L’allocation de Rs 1 000 par mois par élève aux collèges privés, sous le Per Capita Grant, est l’une des mesures annoncées par le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, dans son dernier budget. Il s’agit en fait de la réintroduction de cet item qui avait disparu sous la New Comprehensive Grant Formula 2020-2023. La Federation of Managers (FOM) des collèges privés est satisfaite de cette évolution, mais fait ressortir que le problème restera entier si la Private Secondary Education Authority (PSEA) continue à déduire des sommes importantes des Variable Grants.
Depuis 2020, avec la présentation d’une nouvelle formule de financement dans le cadre de l’éducation gratuite, les responsables des collèges privés dénoncent la mainmise de la PSEA sur leurs opérations et les déductions conséquentes dans leurs budgets. La réintroduction du Per Capita Grant est ainsi bien accueillie par la FOM. D’après cette formule, l’État versera une allocation de Rs 1 000 par élève par mois à chaque collège privé subventionné. Actuellement, ces établissements ont une compensation sous l’Annual Rent Value, entre Rs 325 000 et Rs 750 000, pour l’utilisation des infrastructures et un Variable Grant pour les opérations.
Ramdass Ellayah, président de la FOM, déclare « nous accueillons favorablement l’application du Per Capita Grant aux collèges privés. Cette allocation de Rs 1 000 par élève viendra rectifier une anomalie sur la formule de Grant. Toutefois, nous attendons d’avoir les détails sur le mécanisme qui sera appliqué pour le paiement de cette allocation. » Il ajoute que la priorité demeure la qualité de l’éducation offerte aux enfants : « avec les restrictions financières de la PSEA, cela devient de plus en plus difficile. »
Par ailleurs, précise la FOM, si le gouvernement propose une mesure pour avancer à travers le Per Capita Grant et que de l’autre côté, la PSEA continue de déduire des sommes conséquentes du Variable Grant, le problème restera entier. « L’on ne sait encore où le Per Capita Grant sera ajouté dans la New Comprehensive Grant Formula. Si c’est sous le Variable Grant, ce sera un retour à la case départ. On continuera à vivre sous les caprices du directeur de la PSEA avec des circulaires de discorde, des coupures arbitraires, des décisions unilatérales. Cela, sous prétexte que ce type de dépense n’est pas inclus dans la liste des dépenses remboursables », soutient cette fédération.
Par ailleurs, s’appesantit Ramdass Ellayah, les autres problèmes concernant l’opération des collèges privés et « mettant en péril la qualité de l’éducation », restent inchangés : « Le manque d’enseignants en raison des contraintes liées à l’exigence de détenir le PGCE est préoccupant. Un jeune qui quitte l’université avec son diplôme aujourd’hui est obligé de suivre une formation de deux ans au MIE avant de pouvoir postuler comme enseignant. Cela décourage les jeunes à faire ce métier. » Ramdass Ellayah cite encore le manque de psychologues et l’absence de Discipline Masters.
La FOM met en exergue que les enfants fréquentant les collèges privés subventionnés ont les mêmes droits que ceux se rendant dans autres institutions. Or, les contraintes financières représentent un challenge. « Nous sommes actuellement en train de puiser dans nos réserves pour continuer à avancer. Même la PTA contribue pour assurer la bonne continuité de nos collèges privés. Nous avons à coeur l’intérêt de nos enfants », déclare Ramdass Ellayah, qui ajoute : « nous devons surtout avoir une attention particulière pour ceux qui vivent dans des conditions difficiles. Mais avec le nouveau système mis en place, nous sommes limités. »
Transparence et démocratie
Les managers se disent tout à fait conscients que la PSEA, en tant qu’autorité régulatrice, doit s’assurer que l’argent soit judicieusement utilisé et que les dépenses réclamées soient justifiées. « Cependant, nous sommes dans une démocratie, où nous devons avoir une approche adaptée à nos élèves. Nous ne pouvons aller vers une école unique. Rappelons que depuis l’avènement de l’éducation gratuite, les collèges privés ont joué un rôle essentiel pour que tous les enfants mauriciens puissent avoir accès à cette éducation », laissent entendre les principaux concernés.
La FOM indique également que les collèges privés ont produit plusieurs lauréats, ministres, historiens, hommes d’affaires et tant d’autres personnalités. À ce jour, les 80 collèges privés accueillent environ 50 000 élèves. « Où iront tous ces élèves si les collèges doivent fermer demain, en raison des décisions de la PSEA ? Leur avenir sera chamboulé. »
La fédération plaide pour un travail d’équipe avec les ministères de l’Éducation, des Finances. « Ce système était déjà en place auparavant et c’était connu comme le Technical Working Group. C’était un conseil qui siégeait tous les trois ans. On travaillait ensemble sur une formule de financement, à la satisfaction de toutes les parties prenantes. Il existe une solution pour chaque problème, il suffit qu’il y ait une réelle volonté de faire avancer les choses. »
Réagissant à une déclaration du directeur de la PSEA, Shiv Luchoomun dans la presse récemment et selon laquelle l’autorité doit « veiller que l’argent des contribuables soit utilisé judicieusement et en toute transparence », la FOM se dit d’accord sur le principe. « Toutefois, que la PSEA ne vienne pas nous dicter comment et sur quoi dépenser l’argent qu’on nous donne. Nous adhérons au principe de transparence, mais la nouvelle formule nous asphyxie et nous empêche d’exister. »
Pour un bon partenariat, précise Ramdass Ellayah, il faut que tout le monde — collèges privés et collèges d’État – ait les mêmes chances. « Il est impératif que la PSEA n’abuse pas de son statut de régulateur pour désavantager les élèves des collèges privés. En tant que président de la FOM, mon objectif est de mettre toute mon énergie pour faire avancer la qualité de l’éducation et pour rétablir la sérénité dans le secteur. Cela implique de rétablir le dialogue régulier et constructif, entre les partenaires » , précise-t-il.
Les consultations avec les leaders politiques se poursuivent
Après Xavier-Luc Duval et Paul Bérenger la semaine dernière, la FOM a rencontré cette semaine Nando Bodha et Roshi Bhadain. Les difficultés rencontrées par les collèges privés ont ainsi été exposées, dont les contraintes financières ainsi que les difficultés liées au recrutement des enseignants en raison de l’obligation de détenir un PGCE.
Dans un communiqué émis suite à ces rencontres, il est indiqué que Nando Bodha, en sa qualité de parlementaire, soulèvera toute la question à l’Assemblée nationale. Il a également fait part de ses inquiétudes par rapport à l’Extended Programme et au nombre d’échecs généré par ce système.
Quant à Roshi Bhadain, il a pris l’engagement au nom de son parti de revoir la PSEA Act au cas où il arriverait au pouvoir. Il a tout de même donné son avis légal sur ce dossier et proposé son aide dans toute démarche de la FOM.
Ramdass Ellayah, président de la FOM, fait état de satisfaction de ces rencontres, tout comme celles avec d’autres leaders, précédemment. « Notre but est non seulement de soulever le problème des Grants, mais surtout la question de l’éducation dans le développement du pays. Les leaders ont émis le souhait d’avoir d’autres rencontres pour reprendre des problèmes de fond dans l’éducation. »
De son côté, le Dr Jimmy Harmon, directeur adjoint du Service diocésain de l’éducation catholique (SeDEC) et membre coopté de la FOM, avance : « dans toute crise il y a du positif, ces rencontres nous permettent de faire ressortir aux leaders politiques à quel point la politique éducative doit avoir une cohérence qui va au-delà du gouvernement du jour. Le dialogue constant est aussi un point très important que nous évoquons. Mais l’urgence, c’est de désamorcer cette crise entre la PSEA et nos collèges. Cela ne pourra pas se faire avec l’actuel directeur, mais avec un médiateur indépendant. »
La FOM compte également solliciter une rencontre avec le Premier ministre, Pravind Jugnauth, leader du MSM.