Les transferts dans la magistrature, ou plutôt la valse entre magistrature et Parquet, peuvent parfois occasionner de graves préjudices pour les justiciables.
En témoigne une affaire de licenciement abusif qui a été Pending devant la Cour industrielle depuis cinq ans, et qui doit maintenant être entendue depuis le début devant un nouveau magistrat.
Dans une correspondance en date du 3, Me Feroza Modarbocus Moolna, Senior Attorney, demande à la cheffe-juge, Rehana Mungly-Gulbul, qui préside aussi la Judicial and Legal Services Commission (JLSC), de surseoir pour l’instant au transfert de la magistrate Darshana Gayan, qui présidait la Cour industrielle avant son récent transfert au bureau de l’Attorney-General. Une copie de cette lettre a aussi été envoyée à l’Acting Master & Registrar de la Cour suprême, Wendy Rangan.
Cette requête a été formulée à la demande d’un client de Me Modarbocus Moolna, Sheik Oumed Ali Torabally. Ce dernier avait entré une affaire le 4 septembre 2018 devant la Cour industrielle pour licenciement injustifié par Air Mauritius, affaire qui était entendue par la magistrate Darshana Gayan.
Cette affaire avait été renvoyée plusieurs fois par la suite. Le 2 juin 2023, les deux parties avaient soumis leurs plaidoiries, et un jugement devait être rendu le 30 juin. Mais ce jour-là, la magistrate Gayan avait informé les parties qu’elle n’avait pu écrire le jugement, n’ayant reçu la transcription des plaidoiries que le jour précédent.
Elle avait aussi informé les parties que cette affaire devrait être entendue depuis le début par un autre magistrat, vu qu’elle avait reçu un ordre de transfert vers le bureau de l’Attorney-General. Ce procès sera appelé de nouveau en Cour le 27 juillet, pour qu’une date soit fixée pour sa continuation.
De son côté, Sheik Oumed Ali Torabally a pris de l’emploi en Arabie saoudite en 2020, laissant sa famille à Maurice. Ses enfants grandissent largement en l’absence de leur père, tandis qu’il ne peut prendre soin de ses parents âgés. Il a dû faire le déplacement à Maurice à maintes reprises pour les besoins de ce procès.
Pour ce père de famille, cette affaire lui porte un préjudice considérable vu qu’elle a été Pending devant la Cour depuis 5 ans, période pendant laquelle il a souvent dû faire le déplacement à Maurice.
Fin juin, il y a eu une valse de transferts dans la magistrature, au bureau du DPP et au bureau de l’Attorney-General. Pas moins de 13 magistrats, siégeant dans divers Cours de district, avaient été transférés. Le transfert d’un magistrat d’une Cour à une autre ne pose pas tellement de problèmes pour les personnes qui ont entré des affaires en Cour, vu que le magistrat, qui a été transféré doit se rendre à son ancien lieu de travail pour continuer d’entendre les affaires qui lui avaient été assignées.
Par contre, le transfert d’un magistrat vers le bureau de l’Attorney-General ou du Directeur de Poursuites Publiques (DPP) doit être entendu à nouveau par un autre magistrat.
Un transfert parmi d’autres qui, comme le fait ressortir l’avouée Feroza Modarbocus Moolna dans sa lettre à la cheffe-juge, n’est pas dans l’intérêt de la justice, et porte gravement préjudice aux personnes qui ont entré des affaires en cour. Elle maintient que cette démarche sape aussi la confiance que les justiciables ont dans le système judiciaire.
Elle maintient que tous ces transferts dans la magistrature ont été faits sans prendre en considération les affaires pendantes devant tel ou tel magistrat et le préjudice que cela peut occasionner aux personnes qui ont entré des affaires en cour et qui doivent prendre leur mal en patience et attendre que tout recommence devant un nouveau magistrat.

