Pour son Beach Cleanup annuel, la Délégation de l’Union européenne à Maurice a axé son action sur la protection des mangroves. Dans ce contexte, une journée de nettoyage a été organisée au Wetland de Pointe-d’Esny, répertorié site Ramsar et abritant l’une des forêts de mangroves les plus importantes de l’île. En 2020, le MV Wakashio s’était échoué non loin du site. Cette opération a été menée avec la collaboration de l’ONG Reef Conservation, qui a développé l’application Mangrove Matters, pour la collecte des données. Cet événement coïncide avec la Journée mondiale du nettoyage de la planète, le 20 septembre.
L’opération de nettoyage a bénéficié de la collaboration de l’ONG Reef Conservation, du National Parks Conservation Service, de la Beach Authority, du conseil de district de Grand-Port et des pêcheurs et jeunes de la localité. Une soixantaine de participants, dont des membres du personnel de l’Union européenne, s’étaient mobilisés pour cette activité. Après une heure, plus de 60 kilos de déchets ont été récupérés et triés sur place. Cette journée de nettoyage a également été l’occasion de faire de la sensibilisation. L’équipe de Reef Conservation a ainsi procédé à des présentations sur la préservation des mangroves, des herbiers marins et des pratiques durables. Les participants ont également eu la possibilité de découvrir l’application mobile Mangrove Matters.
D’après Adiilah Aungraheeta, Research Project Manager du SOS Mangrove Programme, cette application a été développée pour collecter des données sur les mangroves. « Cette application mobile sur Androïd est utilisée pour le Citizen Science Survey. Elle a été développée par Spoon Consulting et Reef Conservation, avec le soutien d’Afrasia et MOL. Après la marée noire du Wakashio, nous nous sommes rendu compte qu’il n’y avait pas assez d’infos pour le monitoring. Nous avons donc décidé de collecter des données et de faire notre propre mapping », dit-elle.
Des Citizen Science Surveys sont ainsi organisés pour montrer aux membres du public comment utiliser l’application, et ainsi aider à la collecte de données. En scannant une plante, l’application est capable de donner les détails sur la variété de mangroves, le type de pollution qui l’affecte, les perturbations humaines, ainsi que les espèces qui vivent dans ses racines. « Les données sont par la suite analysées et les actions nécessaires prises », ajoute Adiilah Aungraheeta.
Après l’épisode du Wakashio, un relevé annuel a été réalisé dans les régions affectées sur la côte Sud-Est. « À certains endroits, nous avons constaté que les hydrocarbures sont toujours présents, surtout quand on fouille. Des déformations de feuilles et de racines ont aussi été relevées. Mais de manière générale, la plupart des plantes ont résisté. Le monitoring devra toutefois se faire sur le long terme pour savoir s’il y a d’autres perturbations liées au Wakashio. »
Lors de la journée de nettoyage, Adiilah Aungraheeta et ses collègues ont profité de l’occasion pour faire de la sensibilisation auprès des participants. « La mangrove est une nursery. Il y a beaucoup de poissons juvéniles qui se réfugient là, dont des espèces commerciales. Si la mangrove est détruite, c’est la chaîne alimentaire qui sera affectée. »
À Maurice, a poursuivi Adiilah Aungraheeta, il y a deux types de mangrove : la Rhizophora mucronata, qui pousse près des côtes et la Bruguiera gymnorrhiza, un peu plus en retrait. « Chez la Rhizophora, les pores sur les feuilles sont plus développés, car la plante doit enlever l’excès de sel pour survivre dans cet environnement. » Ce qui explique également pourquoi les racines de cette plante sortent du sol, comparées au Bruguiera. De même, ses feuilles sont plus grandes et pointues. « Dans cet environnement, il n’y a pas assez d’oxygène. C’est pour cela que les racines sortent du sédiment pour pouvoir respirer et éliminer l’excès de sel. »
Le Youth Sounding Board a aussi apporté sa collaboration à l’événement. Mokshadha Toolsee, EU Youth Ambassador 2022-24, explique : « en tant que jeune, c’est important pour moi d’apporter ma contribution, pour protéger notre environnement », explique-t-elle, tout en saluant l’initiative de l’UE de mettre sur pied le forum des jeunes, afin de leur donner l’opportunité d’apporter leur contribution dans différents secteurs. « Moi, je suis engagée dans le secteur de la pauvreté, mais l’environnement est lié, car le changement climatique impacte les familles vulnérables. » Elle met en avant la possibilité de rencontrer d’autres leaders, à travers cette plateforme, comme cela a été le cas au Youth Climate Summit, tenu au Kenya, en 2022.
Oskar Benedikt : « Une action pour donner l’exemple »
« Le Beach Cleanup est une campagne pour sensibiliser sur le climat et l’état de notre monde. L’Union européenne a organisé 367 événements de ce genre au niveau mondial, l’année dernière, avec plus de 12 000 participants. À Maurice, nous avons mené une action à la plage de Melville, Grand-Gaube. Nous avons collecté presque 300 kg de déchets qui étaient partout sur la plage, dans les mangroves, les buissons…
« Le monde est dans une crise triple. Avec le changement climatique, il fait de plus en plus chaud et le temps devient de plus en plus imprévisible. Il y a des cyclones de plus en plus forts. La biodiversité est menacée, nous perdons de plus en plus de plantes et d’animaux. À Maurice, par exemple, il y a plus de 90% des plantes qui sont en danger. Il y a 115 plantes qui fleurissent et qui sont en danger d’extinction. Cela a des effets sur les abeilles et ainsi de suite.
« La pollution et la dégradation de l’environnement sont un autre défi. En juillet, il y avait l’Overshoot Day. Cela veut dire que nous avons utilisé plus de ressources que le monde est capable de reproduire. Cette journée arrive de plus en plus tôt. Il y a ceux qui estiment qu’en 2050, donc, dans 25 ans, si on ne fait rien, il faudra trois planètes comme la Terre pour satisfaire nos besoins en ressources. Nous ne les avons pas, donc, il faut changer notre façon de faire.
« Malheureusement, c’est très difficile d’avoir un consensus au niveau global. Par exemple, il y avait les négociations pour un traité de plastique, afin d’enrayer la pollution, mais le monde n’a pas pu se mettre d’accord à ce sujet. Nous espérons que cela va venir, que le monde va se rendre compte que nous ne pouvons continuer sur la même voie. Il faut aussi éduquer, apprendre aux gens qu’on ne peut jeter des déchets dans la nature et s’attendre que ça va disparaître tout seul. Mais non, ça ne va pas disparaître.
«Il est estimé que d’ici 2050, il y aura une augmentation de 70% de l’utilisation de minerais, biomasse, Fossil Fuels et de métal. Le monde se développe, on a besoin de plus en plus de ressources, mais cela veut aussi dire plus de pollution, plus de déchets… Donc, il faut vraiment faire quelque chose, privilégier l’économie circulaire. Ce qu’on met dans le circuit, on le reprend.
« Cette action aujourd’hui est pour donner l’exemple. Nous montrons qu’il ne faut pas baisser les bras et faisons la sensibilisation en même temps. »