Marchés de capitaux en Afrique : La BoM plaide pour des systèmes inclusifs, durables et intégrés

Pricilla Mathura Thakoor, gouverneure : « Les institutions financières ne doivent pas se limiter à financer les grands projets, mais aussi soutenir les PME, les femmes entrepreneures, les jeunes et les initiatives locales »

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Le Regional Center for Excellence (RCE) et l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) ont procédé, hier, au lancement du rapport sur les marchés des capitaux en Afrique sur le thème Banking and Capital Markets in Africa. La gouverneure de la Banque de Maurice, Pricilla Mathura Thakoor, qui faisait sa première sortie publique, a livré un discours fort sur le rôle stratégique du secteur financier dans la transformation économique du continent africain.

Elle a insisté sur la nécessité pour les banques et marchés de capitaux africains de devenir de véritables moteurs de croissance inclusive, durable et résiliente, capables de traduire le potentiel démographique et économique de l’Afrique en développement concret.

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Pour Pricilla Thakoor, l’Afrique se situe à un tournant décisif : « Avec une population de plus de 1,4 milliard d’habitants et un âge médian de moins de 20 ans, le continent est doté d’une jeunesse dynamique et d’une énergie qui peuvent transformer son avenir. »

Au regard des données de la Banque africaine de développement (BAD), du FMI et de la Banque mondiale, la croissance du PIB africain devrait atteindre 3,9 % en 2025 et 4 % en 2026, des performances supérieures à la moyenne mondiale.
Mais cette vitalité économique ne pourra être pleinement exploitée, a-t-elle averti, qu’à condition de réformer les structures économiques et financières, de renforcer la bonne gouvernance et de promouvoir l’inclusion à tous les niveaux.

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La gouverneure de la Banque Centrale a plaidé pour une redéfinition du rôle des banques en Afrique : « Les institutions financières ne doivent pas se limiter à financer les grands projets, mais aussi soutenir les PME, les femmes entrepreneures, les jeunes et les initiatives locales. »

Elle a affirmé que le secteur bancaire doit devenir un acteur du développement national, en soutenant à la fois les grandes infrastructures et l’économie de proximité. Elle a cité en exemple Maurice  comme modèle d’équilibre entre innovation et stabilité : « Maurice a su créer un environnement où la régulation accompagne l’innovation, notamment dans les domaines de la banque numérique et des actifs virtuels. »

Près de 350 millions d’Africains restent aujourd’hui non bancarisés, a rappelé Mme Thakoor. Cette exclusion prive une large partie de la population d’accès à des services essentiels — épargne, crédit, assurance, paiements — et freine le développement économique local.

Elle a appelé à accélérer la digitalisation des services financiers : « Les solutions mobiles, la microfinance et la banque digitale offrent des moyens concrets pour rapprocher la finance des citoyens. » L’exemple du M-Pesa au Kenya, a-t-elle ajouté, démontre la capacité du continent à “sauter” les étapes technologiques et à innover pour inclure les plus vulnérables.

Abordant la question de la durabilité, la gouverneure s’est appesantie sur l’importance croissante des critères ESG (Environnement, Social et Gouvernance) dans les décisions des institutions financières.
Elle a plaidé pour que les banques et marchés de capitaux africains financent la transition verte : infrastructures résilientes, agriculture durable, adaptation au changement climatique. « Le développement durable ne peut être un luxe pour l’Afrique, il est une nécessité. » Maurice, a-t-elle noté par ailleurs, a pris les devants avec l’introduction de lignes directrices sur la banque digitale et les actifs virtuels, conciliant innovation et stabilité — un modèle à suivre sur le continent.

« Mauritius, with its strategic location between Asia and Africa, provides a reliable bridge between global capital and African opportunities. It also offers a compelling case study in the evolution of banking and finance within the region. The country’s proactive approach to regulation, including in areas such as digital banking and virtual assets, serves as a model for other African nations seeking to balance innovation with risk management », a affirmé Pricilla Thakoor.

La gouverneure de la Banque centrale a déploré que les marchés de capitaux africains restent peu profonds et mal intégrés, freinant le financement de long terme nécessaire à la croissance.
Selon la Banque africaine de développement, le déficit d’infrastructure est évalué entre 68 et 108 milliards USD par an, alors même que les investisseurs institutionnels africains gèrent plus de 2 100 milliards USD d’actifs.

Elle a plaidé pour le développement des marchés obligataires, une meilleure transparence et liquidité, et une harmonisation régionale des réglementations.

Les technologies émergentes, telles que la blockchain et les Smart Contracts, pourraient, selon elle, contribuer à réduire les coûts et à renforcer la confiance.

Mme Thakoor a indiqué que le développement durable de la finance africaine passe par l’investissement dans les compétences humaines. Il s’agit de former les professionnels de la finance, de promouvoir la diversité et de favoriser la participation des femmes et des jeunes dans le secteur. Les banques centrales, a-t-elle ajouté, ont un rôle clé à jouer dans la stabilité du système, l’éducation financière et la protection des consommateurs, notamment à travers la coopération au sein de l’Association des Banques Centrales Africaines.

« Mauritius has taken a leadership role by introducing comprehensive guidelines on digital banking and virtual asset activities, seeking to balance the twin goals of promoting innovation and ensuring financial stability. We look forward to having other countries from the continent adopt similar frameworks that foster responsible innovation and align with international best practices », a-t-elle mis en avant.

En conclusion, la gouverneure de la Banque de Maurice a lancé un appel à l’action collective : « L’Afrique dispose d’un potentiel immense. Pour le libérer, nous devons agir ensemble, mobiliser les capitaux, renforcer nos institutions, intégrer nos marchés et investir dans notre jeunesse. » Elle a exprimé sa conviction que l’union des forces publiques et privées, appuyée par des politiques cohérentes et une vision partagée, permettra de bâtir une Afrique prospère, durable et inclusive.

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