L’île Maurice se retrouve à la croisée des chemins dans son combat contre la drogue, plus particulièrement face à ce monstre à plusieurs têtes qu’est le “simik”. Un mal qui détruit malheureusement tout sur son passage — jeunes et familles — au point d’entraîner la mort dans des circonstances tragiques ! La situation est très grave et sans une réelle volonté citoyenne et politique surtout, ce combat est perdu d’avance.
Au moins, dira-t-on, tous ceux concernés par ce fléau font, dans la pratique, cause commune pour limiter la casse. Deven Nagalingum avait, au lendemain même de sa nomination comme ministre de la Jeunesse et des Sports, fait de ce combat l’une de ses priorités. Qui ne se souvient pas de cette fameuse déclaration appelant les jeunes à lancer un javelot au lieu de se servir d’une seringue ?
Sauf qu’un incident, que nous considérons de grave, est venu nuire à ce discours fédérateur à l’heure des Jeux inter-collèges, justement relancés pour conscientiser les jeunes sur les bienfaits du sport. Alors qu’il n’y pas longtemps, Deven Nagalingum et son collègue à l’Éducation, Mahend Gungapersad, en avaient fait l’apologie, avec raison d’ailleurs.
Malheureusement, des éléments obscures, voire des incompétents, sont venus pourrir l’ambiance lundi dernier. La raison ? Cette choquante et humiliante décision d’un officier du ministère de l’Éducation de réclamer aux filles du Collège Lorette de Quatre-Bornes (LCQB) de rendre leurs médailles de championnes dans les trois catégories en tennis de table comptant pour les épreuves de sélection de la zone 4 ! Qui plus est, a-t-il fait comprendre, LCQB ne disputera pas les finales de juillet prochain.
À la base de la polémique, selon ce même officier, le LCQB a été disqualifié parce que ce collège ne s’est pas inscrit dans le délai voulu ! Pourquoi avoir alors attendu la fin de la compétition, qui plus est aussi, après la cérémonie de remise de médailles, pour adopter une attitude aussi ignoble que dégradante ? N’est-ce pas là une méchanceté qui n’a pas d’égale à l’égard de cette même jeunesse malheureusement en proie aux divers fléaux ?
Le pire, dans l’histoire, c’est qu’on avance avoir laissé participer le LCQB « pour des raisons humanitaires » ! Alors que pourtant, joueuses et professeurs avaient fait preuve d’un fair play exemplaire en acceptant d’attendre leur unique adversaire dans ce tournoi, le Dr Maurice Curé State College, arrivé bien après l’heure fixée. N’est-ce pas cela la beauté du sport ? N’est-ce pas là une leçon de vie, de bon sens, contrairement à cette décision tordue de réclamer le retour des médailles ?
La balle est déjà partie, et à ceux que cela concerne d’assumer pleinement leurs responsabilités après cette dégoûtante décision. Qu’est-ce justement la valeur financière de ces médailles à l’échelle des nombreuses difficultés auxquelles font face nos institutions scolaires depuis des années ?
En revanche, cette même médaille, sur un plan purement sportif, voire humain, prend tout son sens. Demandez d’ailleurs à n’importe quel sportif le goût d’une première médaille remportée à l’heure de la sports day ou des Jeux inter-collèges et vous verrez à quel point brille son regard. Venir maintenant la réclamer découle, ni plus ni moins, d’une bassesse inimaginable et de l’incompétence du ministère de l’Éducation.
A-t-on au moins pris la peine de réfléchir un seul instant aux conséquences psychologiques que cela pourrait entraîner sur le comportement de ces adolescentes ? Ce qui est certain, c’est que la démarche risque fortement de décourager plus d’un à pratiquer du sport au collège et à participer ensuite aux compétitions.
Le LCQB n’a donc pas restitué les médailles et attend toujours une lettre officielle avant de prendre une décision finale suite à cette injustice flagrante, voire discriminatoire. Car, on ne peut, d’un côté, demander aux adolescents de ne pas se servir d’une seringue et de l’autre, lui enlever délibérément sa raquette ! Qu’en pense justement le ministre Nagalingum à ce sujet ?
Même si le mal est déjà fait, on dira qu’il n’est pas trop tard pour corriger ses erreurs. Faut-il cependant savoir les reconnaître en tant qu’adulte et décideur afin d’inspirer cette même jeunesse appelée à devenir responsable. Dans ce contexte, une mise au point de la part de ceux qui ont “fane” s’impose, afin de rendre à ces jeunes filles et au LCQB ce qui leur revient de droit: leur dignité de championnes et ce droit de disputer les finales. Ce n’est qu’alors que ces Jeux inter-collèges retrouveront leurs vraies valeurs d’antan où primaient, non seulement l’ambiance, mais aussi le dépassement de soi, tout cela dans un esprit de camaraderie et de fair play !
Jean-Michel Chelvan