Reward money : l’argent qui corrompt



Tous ceux qui suivent de près l’enquête de la Financial Crimes Commission retiennent actuellement leur souffle. Qu’est-ce qui sortira encore de cette boîte de Pandore ? Les montants des sommes transitant par ce canal font suffoquer plus d’un. Ainsi, on parle d’un versement de Rs 250 millions aux personnels policiers depuis plusieurs années sans justification et sans audit indépendant. Entre septembre et octobre 2024, Rs 50 millions auraient été distribuées : Rs 11 M en septembre et Rs 38,9 M en octobre. Il paraît qu’entre 2016 et 2022 des dizaines de millions de roupies de l’État auraient été distribuées sans qu’on sache qui les a réellement reçues et sur quelles bases.
Le reward money, initialement prévu comme incitation légitime dans les enquêtes pénales, est au cœur d’un scandale concernant l’argent public. Si on comprend bien, tous les moyens déployés pour traquer les trafiquants de drogue et combattre le trafic de drogue qui enrichissent les gros trafiquants ont été convertis en une poule aux œufs d’or pour ceux chargés d’éliminer ce fléau qui anéantit la jeunesse mauricienne dans tous les milieux et dans toutes les communautés. On constate de visu à quel point l’argent corrompt.
L’ancien Premier ministre avait affirmé à l’époque que la drogue avait pénétré toutes les institutions.  Comment pouvait-on savoir qu’une des institutions qui tombent directement sous la responsabilité du PMO avait pu avoir été touchée à ce point ? Au  journal Le Mauricien, on n’oublie pas la tentative avortée d’installer de la drogue dans nos locaux.  L’enquête n’a jamais donné aucun résultat. À tort ou à raison, on ne peut pas s’empêcher de penser que certaines personnes touchaient du reward money à travers des trafics qu’elles organisaient elles-mêmes en piégeant leurs victimes.
Les Mauriciens attendent beaucoup de cette enquête qui, nous l’espérons, pourra enfin nettoyer les écuries d’Augias. Le gouvernement a promis une politique de zéro tolérance face à la corruption ou le trafic de drogue. Nous comptons sur les backbenchers de l’opposition, et surtout sur l’Agence nationale de la lutte contre la drogue, pour maintenir la pression jusqu’à ce que toute la vérité éclate et que tous les responsables soient sanctionnés.
Saluons l’initiative du diocèse de Port-Louis, qui a consacré la semaine écoulée aux détenus dans le cadre de l’année jubilaire. L’évêque de Port-Louis, Mgr Michael Durhône a, à cette occasion, mis l’accent sur l’inclusion, la réhabilitation et la réinsertion. Dans son message à l’occasion du lancement de cette semaine, il a souligné que 2 877 personnes sont actuellement incarcérées, dont 52% sont dans la tranche d’âge entre 18 et 30 ans. Il a mis le doigt sur le drame qui affecte notre société en indiquant que 95% des jeunes détenus le sont en lien avec des affaires de drogue. « Ce sont nos enfants. Ils ont besoin d’un chemin d’espérance », a-t-il lancé avec force.
Le monde carcéral est revenu avec force dans l’actualité avec la tentative de mutinerie survenue à la prison de Melrose qui a permis de jeter un éclairage sur la situation prévalant dans institutions carcérales. La Commission des droits de l’homme, nouvellement reconstituée, comme l’a annoncé Navin Ramgoolam, au Parlement, sera chargée d’examiner en détail les causes des troubles à l’intérieur de la prison et la manière dont ces troubles ont été gérés par les autorités pénitentiaires ainsi que les mesures qui peuvent être prises pour les éviter. Heureusement que les caméras installées à la prison fonctionnaient et à vendredi, les membres de la Commission avaient déjà examiné 50% des enregistrements. Le rapport est attendu avec impatience.
Finalement, avec la présentation du Finance Bill par le Premier ministre vendredi, le gouvernement entre de plain-pied dans la mise en œuvre des mesures budgétaires. Ces mesures n’ont pas manqué de créer des secousses, notamment en ce qui concerne la réforme de la pension de vieillesse. Le pays passe donc à une nouvelle étape. Tout en reconnaissant les efforts faits par le nouveau gouvernement pour remettre le pays sur les rails, il faut reconnaître que cela ne se passe pas sans douleur dans la population. Elle est vulnérable face aux prophètes de malheur. Elle s’attend désormais à ce que ceux en qui elle a placé sa confiance transcendent les barrières protocolaires et de sécurité pour être à leurs côtés et souffrent avec eux. Le succès du développement économique en dépend.

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