Pénuries d’eau fréquentes, chantiers à l’arrêt, drains obsolètes, crevasses et fléaux sociaux…
Si de nombreuses régions de l’ouest de l’île sont marquées par de fortes progressions infrastructurelles, économiques et sociales, on ne doit pas occulter certaines réalités beaucoup moins reluisantes dans d’autres villages du N°14, à l’instar de Bambous, où les pénuries d’eau fréquentes méritent un diagnostic approfondi. Les infrastructures de distribution sont dans un délabrement prononcé d’anarchie inextricable qui nous amène à se poser des questions sur le coût final des travaux menés actuellement au réseau de tuyautage qui s’éternisent par rapport aux prévisions. Non seulement les riverains paient l’ampleur de l’impact des nombreuses fuites d’eau émanant des tuyaux perforés, mais ils sont également confrontés à l’état lamentable des rues qui ressemblent de plus en plus à des champs de mines.
Les médias se font régulièrement l’écho du sentiment d’abandon éprouvé par les habitants des régions de l’ouest du pays, qui se traduit notamment par le calvaire de ces milliers de familles contraintes de passer des jours, voire des semaines sans une seule goutte d’eau. Les pénuries du précieux liquide ne datent pas d’hier dans le village de Bambous, mais elles semblent avoir pris des proportions aggravantes depuis plusieurs mois. Le quartier de La Ferme souffre d’une image assez négative liée notamment à un cadre bâti vétuste, aux fléaux liés à la drogue ainsi qu’à une paupérisation qui s’accélère. Comme si cela ne suffisait pas, les habitants disent vivre désormais au rythme des coupures d’eau oscillant entre 16h à 20h par jour… pour les plus chanceux.
Ils ont beau intensifié la pression sur les autorités pour la mise sur pied de mesures probantes qui régleraient la crise de façon pérenne, sauf qu’on est bien loin du compte faute d’avoir su investir de façon judicieuse, rationnelle et en temps utile dans la modernisation, la rénovation et le renforcement des infrastructures de base. Les abonnés lésés ne savent plus à quel saint se vouer. Un peu partout à Bambous, les conduites sont vieillissantes et donc sensibles à la corrosion, aux vibrations et au trafic des poids lourds qui les ont mises dans un état désastreux. Il n’en faut souvent pas plus pour créer des fuites. L’eau s’écoule partout, sauf dans les robinets, au grand dam des habitants qui ont dénoncé le « je-m’en-foutisme » dont font preuve les élus du conseil de district. Sur les réseaux sociaux, un riverain, photo à l’appui, a affirmé avoir dû contacter la hotline de la Central Water Authority (CWA) pour signaler des fuites d’eau conséquentes survenues durant deux semaines sur les canalisations longeant… le bâtiment abritant le conseil de district !
« Koumadir inn larg bomb… »
Certes, l’amorce, l’année dernière, de travaux visant à réaligner et remplacer une partie des conduites d’eau souterraines vétustes semblait témoigner d’une volonté de rectifier le tir de la part des autorités, mais force est de constater que le chantier est à l’arrêt de depuis plusieurs mois, laissant les riverains face à un trou béant et son lot de tuyaux perforés qui favorisent l’émergence de zones boueuses sur les rues rendant difficile la circulation des véhicules. « Nous avions repris espoir en constatant que des travaux de pose de nouveaux conduits avaient démarré. On a vite déchanté compte tenu du calvaire enduré depuis plusieurs semaines. Ce sont les habitants de cité La Ferme qui en pâtissent le plus, d’autant que les rares camions-citernes qui sillonnent le village quotidiennement refusent de faire le détour là-bas », confie Ramon, qui nous montre d’un geste dépité les récipients vides entassés sous son lavabo.
En sus du manque chronique d’eau, les riverains doivent désormais chausser de bonnes bottes pour sortir de leurs demeures ! S’ajoute à cela le fléau des nids-de-poule. Quand il pleut, cela devient un véritable parcours du combattant pour les usagers. « Contrairement à d’autres villages de l’île où les automobilistes peuvent profiter de belles routes asphaltées, kot nou koumadir inn larg bomb inpe partou. Pa kapav konte komie fwa loto inn tas dan trou parti kot mo reste », s’insurge un habitant de la rue Allée Tamarin. Dernière illustration en date : un chauffeur a crevé une roue de son van, jeudi, après s’être fait piéger par un trou dans la chaussée alors qu’il pleuvait des cordes. Il a pu compter sur le soutien des résidents de la localité pour extirper son véhicule. Les mécaniciens du village feraient de bonnes affaires grâce aux crevasses qui parsèment les rues n’ayant pas fait l’objet de rapiéçage depuis des lustres.
Pompe à eau dérobée
à deux reprises
Il convient de replacer les difficultés rencontrées par les riverains dans une perspective plus large. Cette léthargie se présente en effet sous d’autres aspects. Nombreux sont les riverains qui s’interrogent sur la destinée des sommes colossales décaissées dans les projets censés rendre meilleur le système de drains qui n’ont pas la capacité suffisante pour contenir le flot conséquent d’eau émanant des pluies diluviennes. Face à la menace Gamane, cela couplé au phénomène du changement climatique, augmentant la fréquence et l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes, les riverains disent vivre en permanence dans la crainte des nouvelles catastrophes comme cela a pu être le cas en décembre 2023 et en janvier avec le passage de la tempête Belal.
Dans un autre ordre d’idées, la hausse exponentielle des cas de cambriolage, de trafic de drogue et d’effractions demeure une source de préoccupation à laquelle les autorités ont bien du mal à trouver des solutions. Ces délits font régner colère et psychose générale parmi les habitants qui pointent du doigt un réseau bien rodé de marchands de ferraille et de toxicomanes qui font irruption dans les cours pour faire main basse sur tout ce qu’ils trouvent. Des malfaiteurs qui prennent pour cible les biens publics, à l’instar de la salle polyvalente du multicomplexe de Bambous où la pompe à eau a été dérobée à deux reprises l’année dernière récemment. Combien de temps encore devra-t-on s’armer de patience et faire face à cette longue traversée du désert ? Rien ne semble enrayer ce marasme pour l’instant.
Les réservoirs affichent bonne mine (93,1%)
Des grosses averses, occasionnées la présence de la tempête Gamane dans l’océan Indien, sont attendues durant les prochaines 24h, à en croire la station météorologique de Vacoas. Reste à savoir si elles seront bénéfiques aux sept réservoirs de l’île qui affichent actuellement un taux global de remplissage très satisfaisant de 93,1%, selon les dernières estimations de la Water Resources Unit. À pareille époque l’année dernière, le bilan était de 88,2%. La Nicolière est le seul réservoir à afficher un taux de 100%, comme en 2023 à pareille époque. Mare-aux-Vacoas présente actuellement un taux de remplissage de 99,4% contre 85,2% le 20 mars 2023. Ledit réservoir devrait normalement atteindre les 100% dans les jours à venir si les prédictions de la météo se concrétisent, au même titre que Piton du Milieu (99%), Mare Longue (99%), Midlands Dam (99,1%) et le Bagatelle Dam (99,9%). La situation est beaucoup moins reluisante en ce qu’il s’agit de La Ferme qui n’a pas encore atteint la barre des 50%.