulement deux manières de venir en aide aux consommateurs : « Leur donner de l’argent à travers une augmentation de salaire ou des subsides, ou encore des allocations, et deuxièmement permettre à davantage de personnes de travailler au foyer. »

- Publicité -

Le syndicaliste fait un plaidoyer pour un contrôle rigoureux des prix des produits de première nécessité avec le retour des subsides et réclame des lois plus sévères contre les abus des commerçants et les publicités mensongères.
Amit Bakhirta, Chief Executive Officer d’Anneau, se montre pour sa part plus optimiste.

Tout en reconnaissant que « le différentiel de taux d’intérêt entre le dollar et la roupie s’est produit à l’un des rythmes les plus rapides de l’histoire récente. » Il est d’avis que les problèmes du secteur bancaire aux États-Unis et en Europe « pourraient accélérer la décélération de l’activité économique mondiale et pousser ainsi la FED et la BCE à suspendre leur resserrement, ce qui pourrait donner un répit à la roupie au fil des mois ».

- Advertisement -

L’analyste financier souligne encore que « notre situation aurait déjà pu et dû être matériellement meilleure malgré l’épuisement de la valeur de notre monnaie compte tenu de l’affaiblissement massif des prix mondiaux des matières premières et du fret ». Les prix du pétrole devraient être réduits d’au moins 33%. Pour lui, « les prix intérieurs sont maintenus artificiellement et à tort à ces niveaux théoriquement insoutenables pour des raisons qui pourraient être purement fiscales ».

TAKESH LUCKHO (ÉCONOMISTE) :
« Les importations seront plus coûteuses »

La constante dépréciation de la roupie face aux devises étrangères, sans compter la hausse prévue des taux d’intérêt de la Réserve fédérale (FED) ne fera qu’aggraver l’inflation. Le dollar s’est apprécié de 5,3% depuis janvier, atteignant Rs 47.43 en mars. Que faut-il prévoir comme répercussions sur le plan local ?
Dans une perspective plus large, il y a la faillite de la Silicon Valley Bank aux États-Unis et l’intervention de la FED. La valeur de la roupie face aux devises étrangères (dollar, euro, livre sterling) a baissé. Nous avons atteint un taux historique, soit le dollar à Rs 47,43, l’euro à Rs 51.

Nombre d’observateurs économiques sont perplexes par rapport à l’inaction de la Banque de Maurice dans une telle situation vu qu’une hausse des taux d’intérêt est prévue par la FED. Si la FED le fait, la BCE (Banque centrale européenne) devrait le faire aussi. En Europe, l’inflation est encore élevée à cause des facteurs davantage internes qu’externes. C’est pourquoi on voit une majoration des taux d’intérêt. Les taux d’intérêt faibles ont fait qu’il y a beaucoup de liquidités et pour stabiliser la situation, ils haussent le taux d’intérêt.

La faillite de la Silicon Valley Bank a un effet boule de neige, créant un manque de visibilité sur le marché. Nous savons qu’aux États-Unis, le marché des risques, les banques d’investissements, d’après des spéculations, ont un gros impact et peuvent donc affecter l’économie très vite. Pour stabiliser le dollar donc, la FED et la BCE devraient augmenter les taux d’intérêt.

Quelles peuvent être les répercussions ?
Si le taux est revu à la hausse, le dollar s’appréciera. Au lieu de faire des retraits pour utiliser le dollar, les gens préféreront le garder à la banque comme épargne, ce qui diminuera la disponibilité du dollar sur le marché. Le prix du dollar augmentera donc. Le dollar est à Rs 47,43 actuellement. Première possibilité : la Banque Centrale peut ne pas intervenir comme c’est le cas maintenant et c’est surprenant que depuis plus d’un mois et demi, la valeur de la roupie ait chuté et cette instance n’a rien fait. Pourquoi ?
Personnellement, j’y vois un schéma comme dans le passé. Depuis le Covid-19, en effet, le gouvernement est venu avec une stratégie en puisant dans les Special Reserve Funds. C’était censé être un One-Off Payment mais le gouvernement et la Banque de Maurice, à plusieurs reprises, ont utilisé les fonds des Special Reserve Funds pour faire des transferts pour la politique fiscale du pays.

Quand le budget approche, il y a une tendance de la Banque de laisser la roupie se déprécier. Les réserves en devises prennent alors de la valeur. Mais, nous ne pouvons mettre cette valeur dans ces réserves. Nous la mettons dans les Special Reserve Funds. Je vois ce schéma venir. J’espère que tel n’est pas le cas car nous risquerions de nous retrouver en eaux troubles, ce qui affectera le secteur financier.
Nous sommes sortis de la liste noire. Les agences internationales ne seront pas indulgentes avec nous cette fois. Moody’s a déjà baissé la note de Maurice pour avoir servi de tels fonds pour financer directement ou indirectement le gouvernement. Il y a eu une sorte de transfert d’argent de la Banque Centrale au gouvernement, du moins vers une entité du gouvernement.

D’autres répercussions ?
Maurice important 75% de ses produits d’Asie en dollar américain, les importations seront donc plus coûteuses. Et 30% de nos produits viennent d’Europe et avec la montée de l’euro… Au bout du compte, nous pourrons nous retrouver avec des taux d’inflation entre 7-9%, ce qui est très élevé pour un pays comme Maurice.

Quelle est la marge de manœuvre de la Banque Centrale dans un tel contexte pour renverser la vapeur ?
Si la FED augmente son taux d’intérêt, la BoM n’aura d’autre choix, à la prochaine réunion du MPC (Monetary Policy Committee), que d’augmenter l’intérêt. L’an dernier, la Banque de Maurice avait attendu que le dollar atteigne Rs 46. Là, c’est Rs 47. Il y a la crainte que le dollar atteigne Rs 50.
Si la BoM n’intervient pas, la valeur de la roupie chutera davantage. Si la FED augmente son taux d’intérêt, il y a de fortes chances que la BoM lui emboîte le pas, en augmentant par le même taux ou un peu plus. La dernière fois, la FED avait augmenté son taux par 0,75 et la BoM par 1 point, ce qui avait ramené la valeur du dollar à Rs 43. Bien évidemment, il y aura des répercussions sur le taux d’épargne et d’emprunt.

Les entreprises et les particuliers ayant contracté des prêts souffriront encore…
Les décisions monétaires macroéconomiques ont certes des impacts microéconomiques sur les entreprises et les ménages. Nous n’avons pas d’autre choix car nous ne pouvons permettre que notre roupie baisse davantage. Nous pouvons juste jouer sur le quantum de la hausse : 0,5%, 0,7% ou 1%.
Le quantum peut ne pas être trop fort pour éviter l’impact sur les ménages et les entreprises. Rs 500 sur des revenus de Rs 12 000, c’est beaucoup. La Banque de Maurice peut ne pas avoir recours uniquement à l’intérêt mais utiliser l’Open Market Intervention (vente de dollars sur le marché pour augmenter la valeur de la roupie).

En marge du prochain exercice budgétaire, quel mécanisme de soutien au pouvoir d’achat l’État pourrait-il mettre sur pied dans un tel contexte ?
Il faudrait des mesures sur les court, moyen et long termes. Sur le court terme, poursuivre avec la CSG Allowance, passant de Rs 1 000 à Rs 1 500. Ensuite, réintroduire des subsides sur les produits de base ou un mécanisme temporaire de gel des prix car malgré l’importation par la State Trading Corporation (STC), les prix demeurent très élevés. Aussi, chercher des importations alternatives pour des prix moins chers.

Quand les consommateurs mauriciens pourront-ils enfin souffler ?
Je pense après le budget. Vu qu’il règne un parfum d’élections, même si le ministre a dit que ce ne sera pas un budget populiste, il comportera des mesures Fer Labous Dou. Mais, d’un point de vue strictement économique, ce ne sera pas de sitôt.

REAZ CHUTTOO (SYNDICALISTE) :
« Les consommateurs souffriront davantage »

Alors que les Mauriciens subissent de plein fouet l’inflation, la situation devrait s’aggraver avec la constante dépréciation de la roupie face aux devises étrangères. Sans compter la hausse prévue des taux d’intérêt de la Réserve fédérale, qui ne fera qu’empirer l’inflation. Comment envisagez-vous les choses ?
Évidemment, les consommateurs souffriront car la plupart de nos produits de consommation sont importés. Il y a aussi les prix des médicaments qui prennent l’ascenseur. Je ne sais si c’est à cause de la hausse du dollar mais il y a des consommateurs qui se retrouvent dans l’obligation de se tourner vers des médicaments génériques car les importateurs n’importent plus ces médicaments. Un exemple : l’Epanutin, médicament pour le traitement de l’épilepsie qui est coûteux, se vend au-delà de Rs 1 300. Avec la montée des devises, les importateurs n’en importent pas. Définitivement donc, deux catégories de personnes souffriront : les consommateurs et ceux devant financer les études de leurs enfants à l’étranger.
De l’autre côté, celles qui profiteront de la situation sont bien les entreprises qui sont tournées vers l’exportation. Elles bénéficieront énormément car quand elles changeront leurs devises en roupies, cela leur fera beaucoup d’argent.

Après deux années dures pour les Mauriciens, la situation se corsera donc…
Je suis très pessimiste en effet car avec la fermeture de la Silicon Valley Bank le 10 mars dernier et la banque Crédit Suisse en perdition, je crains une crise financière internationale. Si c’est la première d’une longue série, cela ne sera pas sans effet sur nous. Il est probable aussi que la fermeture des banques entraîne une dégringolade des devises étrangères. Pour l’heure, je suis pessimiste mais nous ne savons pas comment les choses évolueront. N’empêche, cela fait peur.

Dans un pareil contexte, en marge du prochain budget, quels sont les mécanismes de soutien au pouvoir d’achat que le ministre des Finances pourrait mettre en place pour aider les consommateurs à garder la tête hors de l’eau ?
Dans un contexte de forte inflation, il existe seulement deux manières de venir en aide aux consommateurs : leur donner de l’argent à travers une augmentation de salaire ou des subsides ou encore des allocations. Et deuxièmement, permettre à davantage de personnes de travailler au foyer. Les deux sont faisables.
Nous avons proposé une augmentation de l’allocation de la CSG de Rs 1 000 à Rs 1 500. Cette allocation seule ne saurait suffire. Il faut encore un contrôle rigoureux des prix des produits de première nécessité avec des subsides.
Par ailleurs, il faut savoir que 55% des femmes ne travaillent pas dans le pays. Il faut une politique de formation pour elles. En Afrique du Sud, beaucoup d’opérateurs d’engins de chantier sont des femmes.
À Maurice, pour pourvoir opérer de tels engins, il faut avoir une Private Car License, ce qui coûte au minimum Rs 20 000. La personne n’a pas les moyens de payer cette somme. Or, dans le passé, la police délivrait un permis Inbound pour conduire l’engin à l’intérieur du chantier. Il ne s’agit là que d’un exemple.
Imaginez que dans chaque famille, la femme travaillait. Cela aiderait ! Il faut augmenter le nombre de Bread Earners. J’espère que le gouvernement intervienne dans ce sens. Le travail est là. Nous n’avons pas à importer la main-d’œuvre étrangère.

Faut-il une demande formelle des autorités aux grandes surfaces pour qu’elles pratiquent les prix les plus bas possibles pour les produits de consommation ?
Définitivement. Dans notre mémorandum, nous avons élaboré dessus. Il existe des publicités mensongères. Par exemple, une publicité est faite sur un riz basmati à Rs 300. Lorsque le client se rend au supermarché en question, un nombre limité du produit a été mis sur l’étagère et à 10h du matin, plus aucun sachet de ce riz n’est disponible !
Le client a payé un transport pour s’y rendre et il n’a alors pas le choix : il lui faut du riz, il doit acheter une autre marque de riz. Il faudrait que les autorités sévissent sévèrement contre de telles pratiques.
Autre exemple : nous avions demandé d’éviter le gaspillage ; que les grandes surfaces fassent un don des produits sur le point d’expirer comme cela se fait dans d’autres pays. Or, que voyons-nous ? Des produits parvenus presque à expiration passent par la cuisine du supermarché pour être vendus. Et lorsque le plat cuisiné est invendu, le lendemain, on fait un autre plat avec.
Quel contrôle a-t-on ? Où est l’application de la Food Act ? Le problème, c’est qu’il nous manque des ressources humaines pour contrôler ce genre de pratiques.
En l’absence d’inspecteurs, il faut donner les moyens aux consommateurs de dénoncer ces pratiques. Il faut un système, une plateforme numérique où ils peuvent, preuve à l’appui, poster les écarts pour que les autorités puissent prendre des sanctions. Il faut une enquête même si la personne qui dénonce le fait sous anonymat.
Bien des importateurs gardent un levier de chantage. Dès qu’on leur met la pression, ils gèlent l’importation. Le gouvernement aurait dû venir avec des lois plus sévères car ce sont les consommateurs qui souffrent.

Le chèque alimentaire est-il une autre solution envisageable ?
Je ne suis pas vraiment en faveur car si une personne est pauvre, elle doit venir prouver qu’elle est démunie. Je préfère des subsides sur les produits de base pour que tous en bénéficient. De l’autre côté, augmenter la taxe de ceux n’étant pas censés en bénéficier de 0,05%. Ainsi, personne ne sera humilié. Je ne souhaite pas que certaines personnes soient considérées comme des citoyens de deuxième grade.

Pour conclure…
Lors de notre rencontre avec le ministre des Finances, il a annoncé qu’il y aura une rigueur intellectuelle dans le budget. Nous sommes d’accord avec lui sur ce point car il faut pouvoir retirer l’argent là où il n’est pas nécessaire pour le placer là où il servira. Exemple : les compagnies qui paient des millions de dividendes à leurs actionnaires et qui bénéficient de subsides sur le salaire minimal. Il faut aider ceux au plus bas de l’échelle. Il faut plus de Bread Earners par famille, en l’occurrence, les femmes et les jeunes.

AMIT BAKHIRTA (ANALYSTE FINANCIER) :
« Les prix du pétrole devraient être réduits d’au moins 33% »

La constante dépréciation de la roupie face aux devises étrangères, sans compter la hausse prévue des taux d’intérêt de la Réserve fédérale (FED) ne fera qu’aggraver l’inflation. Le dollar s’est apprécié de 5,3% depuis janvier, atteignant Rs 47.43 en mars. Que faut-il prévoir comme répercussions sur le plan local ?

L’écart de taux d’intérêt entre le dollar américain et la roupie mauricienne s’est en effet considérablement creusé sur une courte période. En mars 2020, le Spread était de – 1,60 % alors qu’aujourd’hui il s’est élargi à + 0,25 %, probablement à + 0,50 % d’ici la fin du mois si la FED se resserre tandis que la Banque de Maurice tient.

Cet élargissement de l’écart de taux d’intérêt s’est produit à l’un des rythmes les plus rapides de l’histoire récente, la FED ayant tardé à se resserrer, tout comme la Banque de Maurice. En concordance, la BCE a encore resserré de +0,50% la semaine dernière, creusant le différentiel de taux d’intérêt de l’euro et de la roupie mauricienne à un niveau historiquement élevé de -1%. Et donc, l’affaiblissement de la roupie face aux deux devises fortes.
La monnaie de notre pays a perdu -85 % par rapport à l’euro et -76 % par rapport au dollar américain depuis 2002. Pour ceux qui comprennent ses implications, c’est une catastrophe pour certains et pour d’autres une bénédiction. Malgré la roupie nettement plus faible, avec des prix mondiaux des matières premières et du fret sensiblement plus faibles (les prix du pétrole brut sont désormais de 47% inférieurs à USD 65 le baril, les prix mondiaux des matières premières de 34% plus faibles en moyenne et respectivement le Baltic Dry Index et le Freightos Baltic Index de -72% et -87% de moins que leurs pics respectifs), cela devrait commencer à faire pression sur les prix à partir de cette année.
De plus, les problèmes du secteur bancaire aux États-Unis et en Europe pourraient accélérer la décélération des activités économiques sur le plan mondial, surtout dans les économies développées. Et ainsi, la plausibilité que la FED et la BCE soient susceptibles de suspendre leur resserrement, et éventuellement de pivoter vers un assouplissement, pourrait très probablement donner un répit à la roupie au fil des mois.
Les prix de l’essence à la pompe restent à des niveaux insoutenables par rapport aux prix mondiaux du pétrole brut et notre taux directeur de base reste toujours malheureusement trop accommodant.

Quelle est la marge de manœuvre de la Banque Centrale dans un tel contexte pour renverser la vapeur ?
Chez Anneau, nous plaidons clairement depuis longtemps pour un soutien du bilan fragile de la banque centrale. Partout dans le monde, au fur et à mesure que les conditions monétaires se resserrent et que le processus de resserrement quantitatif s’intensifie, les banques centrales sont susceptibles d’afficher d’importantes pertes comptables globales dans leurs livres.
C’est plutôt simple. Plus les taux d’intérêt sont élevés, plus il devient coûteux pour la Banque Centrale de faire face à ses obligations. Les pertes comptables sont gérables pour une banque centrale, à condition que les réserves du pays soient solides et que les marchés financiers mondiaux soient stables.
Plus important encore, elle doit être solvable, c’est-à-dire que le capital et les réserves de son bilan doivent être positifs, ce qui n’est pas le cas pour le bilan de la Banque de Maurice. Cela dit, elle doit resserrer jusqu’à 5,50% au cours des prochains mois, puis faire une pause et évaluer les principaux indicateurs macroéconomiques.
Sinon, les seules interventions de change, simplement, sont peu susceptibles d’être fructueuses, très coûteuses et ne constituent pas le mécanisme idéal pour stabiliser la roupie alors qu’elle fait face à un élargissement de l’écart de taux d’intérêt ainsi qu’à un marché domestique bancaire qui continue de thésauriser leurs devises fortes et vendent à découvert la roupie.

Faut-il s’attendre à une situation pire que ces deux dernières années compte tenu de la guerre qui se poursuit en Ukraine ? Sans compter que les consommateurs subissent déjà des hausses accélérées des prix et que la baisse des prix des carburants n’est pas pour demain, à entendre le ministre des Finances…
Notre situation aurait déjà pu et dû être matériellement meilleure malgré l’épuisement de la valeur de notre monnaie. Compte tenu de l’affaiblissement massif des prix mondiaux des matières premières et du fret, les prix du marché intérieur devraient être beaucoup plus faibles qu’ils ne le sont actuellement.
Les prix intérieurs sont maintenus artificiellement et à tort à ces niveaux théoriquement insoutenables pour des raisons qui pourraient être purement fiscales. Ces politiques publiques régressives, insensibles aux réalités de paupérisation de nos populations et à la compétitivité de notre économie, doivent être revisitées.

En marge du prochain exercice budgétaire, quel mécanisme de soutien au pouvoir d’achat l’État pourrait-il mettre sur pied ? Des chèques alimentaires aux plus modestes, inviter les grandes surfaces à pratiquer les prix les plus bas possibles ?
Déjà, les prix pétroliers devraient être réduits d’au moins 33 % et une loi devrait être promulguée et des mesures prises pour garantir que les prix du commerce et des matières premières dans l’économie réelle soient surveillés par les régulateurs et les agences gouvernementales de manière à refléter les prix du marché mondial. Autrement dit, un contrôle des prix.
De nombreuses maisons de commerce sur le marché intérieur ont maintenu des prix plus élevés, bien que les prix des intrants importés et les prix du fret se soient considérablement affaiblis. Des coupons de rabais et de nourritures pour les plus modestes d’entre nous devraient être distribués. Mais ceux-ci sont secondaires si les changements de prix susmentionnés et les contrôles des prix ne sont pas établis.

Quand une sortie de l’inflation est-elle à prévoir, selon vos estimations ? Quand les consommateurs mauriciens pourront-ils enfin souffler ?
Si nos prévisions sont raisonnablement justes à Anneau, nous pensons qu’à partir de cette année – encore une fois, malgré les mesures insoutenables des prix des matières premières sur le marché domestique par l’exécutif – nos consommateurs devraient commencer à connaître un relatif répit.

- Publicité -
EN CONTINU
éditions numériques