“Des fois quand je ferme les yeux, je me demande si je vais les rouvrir à nouveau”. Paroles de Sabrina, actuellement en convalescence. D’une simple grippe, elle a frôlé la mort. “Je reviens de loin”, dit-elle, revenant sur les cinq jours passés la semaine dernière en soins intensifs. L’histoire de Sabrina n’est pas isolée. Plusieurs personnes actuellement souffrent de la grippe saisonnière. Si pour certains, après quelques jours les symptômes disparaissent, pour d’autres, c’est une autre affaire. Bien des patients se pointent dans les établissements de santé, publics ou privés, en détresse respiratoire avec également des maux de tête plus intenses, des courbatures, un écoulement nasal persistant et une toux plus aiguë. Un épisode qui rappelle la pandémie du Covid.
“C’est pire que le Covid, je dirai”, confie Sabrina. Pour avoir eu deux fois le Covid, elle sait de quoi elle parle. Pourtant, comme beaucoup d’autres patients, elle ne se doutait pas que son cas était aussi grave. D’ailleurs, elle était au chevet de sa fille, elle aussi atteinte d’une grippe quelques jours plus tôt. “Cela faisait deux semaines que ma fille Anaïs traînait une vilaine grippe. Au départ, on prend quelques médicaments qu’on connaît, mais voyant que cela ne passait pas, on a été voir le médecin”, raconte Sabrina, âgée de 53 ans. C’était le vendredi 29 septembre.
En revenant de chez le médecin qui a finalement donné des antibiotiques à la patiente, Sabrina, qui est pourtant totalement vaccinée contre le Covid, se sent elle aussi patraque. “J’avais comme une subite perte d’énergie. Je suis allée m’allonger un peu”, se souvient-elle. Mais à son réveil après sa microsieste, elle note qu’elle tousse aussi un peu et puis, surtout, elle commence à avoir des courbatures. Elle décide de consulter le médecin elle aussi et est mise immédiatement sous antibiotiques.
État léthargique
Son week-end, Sabrina ne l’aura pas vu passer. “Je n’ai rien compris, ni samedi ni dimanche. J’étais dans un état léthargique. J’avais mal partout, j’étais nauséeuse, et j’avais des courbatures pas possibles”, se souvient-elle. Le lundi, à la première heure, elle revoit à nouveau le médecin. “Il m’a fait une injection et a pris mes constants. Et à son visage, j’avais compris que ça n’allait pas. J’affichais 84% de saturation d’oxygène”, dit Sabrina. Immédiatement, le médecin la place sous nébuliseur (dispositif médical permettant de diffuser les médicaments sous forme d’aérosol directement dans le système respiratoire).
Après quelques minutes, le médecin lui permet de partir. Mais à peine a-t-elle mis les pieds dans le taxi qui devait l’emmener chez elle que Sabrina tombe dans les pommes. “Enn sel kout mo’nn trouv nwar. Mo pa kone ki’nn arive”, raconte-t-elle. Alerté, le médecin l’ausculte et décide d’appeler le SAMU pour la conduire à l’hôpital. “Ce dont je me souviens, c’est que le médecin me demandait de garder les yeux ouverts. Mais je ne voyais rien. Tout était noir. Je ne comprenais pas ce qui se passait. Je me sentais en train de quitter mon corps”, dit Sabrina.
À l’hôpital, elle est prise en charge immédiatement et est soumise à une batterie de tests, dont les radiographies qui confirment qu’elle a une infection respiratoire aiguë. Sabrina doit être admise d’urgence, car son taux d’oxygène baisse. Son test confirme par ailleurs qu’elle n’a pas le Covid. Heureusement, mais pour sa famille, vu l’état de santé de Sabrina, l’inquiétude est à son comble. Elle décide de la transférer dans une clinique privée. Là-bas, les données du dossier santé de Sabrina à l’hôpital sont confirmées : elle souffre d’une infection respiratoire aiguë. Si c’est commun en ces jours de changement de saison, la prise en charge doit être rapide, car le manque d’oxygène est conséquent. Sabrina est ainsi admise aux soins intensifs. Cinq jours durant.
« Je reviens de loin »
“J’ai repris mes esprits plus tard, mais ce n’était pas évident pour moi. J’avais du mal à respirer. On a dû me mettre sous appareil”, explique-t-elle. Une situation qui la traumatise encore aujourd’hui. “A chaque fois qu’on retirait l’appareil, mon taux d’oxygène faisait le yoyo encore. Ça baissait. Si bien qu’il fallait un monitoring constant pendant plusieurs jours”, raconte Sabrina. Ces longues heures aux soins intensifs sont un épisode qu’elle souhaite oublier, car, dit-elle, “pa fasil pou viv sa. Enn ta laparey ar ou. Ou pa gagn vizit. Il n’y a que le plafond”.
Ce n’est que le vendredi qu’elle a eu sa décharge après un jour en salle normale. Mais là encore, chez elle, Sabrina est contrainte de se mettre chaque quatre heures sous nébuliseur parce qu’elle a encore du mal à respirer normalement. Sa famille a dû faire des démarches pour se procurer un appareil. « J’ai peur de fermer les yeux. Je ne sais pas ce qui peut arriver. Je reviens de loin », raconte la quinquagénaire. Surtout que si elle ne fait plus de fièvre, elle se sent toujours en perte d’énergie. « Je dois rester allongée, car je suis en état de faiblesse permanent depuis mon retour à la maison », explique Sabrina. Quand elle repense à comment elle a atterri à l’hôpital, elle remercie le ciel. « Heuresuement que j’étais encore chez le médecin. Si j’étais tombée en route, ou si c’était chez moi, je ne serai sans doute pas là », dit-elle encore traumatisée et se demandant quel est ce virus qui « pe zet dimounn anbas sa kalite la. »
HT
Post Covid
La population plus vulnérable aux infections respiratoires aiguës
La baisse du système immunitaire au sein de la population rend cette saison d’infections respiratoires aiguës plus préoccupante que jamais, estiment les professionnels de santé. En effet, si selon les chiffres de la Santé il y a une légère baisse des cas de grippe — le nombre se chiffrant à 5 068 cas entre le 25 septembre et le 1er octobre, contre 5 573 la semaine précédente (mais cependant en hausse par apport à l’année dernière à la même période) —, il y a au sein de la population une hausse des cas d’infections respiratoires aiguës. D’où la mise en garde des médecins contre les symptômes grippaux notamment découlant de la triple menace : l’influenza, le virus respiratoire syncytial et le Covid-19.
Baisse du système
immunitaire
Les professionnels de santé sont d’avis que ce ne sont pas les virus qui sont plus virulents, c’est le système immunitaire de la population qui a été affaibli après le Covid. “Le fait que de nombreuses personnes n’ont pas été exposées au virus de la grippe pendant la pandémie de Covid-19 les rend aujourd’hui plus vulnérables aux virus en circulation, notamment l’influenza, le virus respiratoire syncytial (VRS) et le Covid-19”, notent-ils. De plus, ceux dont le système immunitaire a été affaibli en raison de leur comorbidité ont du mal à lutter contre les infections respiratoires aiguës, font aussi ressortir les médecins, qui pensent également que le manque d’activité physique régulière pendant la période du Covid-19 a contribué à affaiblir le système immunitaire de certaines personnes.
Tripledémie
Face à cette « tripledémie », la vigilance est de mise, disent les professionnels de santé, qui rappellent que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait anticipé une augmentation des infections virales, en particulier des infections respiratoires, à chaque changement de saison. Actuellement, un nombre croissant de patients présentent des symptômes presque identiques, indépendamment de l’agent pathogène, car l’influenza, le VRS et le Covid-19 partagent des symptômes similaires tels qu’un écoulement nasal, un mal de gorge, une toux sèche, de la fièvre et parfois des courbatures.
Les médecins mettent en garde également contre le fait de banaliser les symptômes grippaux. “Avec le déséquilibre causé par la pandémie, de nombreuses personnes ont du mal à faire face aux infections respiratoires et développent des symptômes plus graves qu’auparavant”, soulignent-ils, recommandant à chacun à rester vigilant et à prendre les précautions nécessaires pour éviter de tomber malade, en particulier les personnes ayant des comorbidités, qui sont plus à risque de complications.
Retour des
gestes barrières
Par conséquent, les mesures de précaution restent les mêmes pour lutter contre ces infections : le port du masque dans les endroits mal ventilés. Les médecins insistent sur l’importance de porter le masque pour se protéger et protéger les autres, et exhortent également les personnes malades à rester chez elles et à éviter les rassemblements pour ne pas propager les virus, qui sont hautement contagieux et affectent le système respiratoire.
Les professionnels de santé recommandent aussi vivement de renforcer le système immunitaire par une alimentation saine et équilibrée ainsi que par une activité physique régulière. Cela aidera à renforcer le système immunitaire pour lutter contre les virus, affirment-ils.