Rodrigues, le choix du chemin de l’autonomie

À Rodrigues, la principale artère à travers la crête de l’île a pour nom la Route de l’Autonomie, présentée comme le symbole de la persévérance et de l’ardent désir d’émancipation d’un peuple sous tutelle. Cette démarche ne résulte pas du hasard, car n’y a-t-il pas l’expression « choisir de poursuivre sa route malgré les obstacles » ? Hier, dimanche 12 octobre, Rodrigues s’était parée pour célébrer le 23ᵉ anniversaire de l’autonomie. Comme pour marquer le caractère intrinsèque de la République, le choix du Chief Guest à la cérémonie protocolaire s’est fait au plus haut sommet de l’État. Décision nullement contentieuse.

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Mais cette année, indépendamment du choix du 12 octobre pour marquer le Jour de l’Autonomie, constitue une étape majeure dans le processus de décentralisation des affaires politiques et administratives de l’île. Bien avant le déplacement d’une mission de haut niveau du nouveau gouvernement de l’alliance MSM/MMM, issu des élections générales du 21 septembre 2000, menée par feu Sir Anerood Jugnauth, avec à ses côtés un des plus ardents partisans de l’émancipation politique de l’île au sein de la République, en la personne du leader du MMM et également à cette époque Deputy Prime Minister, Paul Bérenger, les Rodriguais, en particulier les acteurs politiques de l’île, en l’occurrence l’Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR) de Serge Clair, pouvaient entretenir le doute quant à tout changement de statut de l’île.

Mais il y a 25 ans, le gouvernement de l’alliance MSM/MMM avait pris la décision de marquer l’histoire politique de la République avec Rodrigues au premier plan. À la lumière d’un déplacement dans l’île à la tête d’une forte délégation officielle, le Premier ministre d’alors, Sir Anerood Jugnauth, avec un engagement sans retour vers la voie de l’autonomie, galvanisait les forces politiques et citoyennes de l’île. Ce sursaut politique était la suite logique de ce que le pape Saint Jean-Paul II avait exhorté les Rodriguais sur leur sol à La Ferme : « Rodrigues, dibout lor to de lipie ».

Cet appel, plus qu’une balise sur la route, que la population de Rodrigues chérit encore si chèrement, remonte au dimanche 15 octobre 1989, soit il y a une génération. Depuis, que de chemin parcouru par Rodrigues, dont le profil sociopolitique et infrastructurel a connu des transformations. Le prochain aéroport régional de Plaine-Corail projettera une autre image de l’île Rodrigues, même si à ce jour le Front Office des liaisons aériennes, avec un déni de considérations envers les passagers, laisse encore à désirer.

Le temps du bilan de ces 23 ans effectifs d’autonomie relève davantage des administrateurs politiques. Par contre, la population de l’île continue d’affronter au quotidien des problèmes d’approvisionnement en eau, facteur si crucial pour l’agriculture ou l’élevage que pour les besoins ménagers, ou encore dans le domaine de la santé. L’éducation, l’ascenseur social par excellence, mérite mieux que ce qui est actuellement au menu du jour.

Pourtant, Rodrigues, libérée de tout carcan, sait faire preuve d’un leadership incontestable. Aujourd’hui, le monde tente de prendre ses distances avec l’envahissement du plastique. Depuis longtemps déjà, Rodrigues a pris les devants en interdisant l’usage du plastique. Le succès de cette politique est incontestable pour un environnement plus vert.

Puisqu’on parle de couleur — et cela sans aucune connotation politique — le vert est la couleur du Mouvement Rodriguais de Nicolas Von Mally. Parlons maintenant du bleu, non pas celui du PMSD, mais celui de l’économie bleue, avec Maurice, qui, suite à la rétrocession des Chagos, dispose d’une des plus vastes superficies océaniques à gérer.

Historiquement, économiquement, culturellement et politiquement, Rodrigues détient un Track Record sans conteste en matière de gestion de la pêche, avec un souci de préservation hors du commun. Le respect des Closed Seasons que ce soit pour le poisson ou les ourites est un signe de maturité des Rodriguais sur le plan de la préservation et de la conservation de l’environnement marin, une richesse sans limites.

À Port-Louis, l’on ne cesse de s’égosiller à chaque forum local, régional et international pour vanter les mérites de l’économie bleue dans le cadre de la diversification de l’économie. Le lien avec le capital d’expérience en matière de gestion et d’exploitation des ressources de la mer, disponible à Port-Mathurin, n’est-il pas suffisamment attrayant pour engager des investissements stratégiques en vue d’assurer ce tremplin — qui ressemble à l’Arlésienne — pour faire de l’économie bleue une réalité dans ce territoire maritime de Maurice, au cœur de l’océan Indien ?

Nul besoin d’avoir une peur bleue pour valoriser l’expérience grandissante d’un plus petit. D’autant plus que l’unanimité semble se dégager : la Rodrigues Regional Assembly pourra difficilement échapper à un toilettage pour tenir compte des nouvelles aspirations exprimées haut et fort depuis quelque temps sur la Route de l’Autonomie…

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