L’Attorney General fustige l’absence de l’opposition au sein de l’hémicycle pour l’adoption de ce texte de loi portant sur le renforcement de l’État-providence
L’Attorney General, Gavin Glover, qui a présenté, mardi, le Legal Aid and Legal Assistance Bill au Parlement, n’a pas manqué de dénoncer l’absence des parlementaires de l’opposition à ces débats. Lors du summing-up, il a laissé entendre que c’est probablement l’un des plus importants projets de loi qu’il ait présentés jusqu’ici, même si cette démarche n’a aucune raison électorale.
« Au fil des décennies, la justice de ce pays a acquis une réputation de qualité et d’intégrité. Malheureusement, celle-ci est accompagnée de l’idée que ce système ne fonctionne bien que si l’on peut attendre et payer », a fait remarquer l’Attorney General. Le projet de loi débattu et adopté aborde une question fondamentale : la justice est-elle encore au service du plus grand nombre ou de plus en plus réservée à une minorité ?
« Il nous incite à réfléchir à ce que signifie l’idée que nous sommes tous égaux devant la loi. La législation que nous proposons de remplacer date de 1973. C’était une époque différente, une société différente, et 50 ans plus tard, nos tribunaux se sont modernisés. Notre population a augmenté et notre économie a évolué. Le cadre de l’aide légale a peu évolué. L’objectif de ce projet de loi est de garantir que les personnes qui n’ont pas les moyens de se faire représenter par un homme de loi ne soient pas laissées sans recours, que ce soit devant le tribunal, au poste de police, dans le cadre d’un litige civil ou d’une procédure pénale », a affirmé Gavin Glover.
Il a poursuivi en indiquant que l’État devrait intervenir pour garantir l’accès à une représentation légale aux personnes réellement dans le besoin. « Ce projet de loi, d’une part, relève le seuil d’éligibilité à l’aide légale pour les revenus et les actifs, reflétant ainsi les réalités économiques du jour, et, d’autre part, élargit le champ des infractions pour lesquelles cette aide et cette assistance peuvent être accordées. Il impose aussi aux tribunaux et aux policiers l’obligation d’informer les personnes de leurs droits à ce titre. Il simplifie également le processus pour une application unifiée du système. Il fournit également, pour la première fois, une définition complète du patrimoine », rassure-t-il dans son exposé liminaire.
« En vertu de la loi actuelle, un adulte touchant plus de Rs 15 000 par mois est généralement exclu de cette option. Pour toute assistance légale lors d’une enquête policière, le plafond est encore plus bas, soit Rs 10 000 », a fait remarquer l’Attorney General. Ces chiffres n’ont pas été révisés depuis 2018. Pourtant, au cours de la même période, le salaire minimum est passé de Rs 9 000 à Rs 17 000. « Une personne touchant le salaire minimum aujourd’hui est trop pauvre pour payer un avocat, mais considérée comme trop riche pour avoir droit à l’aide juridictionnelle », a-t-il fait remarquer.
Ce projet de loi fixe un nouveau seuil de revenus, soit Rs 25 000 par mois. Par exemple, un couple peut gagner Rs 30 000 chacun, mais il peut avoir des dépenses telles qu’un prêt immobilier, des factures de services publics, etc. De ce fait, le montant des dépenses sera déduit afin qu’il tombe sous le seuil fixé pour se qualifier au titre de l’assistance légale. « Il s’agit d’un renforcement de l’État-providence. C’est un prix acceptable à payer pour une justice équitable. Nous privilégions la générosité, c’est pourquoi il n’existe aucune liste des dépenses autorisées », a-t-il indiqué.
Les revenus des époux ne seront pas pris en compte en cas de divorce ou de séparation. La valeur maximale des actifs éligibles passera de Rs 500 000 à Rs 1 million. Ce texte de loi prévoit également une définition plus élaborée des actifs, non seulement les espèces et les dépôts bancaires, mais aussi les investissements, les actions d’institutions non bancaires, les obligations, les participations dans des entreprises, etc., que ce soit à Maurice ou à l’étranger.
« L’opposition n’a même pas jugé opportun d’intervenir sur ce texte législatif très important. L’élargissement de l’aide légale n’a aucune raison électorale, ce qui explique probablement pourquoi le gouvernement précédent, si désireux d’imprimer de la monnaie, n’a rien fait pour modifier le seuil d’aide juridictionnelle », s’étonne-t-il.