Ce dernier détient également un passeport français
La magistrate Shaheen Daureeawoo a indiqué qu’elle rendra son Ruling demain
La Cour de district de Port-Louis, présidée par la magistrate Shaheen Daureeawoo, a entendu les arguments des hommes de loi, hier, avant de décider s’il faut autoriser l’ancien ministre des Finances, Renganaden Padayachy, à quitter le pays pour une semaine en vue de participer à un séminaire en France. Le fait que ce dernier détient la nationalité française, donc un passeport français, semble refroidir la police mauricienne – qui estime que l’ancien ministre des Finances pourra facilement prendre la fuite si le droit de quitter le territoire mauricien lui était accordé.
Me Raouf Gulbul, l’avocat de Renganaden Padayachy, a présenté une motion ce mardi 21 octobre pour que son client ait l’autorisation de quitter le pays du 26 octobre jusqu’au 11 novembre 2025. Et ce, dans le but de se rendre en France via Dubaï pour participer dans un séminaire de FERDI (Fondation études et recherches de développement international).
L’ancien ministre fait face à un délit de « fraud by abuse of position ». Il est ainsi accusé d’avoir ordonné le décaissement de Rs 45 millions de la MIC en faveur de la société Menlo Park Ltd. Le 15 avril dernier, il avait été remis en liberté conditionnelle, mais selon l’une des conditions imposées par la cour, il lui est interdit de quitter le pays.
L’inspecteur Seebaluck, de l’Anti-Money Laundering Unit (AMLU) du CCID, a ensuite été appelé à la barre des témoins. Ce dernier a expliqué que l’enquête policière a révélé que Renganaden Padayachy, alors ministre des Finances, était personnellement intervenu pour ordonner le décaissement de Rs 45 millions au préjudice de la Mauritius Investment Corporation (MIC) en faveur de la société Menlo Park Ltd.
Selon lui, un ancien gouverneur de la Banque de Maurice, également accusé dans la présente affaire, a déjà consigné une plainte à la police contre l’ex-ministre Padayachy à l’effet que ce dernier aurait exercé une forte pression sur lui pour qu’il décaisse cet argent.
L’inspecteur Seebaluck a indiqué aux questions de l’avocate du Parquet, Me Nalini Senevrayar-Cunden, que l’enquête était en cours. Il a expliqué que l’authenticité de l’invitation de FERDI à Renganaden Padayachy pour participer à un séminaire en France n’avait pas encore été confirmée par la police mauricienne. Après une demande de Mutual Legal Assistance auprès de la France, il a été établi que Renganaden Padayachy possédait deux passeports, l’un émis par la République de Maurice et l’autre par la République de France. Qui plus est, il possède aussi, outre sa nationalité mauricienne, la nationalité française et une carte d’identité française. Si le passeport mauricien a bien été saisi par les autorités mauriciennes, Renganaden Padayachy détient encore son passeport français.
L’inspecteur Seebaluck a ainsi fait état que la police craint que l’accusé puisse ne jamais retourner à Maurice, cela car il pourra voyager librement, sans visa, dans d’autres pays européens, uniquement avec sa carte d’identité française, ou encore, qu’il pourra voyager dans d’autres pays hors de l’Europe avec son passeport français. Ce qui pourrait l’inciter à prendre la fuite, avance la police.
Contre-interrogé par Me Raouf Gulbul, l’inspecteur Seebaluck a indiqué que la police prendra une année pour boucler son enquête et loger l’accusation formelle. Il a toutefois admis que cela pourrait être plus long. Il a aussi mis en exergue que la police fait face à une contestation en Cour suprême pour avoir le Judge’s Order en vue d’accéder à un ordinateur portable saisi dans cette affaire (qui n’appartient pas à Padayachy) et qu’il ne peut pas dire dans combien de temps cette contestation en Cour suprême prendra fin.
Il a confirmé que la femme et la fille de Renganaden Padayachy résident à Maurice. Cette dernière, âgée de 13 ans, est même scolarisée dans une école privée à Maurice.
Renganaden Padayachy a ensuite été appelé à la barre des témoins. Répondant aux questions de Me Gulbul, l’ex-Grand Argentier a indiqué qu’il détenait un doctorat en économie, qu’il agissait comme consultant pour les entreprises mauriciennes, et qu’il possédait deux propriétés à Maurice.
L’ex-ministre des Finances avait été nommé en tant que Senior Fellow de FERDI en février 2025, et avait été invité à participer à un séminaire de cette fondation. D’après lui, il était impératif qu’il se rende en personne à ce séminaire pour rencontrer la direction de FERDI, et cela dans le but de préserver sa nomination comme Senior Fellow. En outre, étant le seul mauricien nommé comme Senior Fellow, il représentait tout le continent africain. Il comptait mettre à profit sa participation dans ce séminaire pour ensuite élaborer des politiques économiques pour Maurice.
D’après l’ex-ministre Padayachy, il ne compte pas fuir la justice mauricienne car il a l’intention de défendre son honneur et celle de sa famille. Il prenait un engagement solennel à rentrer au pays une fois le séminaire terminé et qu’il avait intention de respecter toutes les conditions de la cour.
Contre-interrogé par la représentante du Parquet, il a admis que l’invitation ne lui avait pas été adressée personnellement. Nalini Senevrayar-Cunden avait aussi fait ressortir que cette invitation ne contenait pas de date, à quoi Renganaden Padayachy a répondu qu’il l’avait reçu en février. Me Nalini Senevrayar-Cunden a fait ressortir que Renganaden Padayachy pouvait aussi prendre part à ce séminaire en mode virtuel, et qu’il n’était pas nécessaire pour lui d’aller afficher sa présence physique là-bas. RP a répondu que vu son statut de Senior Fellow, il était impératif qu’il parte là-bas en personne. Il voulait que sa nomination devienne active. Une présence physique pouvait apporter de meilleurs résultats.
Me Gulbul a, dans sa plaidoirie, expliqué que Renganaden Padayachy a des attaches professionnelles et familiales à Maurice. Il a indiqué pour sa part que le risque que l’accusé ne prenne la fuite n’est qu’une appréhension de la police, aucunement étayée par quelque preuve.
Pour sa part, Me Nalini Senevrayar-Cunden a insisté qu’il n’était absolument pas nécessaire pour Renganaden Padayachy de participer à ce séminaire en mode présentiel, et qu’il pouvait le faire virtuellement. La représentante du Parquet s’est aussi appesantie sur le fait que vu sa nationalité française, il ne pouvait être exclu que RP ne mette les voiles.
La magistrate Shaheen Daureeawoo a indiqué qu’elle rendra son Ruling demain.

