J’ai rêvé de toi

Lundi matin, un coup de téléphone.
“Allô Camille, ça va ? Tu sais pas, toi, j’ai rêvé de toi cette nuit.
— Ah bon ? Tu m’intrigues. De quoi as-tu rêvé ?
— Attends, je te raconte, mais je te préviens, c’est du grand n’importe quoi et cela ne te ressemble pas trop.
J’ai rêvé qu’on était parties en vacances en Grèce et qu’on avait pris un Airbnb avec vue sur mer. Une petite maison à étage, bien cocasse, blanche et bleue, comme sur les photos qu’on voit de ce pays. En arrivant, je suis allée dans toutes les pièces, puis je suis entrée dans une chambre à coucher où tout était blanc. De là, je voyais une piscine d’un bleu incroyable sur le côté. Je t’ai appelée du balcon de la chambre pour que tu viennes voir. Émerveillée, tu t’es penchée pour voir de plus près et, surprise, j’ai constaté que tu étais enceinte. Avec le poids de ton ventre, tu as perdu l’équilibre et tu es tombée dans la piscine. C’était franchement comique !
Alors que tu étais sous l’eau, tu as crié pour me demander si ton mascara était toujours là. Puis, venu de nulle part, un beau Grec est arrivé pour te sauver. Il t’a soulevée d’une main et tu es restée là, figée comme une statue antique, mais en version waterproof. Ne me demande pas ce que ça voulait dire. Et puis, plouf, tu as fondu à cause du soleil !”
À l’écoute de ce rêve farfelu, j’étais morte de rire. Surtout que l’histoire était encore bien “fraîche” dans la tête de mon amie, et qu’elle se rappelait de chaque détail. Mais ce n’était pas fini ! Des scènes toujours plus inimaginables allaient défiler.
Elle ajoute :
“J’étais paniquée parce que tu avais disparu. Je suis vite descendue, et ta maman était maintenant là, comme si c’était sa maison. Détendue, pas inquiète que tu aies fondu comme neige, elle faisait un dessin du ciel au pastel. Elle portait un caftan coloré, avait des écouteurs sur la tête et écoutait de la musique techno. Une artiste un peu perchée, quoi !
Soudain, tu es réapparue avec une nouvelle coupe, un brushing et tu t’étais teint les cheveux en bleu. Trop contente de ton nouveau look, tu m’as dit que ton coiffeur était maintenant une Intelligence Artificielle qui s’appelait Bipbip. Trop bizarre, je te dis Camille !
Et là, a commencé une course folle. Tu m’as traînée de force dans une ruelle pleine d’hibiscus pour qu’on aille fêter ta “renaissance” dans une taverne locale, tenue par un vieux moustachu qui jurait que c’était lui qui avait inventé les bigoudis. Ce “missie moustass”, sorti droit d’une série thriller-policier, avait sans arrêt un écouteur dans l’oreille gauche et un téléphone scotché sur l’oreille droite. Trop contente de cette rencontre intrigante, tu mangeais des pistaches comme si c’étaient des bonbons. Ton bébé, pas content du tout de tes péripéties et de ton insouciance, bougeait sans cesse dans ton ventre.
Ah oui, le sauveteur t’avait laissé son numéro de téléphone sur une feuille de vigne, avec un petit dessin de dauphin et la mention “au cas où tu retombes, Yanis !”
Ensuite, on est retournées dans le Airbnb, mais impossible de retrouver la clé. Tu as dit : “Pas grave, j’appelle Yanis.” Sauf que tu n’arrivais pas à appuyer sur la bonne touche de ton téléphone. Tu composais un numéro, et c’en était un autre qui s’affichait à l’écran. Calmement, tu as ajouté : “T’inquiète, on va demander à Siri* d’ouvrir la porte.” Là, les yeux fixés sur ton téléphone, tu as dit : “Dis Siri, ouvre-nous les portes de notre palace grec.” Et paf, la porte s’est ouverte !
Une fois à l’intérieur, tu as mis un peignoir moelleux blanc, un masque d’algues vertes sur le visage, pendant que moi, je te surveillais pour que tu ne retombes pas dans la piscine. Ta maman et ses attirails d’artiste avaient disparu. Et devine ! J’ai vu Yanis, assis sur le rebord de la piscine. Il regardait ses muscles, trop fier de lui. Là, tu as regardé ton ventre dans le miroir déformant du salon en disant que tu ressemblais à une baleine. Le bébé a eu peur et ça lui a donné le hoquet — trois fois de suite ! — et tu as dit : “Sésame, ouvre-toi !”
Vite, j’ai appelé la clinique la plus proche. D’un coup, on a entendu une sirène : Ding Dong ! Ding Dong ! On s’est retrouvées dans une ambulance qui roulait super vite et tu n’arrêtais pas de rire en disant que c’était comme si tu volais sur le dos de Superman. Une fois au service des urgences, l’infirmière t’a installée sur un lit. Mais, malheur ! Celui-ci ressemblait à une planche de surf. Tu sais quoi Camille ? Tu as attaché tes cheveux — bleus — avec un gant chirurgical — bleu aussi — tu es montée sur la planche en disant que maintenant tu allais surfer. Et là, tu as imité les surfeurs sur les vagues. Et paf, encore ! Ta poche des eaux s’est rompue ! Tu m’as demandé si ton brushing tiendrait pendant l’accouchement. Et… et… je me suis réveillée. Prise d’un fou rire, je t’ai appelée de suite.”
Les rêves ne veulent pas forcément dire quelque chose de précis, mais je me suis quand même demandé quel pouvait être le sens de ces images déjantées.
Est-ce un moyen pour dire qu’on n’arrive à rien si on ne se trempe pas un peu ? Est-ce un appel à vivre l’imprévisible de la vie et à accueillir les surprises et les situations invraisemblables ? Est-ce un rappel que la douceur et la bonne humeur doivent toujours prévaloir ?
Bref, quelles que soient les péripéties, l’important est d’être en bonne compagnie, et, peu importe le chaos, c’est la bonne attitude qui nous permet de retomber sur nos pieds.
En plus, mesdames, si le mascara est waterproof, c’est tout bénef !
*Siri : intelligence artificielle vocale et un assistant virtuel

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