Retour sur investissement

On vient de le découvrir : le véritable objectif des États-Unis dans la guerre entre la Russie et l’Ukraine n’était ni diplomatique ni un combat pour la démocratie, les droits de l’Homme et la protection d’un État indépendant contre un envahisseur, encore moins la paix dans le monde. Non ! L’engagement des États-Unis dans la guerre entre Moscou et Kiev au départ suivies des récentes menaces de se retirer du conflit n’était qu’un moyen de forcer l’Ukraine à signer un accord leur garantissant l’exploitation des terres rares. Pour parvenir à cet accord, les États-Unis dirigés par Joe Biden puis par Donald Trump ont laissé la Russie bombarder et détruire des villes, des villages et une grande partie du territoire ukrainien en tuant des centaines de civils et en blessant des dizaines de milliers d’autres, dont des femmes et des enfants. Le coût de la reconstruction de l’Ukraine est estimé par les Américains à quelque $ 500 milliards. Il va sans dire que les grosses entreprises de construction américaines se tailleront la part du lion dans le marché de la reconstruction à venir. Tout comme certains amis entrepreneurs de Donald Trump se sont déjà positionnés pour faire de Gaza, transformé en champ de ruines par l’armée israélienne, utilisant des armes fournies par… les États-Unis, en Riviera du Moyen-Orient ! Comme on disait autrefois à Maurice dans le cadre d’une célèbre affaire de vente de clinique : « Zot mem vande, zot mem aste ! »
Il faut reconnaître à Donald Trump une forme de franchise dans son cynisme quand il déclare que l’aide accordée par les États-Unis à l’Ukraine n’était en fait qu’une opération, qu’une transaction commerciale. Il a d’ailleurs utilisé un terme précis pour en décrire le résultat de la signature de l’accord entre Washington et Kiev sur l’exploitation des terres rares du sous-sol ukrainien : un retour sur investissement. L’investissement c’était les plus de $ 200 milliards d’aide américaine, dont environ 70 milliards ont été payés à l’industrie américaine pour les armes — livrées au compte-gouttes et avec embargo sur certains modèles qui ont permis aux Ukrainiens de contenir les Russes. Pas de les vaincre. En ce faisant, les États-Unis n’ont fait qu’appliquer une des règles de la coopération internationale qui consiste à dire aux pays non développés — on n’ose plus par pudeur employer le terme tiers monde — : Nous allons vous aider à sortir du sous-développement — en mettant à disposition une aide financière. À une condition toutefois : que les experts et les instruments dont vous aurez besoin, vous aurez à les acheter avec nous. C’est une forme de cette coopération qui vient d’être utilisée avec — certains diraient carrément contre — l’Ukraine. D’autres plus cyniques encore pourraient se demander si l’invasion de certaines parties du territoire ukrainien par la Russie, qui a mené à la guerre, n’a pas été sinon planifié avec les Russes tout au moins fait avec l’accord tacite des États-Unis. En tout cas, c’est ce conflit qui a fini par obliger le président ukrainien à ratifier l’accord qui lui a été imposé et qui permet à Donald Trump de clamer que c’est une grande victoire pour les États-Unis. Il a raison : l’accord qui lui a été imposé n’est certainement pas une victoire pour l’Ukraine. D’autant qu’il n’est pas dit que le cessez-le-feu va automatiquement limiter les prétentions de Vladimir Poutine de reprendre possession de l’ensemble de l’Ukraine, qu’il considère comme faisant partie de la Russie.
Finalement, et malgré tous les discours appelant au respect de la démocratie et des droits humains dans les instances internationales, la seule règle qui compte aujourd’hui est celle de la force. Quoi que l’on dise et que l’on fasse, le pot de fer triomphera du pot de terre. Surtout si les pays qui se disent grands et démocratiques laissent cette règle s’appliquer comme ils ont laissé faire hier à Gaza, aujourd’hui en Ukraine. Et demain ?
Jean-Claude Antoine

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