Marie Scipion, conseillère du village de Terre-Rouge : « À chaque grosse averse, des familles reculent de dix pas »

Marie Diana Scipion, élue conseillère du village de Terre-Rouge, habite actuellement Résidence Riche-Terre. D’une inaltérable force positive, elle ne cesse de servir la communauté mauricienne, en particulier des jeunes et des enfants de son quartier.

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Elle est à la recherche d’un lieu pour que des habitants de la localité puissent se réunir et où des jeunes pourront évoluer par l’entremise de leurs divers ateliers d’éveil. Cependant, ne perdant pas son sens critique, elle estime que les familles de Résidence Riche-Terre méritent une meilleure considération au vu de leurs difficultés par temps de fortes pluies.

Marie Diana Scipion, si vous aviez à évoquer votre parcours, que diriez-vous ?

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Je suis Marie Diana Scipion, née Etienne il y a 36 ans, et originaire de Rodrigues. Je suis arrivée à Maurice à l’âge de 4 ans avec ma famille, qui louait une maison à Bambous, Camp-Rodriguais, au pied de la montagne près du réservoir La-Ferme. J’ai été scolarisée à Bambous A, G.S., et a fréquenté jusqu’à la Lower 6 le Collège London de Port-Louis.

En 2002, j’ai bougé vers Baie du Tombeau en compagnie de mes parents, qui sont devenus propriétaires en 2005 d’une maison de la NHDC, Résidence Riche-Terre (Terre-Rouge,) et nous y habitons toujours.
Mariée, mère d’une fille de 16 ans, employée dans un Shelter où j’étais Caregiver, je me retrouve aujourd’hui au sein de l’administration en ma qualité d’assistante à la gérance de cet établissement. Je suis aussi assistante et responsable des activités de l’association Nelson Mandela Sports Club sous la présidence d’Alain Spéville. Je suis conseillère du village de Terre-Rouge et engagée dans ma paroisse, tout en accompagnant des enfants et jeunes du quartier.

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Quand a commencé votre passion pour le social?

Ma passion pour l’entraide et le social a germé très tôt mais le véritable engagement a commencé quand j’avais 18 ou 19 ans. J’avais débuté avec la garde de deux filles, aujourd’hui âgées de 19 et 21 ans.
Il y avait alors une association à la NHDC dont j’étais membre mais au vu de nombreuses difficultés et de tant de préjugés, j’ai préféré prendre mes distances du groupe.

Ils étaient tenaces, ces préjugés?


Je préfère ne pas m’étendre sur la question. Je vous laisse tirer vos propres conclusions.
Vous avez poursuivi les activités avec le groupe?
Après avoir quitté le groupe, j’ai continué à programmer jeux et autres activités. Comme nous n’avions aucun espace dédié, nous étions contraints d’en organiser pour les enfants sur des places parking tous les dimanches et de venir en aide aux enfants du quartier avec les classes de rattrapage.

Il y a eu des classes des enfants et jeunes avec le concours de la communauté bahaïe pour inculquer les valeurs morales aux enfants tant sur le savoir-vivre que le sens du service. Nous comptons une cinquantaine d’enfants et de jeunes tout au plus.
Notre quartier comporte 75 maisons, avec une centaine de familles. Les enfants ont grandi. Certains sont mariés et vivent chez leurs parents dans la localité même. Nous avons ici des enseignants, des policiers, des peintres, des maçons, des employés de maison, de bons footballeurs, entre autres.

Vous nous donnez l’impression que la vie est rose en la Résidence Riche-Terre…
 Ce n’est malheureusement pas le cas. Pour nos 18 ans d’existence, nous souffrons d’un manque aigu d’infrastructures pour nous détendre et nous adonner à des activités.

Le président du conseil de district de Pamplemousses Sunil Soomaroo, jadis président du village, nous a aidés dans plusieurs domaines. Dès notre arrivée en 2005, il n’a jamais cessé de nous soutenir dans le cadre de nos activités et démarches que ce soit sur le plan social et culturel, projets Indoor et Outdoor, ou encore quant au projet de stade synthétique qui aboutira bientôt.
Depuis déjà plus de 10 ans, si je ne me trompe pas, nous avons un centre qui était un projet de Telecom Foundation, repris par le National Empowerment Fund (NEF) et aujourd’hui sous l’administration d’un ministère. Mais il n’a été utilisé qu’une année pour les activités en 2012/2013 puis fermé depuis 2014/2015. Nous n’avons nulle part où aller pour entreprendre nos activités.

Vu qu’il y a de nombreux enfants, nous utilisons les moyens du bord – Lor Koltar – chez des familles qui veulent bien nous prêter leurs cours ou maisons. Nous avons envoyé des lettres et des pétitions signées mais rien n’a été entrepris à ce jour. Nous nous sentons abandonnées quelque part, mais heureusement que nous bénéficions de l’aide du conseil de district de Pamplemousses et du village ainsi que des sponsors tels que Princes Tuna, Scott & Co Ltd, Meaders Feed, Archemics Ltd et des donateurs individuels pour tenir certaines activités.

En compagnie de nos membres et des habitants du quartier, ainsi que du conseil du village et de nos sponsors, nous organisons à fréquence régulière, des Sports Day, tenons des ateliers de dessins et activités, programmons des déjeuners pour les enfants et le nettoyage du quartier entre autres.
Notre plus gros problème ici: les grosses pluies en été. Il est triste de voir des maisons inondées, des familles qui, à chaque fois, reculent de 10 pas. Il y a un projet de tout-à-l’égout déjà Gazetted mais nous attendons toujours… et encore une fois, cela fait plus de 10 ans que nous subissons les ravages des fortes averses. Jusqu’à présent, c’est avec l’aide des pompiers, entre autres, que nous nous organisons tant bien que mal pour l’évacuation des eaux de pluie.

Quels sont vos rêves ?


Notre plus grand rêve, c’est d’avoir un lieu spécifique où nous pouvons mener nos activités : accompagnements scolaires, alphabétisation, campagnes de sensibilisation etc. Un endroit où des habitants du quartier puissent, le week-end ou jour férié, se retrouver pour une partie
de dominos entre autres moments de détente. Pour le moment, Pena plas pe bizin al pas letan anba pie-mang.
Malgré tout, cette passion pour le social est ancrée dans mes veines. Même si quelquefois je me retrouve seule ou avec des préjugés et des découragements, je ne baisse pas les bras.

Merci au Tout-Puissant, qui ne m’abandonne jamais ! Je ne suis pas riche en argent mais le suis en compassion, en charité, tolérance – et pour moi c’est l’humain avant tout.
Venant d’une famille où unité et entraide sont la devise, j’essaie de toute mon âme d’inculquer cela à tous ceux que je côtoie ; en particulier, la tolérance et le respect de chaque communauté. Avec le soutien de ma fille, de mon époux, de toute ma famille et des habitants du quartier, sans oublier mes enfants et mes jeunes que j’aime de tout mon cœur, je demande l’aide de Dieu chaque jour pour qu’il m’encourage à poursuivre ma route.

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