Production énergétique : Le salut réside dans la maîtrise de la demande

Alors que l’été est déjà là et que la chaleur commence à se faire sentir, le risque de hausse sensible de la consommation énergétique, notamment à travers la climatisation, est plus que jamais présent. Dans ce contexte, la menace de délestage se présente comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête de tout un chacun.

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C’est dans ce contexte que le leader de l’opposition, Joe Lesjongard, et le président de MARENA, Khalil Elahee, partagent leurs points de vue sur la question. « Il faut aborder la crise comme certains l’appellent avec plus de sérénité. Jusqu’ici, le public dans sa grande majorité a pleinement participé à l’effort citoyen de gérer l’électricité de manière responsable », souligne Khalil Elahee – qui observe « qu’en vérité, il n’y a pas eu de coupure malgré le fait que plusieurs moteurs étaient en panne ».

En fait, le pays est dans une situation délicate parce que plusieurs projets de fermes solaires hybrides, soit avec des batteries, n’ont jamais vu le jour. Les batteries du CEB ont une autonomie de 30 minutes seulement alors que la pointe dure plus longtemps, plus de deux heures. D’autant qu’il y a eu environ 100 000 climatiseurs installés en un an, la plupart ne répondant pas aux normes d’efficacité plus élevées. Si les gens ne savent pas comment utiliser sobrement la clim, la demande peut grimper par au moins 40 MW, uniquement avec les climatiseurs additionnels.

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Des observateurs avertis pensent que la source du problème remonte à 2022 avec le retrait de Terra et la réévaluation à la baisse de la demande par le CEB. D’ailleurs, à partir de cette date, l’Integrated Electricity Plan du CEB arrivait à terme et il fallait prévoir un nouveau plan pour les dix années suivantes. Il faut une approche holistique car tant de Schemes du CEB n’ont pas progressé, notamment ceux des NGO and Religious Bodies, du secteur public et des véhicules électriques, sans mentionner les 20 MW prévus pour les smart cities.

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Prof Khalil Elahee, universitaire et président Mauritius Renewable Energy Agency (MARENA)

« Le risque de délestage est une motivation forte pour faire preuve de solidarité »

Le gouvernement a lancé une vaste campagne en vue d’inviter la population à économiser la consommation de l’énergie électrique. Pouvez-vous nous en parler ?
Dès 2011, lorsque j’étais à la tête de l’Energy Efficiency Management Office (EEMO) à sa fondation, nous avions voulu promouvoir une culture de la gestion de l’énergie. Cela impliquait non seulement les économies d’énergie, mais aussi l’efficacité énergétique. Ce n’est pas la même chose. Dans le premier cas, nous ne consommons pas et dans l’autre il s’agit d’utiliser moins d’énergie pour le même rendement ou la même performance. Aujourd’hui, presque 14 ans plus tard, nous ne sommes pas exactement à la case départ, mais nous avons du retard à rattraper. La menace d’un délestage est une opportunité de développer des réflexes de ce qu’on appelle aujourd’hui la « sobriété énergétique », c’est-à-dire d’éliminer les gaspillages et d’être plus efficace. Le potentiel de faire baisser la demande aux heures de pointe, soit entre 6h et 9h, est bien là et nous l’avons prouvé plusieurs fois cette année avec un engagement extraordinaire du public consommateur.

Vous affirmez qu’« éviter le délestage est possible par la seule discipline citoyenne ». Dans quelle mesure la population a-t-elle réellement pris conscience de cette responsabilité ?
Il y a des conditions. D’abord, la participation citoyenne doit être massive. Ensuite, c’est essentiel que nous soyons conscients de notre capacité à faire la différence si nous agissons ensemble. Une lampe qui n’est pas utilisée aux heures de pointe que chacun éteint dans une maison, cela fait au moins 5 MW déjà ! Même si 50% des familles adoptent ce simple geste, cela peut faire une différence énorme sur le réseau au moment critique. Et si la même attitude responsable s’applique à l’usage des climatiseurs, il y a des dizaines de 10 MW de baisse potentielle. Il faut rappeler aux gens qu’en agissant ainsi c’est aussi moins de dépenses pour eux-mêmes et également moins de pollution locale et globale. Il faut aussi que les entreprises publiques et privées s’engagent dans cette même démarche. Certes, certains ne s’en soucieront pas, mais si les gros consommateurs font preuve d’intelligence finalement, ils pourront réduire leurs consommations et leurs factures. Le risque de délestage est une motivation forte pour faire preuve de solidarité. Si nous agissons ensemble, alors le délestage ne viendra pas.

 

Quelle réduction concrète du pic de consommation peut-on espérer si chaque foyer applique les gestes de sobriété que vous recommandez ?
Les estimations que nous avons faites montrent que les baisses sont plus significatives évidemment quand il y a une demande élevée. Ainsi, le potentiel de réduction peut atteindre entre 15 et 25 MW lorsque nous aurons vraiment besoin de l’engagement de tout le monde afin de faire face à un pic record, comme c’était le cas en février 2025. Mais il n’y a pas que la maitrise de la demande, car nous avons aussi prévu un « load sharing » par exemple avec les hôtels mais aussi d’autres entreprises comme les grandes surfaces mettant en marche leurs générateurs dans un cas extrême. Cela se fera sur requête spécifique du CEB au cas par cas et pour une durée limitée. Ces deux stratégies ensemble durant l’alerte « rouge » doivent pour épargner un délestage. Bien sûr, si les vieilles machines tombent en panne sans avertir au même moment, il faudra davantage faire appel au « load sharing ». Les panneaux solaires avec des batteries pourront aussi apporter une réduction sur la demande aux heures de pointe.

Quels sont les secteurs privés qui se distinguent positivement en matière de gestion énergétique ou d’investissement dans le solaire ?
Il y a comme partout des bons et des mauvais élèves. Certains hôtels et grandes surfaces se distinguent par l’introduction de systèmes dits « Building Energy Management Systems » qui permettent d’optimiser la consommation en temps réel, y compris en intégrant des renouvelables comme le solaire. Il y a des entreprises qui appliquent aussi les normes ISO 50 001 sur le management de l’énergie. Cependant, il y a aussi ceux qui font du « green-washing », y compris parmi certaines compagnies qui font des profits faramineux, sans les mentionner ici. Aujourd’hui, il y a une mode qui fait que c’est bien d’être écolo et certains abusent là-dessus en projetant une image qui est différente de la réalité si nous calculons par exemple leurs bilans carbones ou les investissements dans les énergies fossiles qu’ils financent. Par rapport au solaire, il y a aussi quelques arnaqueurs qui sévissent, surtout sur les réseaux sociaux car beaucoup de gens s’intéressent aux panneaux solaires et ne savent pas trop où aller. À la MARENA, nous avons reçu des plaintes dans ce sens et nous travaillons sur les normes avec la MSB.

Vous appelez de vos vœux une loi-cadre sur l’énergie durable. Que changerait concrètement ce “Sustainable Energy Act” pour le citoyen et pour les entreprises
D’abord, il faut savoir qu’il n’y a pas de loi-cadre sur les énergies renouvelables. La MARENA Act définit le rôle d’une institution, mais qu’en est-il de l’orientation politique dans le long terme ? Par exemple, si demain un gouvernement décide de promouvoir le charbon de nouveau, que se passera-t-il ? Cette loi, en harmonie avec les droits de la nature qui seront inscrits dans la Constitution, définira les contours de notre avenir énergétique dans le sens de ce qui est une vision partagée pour le pays, telle qu’elle est portée par le gouvernement au pouvoir. Cette loi aura une dimension « over-arching », un peu comme la loi qui devait encadrer le projet « Maurice Ile Durable », intégrant les dimensions économiques, sociales et environnementales de notre paysage énergétique. Évidemment, elle identifiera les lignes rouges, par exemple, la part des énergies renouvelables que tout nouveau projet majeur doit inclure au lieu de dépendre à 100 % du CEB. Une loi-cadre est essentielle pour la transition énergétique car elle concernera le transport, l’environnement, l’aménagement du territoire ou encore le développement agricole ou océanique. Elle donne une perspective holistique, avec une synergie entre la production, la demande et le stockage qui est un élément incontournable des systèmes énergétiques de demain, certainement de plus en plus décentralisés. Cette loi-cadre place au centre la question de « sustainability », essentielle dans le contexte de la réalité du changement climatique, mais aussi afin de renforcer notre résilience économique face aux risques géopolitiques. D’autres pays ont déjà leur SEA et c’est l’une des recommandations du plan stratégique nouveau de la MARENA.

Quels sont aujourd’hui les principaux obstacles réglementaires pour un particulier qui souhaite installer des panneaux solaires ?
Pour beaucoup de gens de la classe moyenne, c’est un vœu cher qui malheureusement coûte trop cher. Il y a l’exemple de la Réunion, mais les panneaux y compris avec les batteries dans un cas sur trois obtiennent une subvention substantielle. Les tarifs à l’achat sur le réseau sont aussi comme ce qui se fait en Europe, voire encore plus intéressants. Pour nous c’est un défi qu’il faut relever avec l’accès financement vert qui ne peut être réservé aux grands projets. Évidemment, il y a le temps que prend aussi l’approbation des projets. Il est essentiel que les gens n’aillent pas vers des installations qui sont illégales ou qui ne sont pas selon les normes. Dans certains pays il y a des instances indépendantes qui vérifient les installations, particulièrement en matière de « sureté » (safety). La formation des techniciens et des cadres demeure une priorité, comme leur accréditation en tant que professionnels du secteur. C’est tout un cadre qui doit accompagner la transition énergétique, pas uniquement des idées de projets. Le plan stratégique de la MARENA vise à créer cet écosystème.

Le report de l’objectif de 60 % d’énergies renouvelables à 2035 a suscité de vives critiques. Est-ce un échec, une fatalité ou un ajustement réaliste ?
Si nous allons en voiture de Curepipe à Port-Louis, départ à 8h du matin et à 8h50 nous sommes toujours à Curepipe, c’est mieux d’avertir ceux qui nous attendent à Port-Louis que nous n’arriverons pas à 9h comme prévu. C’est absolument la même chose avec les 60% à l’horizon 2030, et nous sommes déjà presqu’en 2026. C’est un échec si nous avions tout essayé, mais ce n’était le cas. Et il faut se rappeler qu’un pourcentage n’est significatif que si nous savons le total en terme absolu. C’est pourquoi il faut gérer la demande. Sinon, nous ne serons jamais à bon port. C’est comme une cible qui nous échappe en permanence si nous ne gérons pas la demande. De plus en plus de foyers souhaitent produire leur propre électricité solaire, voire devenir autonomes avec des batteries domestiques.
Le dispositif “vert-jaune-rouge” a surpris le public. Certains y voient une alerte exagérée.

Comment restaurer la confiance et éviter la “lassitude de l’alerte” ?

C’est une première pour tout le monde, y compris pour les autorités. Il y a ceux qui croient que c’était exagéré, mais il y a aussi ceux qui ont l’impression que la catastrophe est déjà là. Ce n’est ni l’un ni l’autre. Il faut rappeler qu’il n’y a eu aucune coupure de courant. Et que l’alerte rouge a eu l’effet recherché, c’est-à-dire permettre de prévenir un délestage. C’est là toute la différence avec les alertes cycloniques. Si nous agissons, alors l’alerte « rouge » pour l’électricité aura comme résultat qu’il n’y aura pas de délestage, donc plus de « rouge ». Oui nous savons qu’il faut aussi éduquer, sensibiliser et transformer les habitudes en permanence. C’est pourquoi la campagne ne se limite pas aux alertes. Il y a toute une panoplie de mesures qui seront mises en œuvre durant tout l’été. Comme il est envisagé de renforcer l’éducation énergétique dès l’école pour instaurer cette culture de sobriété que nous appelons de vos vœux.

Nous entrons dans la période la plus chaude de l’année, avec une forte demande en climatisation. Le réseau est-il prêt ? Le blackout semble inévitable, si vous deviez retenir un seul geste quotidien pour éviter le blackout, lequel serait-il — et pourquoi ?
Éteindre tout ce qui est inutilisé, surtout aux heures de pointe. Et si nous devons vraiment mettre la clim, la régler à 25oC ou plus. Et pourquoi pas profiter de l’été pour rester à l’extérieur autant que possible car ce sont les bâtiments en béton qui piègent la chaleur…

Joe Lesjongard, leader de l’opposition

« Un manque de planification concernant les projets énergétiques »

Comment décririez-vous aujourd’hui la situation énergétique du pays ?
Le secteur énergétique est dynamique et notre petite île a des défis à relever. Comme de nombreux pays, surtout les îles, nous sommes confrontés aux effets du changement climatique et à l’importation des matières premières pour la production d’électricité : l’huile lourde et le charbon. La facture d’importation est considérable. C’est pour cela que je pense que nous devons réduire notre dépendance aux énergies fossiles.

Sommes-nous face à une crise structurelle ou simplement conjoncturelle ?
Chaque dix ans, le CEB présente un Integrated Electricity Plan. Le dernier plan qui devait être publié cette année se fait toujours attendre. Un tel plan prévoit une croissance d’environ 5% annuellement résultant des développements économiques et démographiques, mais aussi des ménages, qui utilisent plus d’appareils électroménagers. Le CEB a un plan précis et élaboré pour répondre à la croissance.

Au début de cette année, pendant certains jours, le pays a connu une augmentation dans la consommation d’électricité de plus de 10%. On comprend que c’est principalement dû à la forte utilisation des climatiseurs. En début d’année prochaine fera-t-on face à une telle situation ? Certains veulent créer une psychose en brandissant comme dans le passé le phénomène de délestage. Y a-t-il un agenda caché ?

Le récent protocole de cas d’alerte verte ou rouge du CEB est conjoncturel. La raison, selon le CEB, était liée à une panne de deux turbines des IPP et un moteur du CEB. On ne nous dit pas qu’au même moment le CEB procédait à la maintenance de certains moteurs. Ce qui crée un manque de production d’énergie. Les techniciens et officiers du CEB étaient eux-mêmes étonnés qu’on ait averti la population d’une possibilité de délestage de puissance quand, eux, avaient la situation sous contrôle.

Le gouvernement affirme que la situation est « sous contrôle » malgré les tensions sur la production. Partagez-vous ce diagnostic ?
Si le gouvernement affirme que la situation est sous contrôle, alors pourquoi créer cette psychose en mettant en place le protocole rouz ble zonn ver ? Je pense que s’ils affirment que la situation est sous contrôle, c’est grâce au CEB, et non pas grâce au pouvoir politique du ministère concerné. En 2022, on a pu gérer le manque de production de 64MW de Terragen avec la capacité qui était à notre disposition et, en même temps, une bonne planification de la maintenance annuelle des moteurs.

Plusieurs voix, dont celle de la MARENA, évoquent un risque de délestage si la consommation n’est pas maîtrisée. Est-ce le signe d’un manque d’anticipation dans la planification énergétique ?

Malheureusement oui, il y a un manque de planification concernant les projets énergétiques aujourd’hui. Je prends pour exemples les deux projets annoncés en grande pompe, le Powership et le projet de turbine mobile à base de jet A1 fuel, qui ont ensuite été avortés sans aucune explication du CEB ou du ministère. La caisse est vide, mais ils ont dépensé Rs 700 000 pour une mission de deux jours par deux personnes, mais qui en fin de compte n’a rien rapporté au pays. Aucune étude du marché ni étude environnementale n’a été effectuée sur le projet de Powership, et à la fin, le contribuable a dû débourser Rs 700 000 pour deux jours pour le ministre en Turquie. Voilà le bilan du secteur énergétique en une année.

Deux facteurs impactent aujourd’hui : l’augmentation des appareils électroménagers et le changement climatique, qui fait que certaines périodes de l’année sont plus chaudes que d’habitude. Dans ce contexte, la maîtrise de la consommation devient difficile. Il y a une Roadmap pour l’énergie renouvelable et l’Integrated Electricity Plan du CEB, qui prévoit 60% d’énergie renouvelable d’ici 2030, avec aussi le phasing out du charbon. L’actuel gouvernement a repoussé ce délai à 2035. Il y a plusieurs projets d’énergie renouvelable qui ont été faits sous l’ancien gouvernement. Les projets de fermes solaires à Henrietta de 10 MW, le projet de Green Yellow de 14 MW à Arsenal, le projet de 1 MW à Grenade, Rodrigues. Mais aussi les projets de Green Rock de 10 MW, commencé sous l’ancien gouvernement à Plaine-des-Roches, qui est opérationnel depuis avril de cette année, et le projet de Landscope de 10MW, lancé en mai 2024, qui attend d’être mis sur le réseau. Donc, 45 MW au total. En plus, il y a eu la mise en opération de 38 MW de batterie.

Vous avez été ministre de l’Énergie. Avec le recul, quels choix auraient dû être faits pour éviter les déséquilibres que nous observons aujourd’hui ?
Nous devons comprendre la situation. Dans la production énergétique, nous savons ce qu’on appelle le base load et le peak load. Nous n’avons pas de problème de base load. Le cas du peak load concerne la consommation aux heures de pointe. Selon le gouvernement, nous avons un problème de peak load et il y a un risque d’un manque d’électricité de 100 MW. La solution la plus économique et durable est la batterie. Il ne faut pas encore se tourner vers l’énergie fossile ou les gros projets à coups de milliards. Sinon qui va payer cette facture ? Le consommateur.

On reproche à l’ancien gouvernement de n’avoir pas investi dans le renouvellement des moteurs des différentes centrales, qui connaissent régulièrement des pannes techniques. Qu’avez-vous à répondre ?

J’ai déposé un rapport effectué par un des constructeurs des moteurs du CEB au Parlement, qui confirme que ces moteurs peuvent rouler pendant encore 10 ans. C’est pour cette raison qu’il n’y avait pas lieu de remplacer ces moteurs.

La part des énergies renouvelables progresse lentement malgré les promesses. Qu’est-ce qui, selon vous, bloque réellement cette transition ?
Je pense qu’il faut revoir certaines procédures administratives, qui prennent du temps. J’ai été ministre, et nous aussi on avait à faire face à des situations qui ralentissent les projets. Mais il faut avoir une réelle volonté aussi, ce qui manque actuellement.

Pensez-vous que le modèle du CEB est encore adapté aux défis de la transition énergétique, ou faut-il envisager une refonte institutionnelle ? Comment concilier sécurité énergétique et développement durable dans un pays aussi dépendant des importations ?
Le CEB est une des meilleures organisations gouvernementales dans la gestion des situations difficiles, et ce sont de vrais professionnels. Il faut donner plus de moyens au département des énergies renouvelables. Comme je l’ai affirmé plus tôt, il faut réduire l’importation des énergies fossiles, diminuer la facture, et se tourner vers des énergies plus propres et moins coûteuses.

Beaucoup estiment que les citoyens devraient jouer un rôle plus actif dans la production d’énergie – par le solaire domestique, l’autoconsommation, les coopératives… Est-ce une voie d’avenir réaliste pour Maurice ?

Oui, assurément. Le projet de 10 000 kit PV lancé par Ivan Collendavelloo en 2018 a beaucoup progressé. Je salue son travail, et c’est grâce à ce projet que l’actuel gouvernement procède actuellement à la distribution de 3 500 kits PV. L’appel d’offres pour ces kits avait été lancé en juillet 2024.

Le CEB Solar PV Scheme pour les domestic consumers (households) est en place depuis novembre 2021 et permet aux ménages de produire jusqu’à 5 MW. Les coopératives, planteurs et industriels peuvent aussi produire de l’énergie solaire. Nous avons débuté la démocratisation du secteur de l’énergie. Aujourd’hui, une quinzaine de Schemes pour les différentes catégories de ménages, de commerces ou d’industriels sont en place. Mais, étonnamment, le ministre passe tout cela sous silence. Peut-être que ce gouvernement ne veut pas que nous produisions plus d’énergie renouvelable et est contre la démocratisation de la production énergétique. Je vous cite un cas d’un gros industriel dans le secteur du textile qui fait face actuellement à d’énormes complications administratives venant des autorités afin qu’il puisse produire de l’énergie solaire.

Quelle serait, selon vous, la vision énergétique idéale à l’horizon 2035 ? Quel mix énergétique visez-vous et quels leviers faut-il activer dès maintenant ?
Faire son possible pour éliminer l’huile lourde qu’on utilise dans les moteurs du CEB et la remplacer par le biofuel. Un premier travail avait commencé en ce sens quand j’étais ministre. Eliminer aussi le charbon. Faire de la production agri-voltaïque une réalité pour faire face à la sécurité énergétique et, en même temps, la sécurité alimentaire. Étendre les projets de ferme photovoltaïque flottante sur nos réservoirs et voir la possibilité d’un projet éolien en haute mer et augmenter l’utilisation des batteries.

Quel devrait être le rôle du secteur privé en matière de production énergétique ?
Depuis des décennies, le CEB et le secteur privé ont eu un partenariat solide. Ce gouvernement a créé une compagnie ou l’État et les IPP sont actionnaires pour importer la biomasse. Donc, il est clair que les contrats avec les IPP vont être renouvelés sans compétition. L’État sera dépendant des IPP pendant encore des décennies, et cela avec des clauses qui sont au détriment du CEB et de la population. En ce qui me concerne, le CEB doit devenir actionnaire des IPP. Les profits doivent être partagés.

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