Les déboires techniques d’Air Mauritius continuent à dominer l’actualité. La situation a atteint un point où les voyageurs mauriciens commencent à hésiter à voyager à bord des appareils de la compagnie aérienne nationale, surtout s’ils ont un agenda chargé et des responsabilités importantes à respecter. Les pannes techniques se succèdent. Les avions sont cloués au sol de manière impromptue et les passagers sont bloqués non seulement en partance de Maurice mais également à Rodrigues, à l’île de La Réunion, Mumbai et actuellement à Kuala Lumpur. La compagnie nationale n’arrive pas à prendre son envol. Il est injuste de blâmer les membres de l’équipe de communication car ils ne sont ni les décideurs administratifs ni techniques. D’aucuns sont d’avis que ce sont les résultats d’un modèle obsolète, d’une gouvernance politisée et d’un manque de vision stratégique à long terme qui remontent à la période d’avant la pandémie de Covid.
Déjà avant le Covid en 2019, la compagnie annonçait des pertes de plus d’un milliard de roupies. La situation a empiré avec le Covid. Avec la suspension des vols, les revenus ont chuté à zéro alors que les coûts fixes devaient être respectés. Souvenons-nous que la compagnie a été mise sous administration volontaire afin d’éviter un dépôt de bilan. Malheureusement, la nouvelle administration qui avait pris le relais à l’époque a opéré dans l’opacité. Des appareils ont été vendus pour ensuite être loués à prix fort. À cela s’ajoutaient une absence de coordination et une confusion des rôles marquée par des tensions entre les responsables. On se souvient du conflit larvé entre l’ancien et le nouveau directeur d’Air Mauritius.
La nouvelle administration paie le prix fort la mauvaise gestion du passé. Elle peine à reprendre le contrôle de la compagnie en attendant l’arrivée du nouveau directeur, André Viljoen, le 15 octobre prochain. Air Mauritius fut un temps plus qu’une compagnie aérienne car elle était le symbole d’une île ouverte sur le monde, d’un rêve d’indépendance économique et de rayonnement régional. Aujourd’hui, ce rêve s’effondre dans un vacarme de moteurs en panne, de passagers abandonnés et de milliards envolés.
La prise de parole du Premier ministre adjoint Paul Bérenger, jeudi, n’est pas passée inaperçue. « Ce qui se passe à Air Mauritius n’est pas bon du tout », lance-t-il. Invité par Le Mauricien à dire s’il n’est pas temps de présider un comité ministériel sur la compagnie aérienne nationale, il répond que si le Premier ministre le lui demande, il le fera. « Toutefois, on ne peut pas tout mettre sur le dos des comités ministériels. Dans le cas d’Air Mauritius, il y a des décisions sérieuses à prendre. J’ai déjà donné mon opinion au Premier ministre sur ce qui peut être fait pour Air Mauritius. Il n’est pas trop tard, mais il est déjà bien tard », a-t-il lancé.
Ce qui se passe pour le moment est mauvais pour l’image d’Air Mauritius, l’image du gouvernement et l’image du pays. On ne peut pas se plaindre de voir Emirates opérer un troisième vol quotidien à destination du pays afin de maintenir le flot des arrivées touristiques. On se demande si, à terme, la solution ne réside pas dans un partenariat stratégique avec une grande compagnie aérienne internationale. Toujours est-il qu’une solution doit être trouvée avant le début de la période de pointe de l’industrie touristique durant la période de fin d’année. Toute perturbation risquerait d’être catastrophique pour l’industrie touristique.
Le conflit entre la ministre Arianne Navarre-Marie et la Junior Minister Anishta Babooram a connu jeudi un dénouement avec le transfert de cette dernière du ministère de l’Égalité des genres à celui du ministère de la Santé. La question qui se pose est : à quoi sert le groupe parlementaire qui se rencontre régulièrement avant les travaux parlementaires pour préparer la séance suivante, mais également pour entendre les problèmes rencontrés par les parlementaires, dont les ministres et Junior Ministers, dans le cadre de leurs fonctions ? Pourquoi avoir choisi de laver le linge sale en public ? Certains pensent que le transfert de la Junior Minister n’est en réalité qu’un avertissement contre toute récidive éventuelle.
Jean Marc Poché