Le Mauritius Fire & Rescue Service a un nouveau Chief Fire Officer : Ashok Ramdhean pour redorer le blason des soldats du feu 

Les pompiers ont un nouveau Chief Fire Officer (CFO). Quatre mois après le départ à la retraite du très controversé Asok Kumar Kehlary, c’est Ashok Ramdhean, ex-Deputy Chief Fire Officer, qui prend les rênes du Mauritius Fire & Rescue Service (MFRS), où il a débuté sa carrière en 1990 aux casernes de Quatre-Bornes. Ce natif de Montagne-Longue nous raconte son parcours et ses objectifs à court et à long termes. Il aura la lourde responsabilité de donner le choc de confiance attendu par les 988 soldats du feu qu’il dirigera pour véritablement remettre en marche cette institution vieille de 174 années.

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Pour le service des pompes, le CFO est l’équivalent du commissaire de police pour la force policière. Si au début de la colonisation de notre île la responsabilité de combattre les incendies revenait aux soldats, le Service des Pompes Municipales fut fondé en 1851 sous le mairat de Louis Léchelle, le premier maire de Port-Louis, après les premières élections municipales de la capitale. Le premier CFO était un Anglais, M. R. Frost. Un peu moins de deux siècles plus tard, Ashok Ramdhean inscrit son nom dans l’histoire de la brigade en succédant à Asok Kumar Kehlary.

Rien ne prédestinait Ashok Ramdhean à une carrière de sapeur-pompier. Après des études secondaires au collège Soondur Munrakhun, à Montagne-Longue, il se lance dans le métier de camionneur, étant détenteur d’une driving licence for Heavy Motor Vehicle. « Le fait d’avoir obtenu cette licence a été le déclic. Je suis tombé sur une annonce stipulant qu’on recrutait des pompiers ayant ce fameux sésame. C’est comme ça que j’ai rejoint le service des pompes en intégrant les casernes de Quatre-Bornes le 10 décembre 1990 », soutient Ashok Ramdhean

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Bien lui en a pris, car non seulement il est confirmé à son poste au bout d’une année seulement, contrairement à d’autres collègues qui ont attendu trois ou quatre ans, mais en 1999, il réussit brillamment aux examens du Graduateship of Fire Engineers, ce qui le propulse au rang de Station Fire Officer qu’il occupe jusqu’en 2012, avant de gravir l’échelon menant au poste tant convoité de Divisional Fire Officer.

Ceux qui ont côtoyé Ashok Ramdhean durant son parcours professionnel le dépeignent comme un homme droit dans ses bottes. Son ascension aux rangs d’Assistant Chief Fire Officer, en 2020, et Deputy Chief Fire Officer, en 2024, n’a surpris personne au sein de l’institution. Les périlleuses interventions effectuées par Ashok Ramdhean durant ses 35 ans de carrière se comptent par centaines. Que ce soit dans des maisons, des champs de canne et des bâtiments historiques pour éteindre un incendie. Sauver des gens de la noyade lors d’inondations monstres ou affronter le sang et les corps calcinés lors des désincarcérations sur des lieux d’accident de la route. La noble mission de sauveteur requiert du courage, du dévouement et une haute conception du devoir. Prendre les manettes du MFRS nécessite les mêmes qualités auxquelles s’ajoutent des connaissances professionnelles sûres doublées d’un contact régulier avec les méthodes modernes employées dans d’autres pays.

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Le chantier qui attend Ashok Ramdhean est colossal. Il lui faudra d’abord faire table rase du passé et gommer l’héritage que lui a laissé son prédécesseur, dont les méthodes peu conventionnelles et toxiques ont été vivement contestées tout au long de son mandat de cinq ans par les employés, y compris au plus haut niveau de la hiérarchie du MFRS, la Fire FIghters Union (FFU) et d’autres syndicalistes. La FFU y croit dur comme fer : Ashok Ramdhean mérite sa place et a les reins solides pour redorer le blason des soldats du feu.

« Nous adressons nos chaleureuses félicitations au nouveau CFO. Il l’a bien mérité. On lui souhaite plein de succès, courage et épanouissement dans l’exercice de ses nouvelles fonctions. L’effort et le mérite ont été récompensés. La FFU exprime également son souhait de collaborer étroitement avec lui dans un esprit de dialogue et de partenariat, en vue de promouvoir le progrès et d’assurer le bon fonctionnement du département, contrairement à ce qu’on a pu voir dans un passé pas trop lointain », confie Trivengadum Pillay, de la FFU.

Lorsqu’on demande au nouveau CFO d’égrener ses principaux objectifs à court et long terme, il est prompt à évoquer le triste sort réservé aux sapeurs-pompiers qui se sont donné corps et âme pour gravir les échelons menant au rang de Station Fire Officer et Divisional Fire Officer… mais qui ont vu, en 2023, l’annulation de la totalité de l’exercice relatif à l’examen de promotion par la Dicipline Forces Service Commission (DFSC) suite à des accusations de népotisme formulées à l’endroit de l’ex-patron du MFRS.

« Ces pompiers rongent leur frein depuis plusieurs années en dépit d’avoir réussi à ces examens. C’est injuste. On travaille actuellement sur un scheme visant à accélérer l’exercice de promotion pour ces deux postes. It is at the ministry level for approval. Il faudra aussi penser à lancer un exercice de recrutement de 60 nouveaux pompiers dans l’optique de l’ouverture prochaine de la New Goodlands Fire Station. On a déjà fait une requête à la DFSC en ce sens. Notons que la construction de deux nouvelles stations sera enclenchée dans les semaines à venir à Montage-Blanche et Jin Fei. Ces projets ont toute leur importance dans la réduction des temps d’attente des interventions, ce qui peut sauver des vies », dit-il.

Ashok Ramdhean s’est appesanti sur le  manque d’effectif au sein du Pre-Hospital Emergency Care dont les interventions se font de concert avec le SAMU dans des cas où les ambulanciers se trouvent en difficulté pour secourir des blessés dans des lieux d’accidents. « Nous avons uniquement 58 pompiers qui ont formés par le Mauritius Institute of Health (MIH) pour intervenir dans cette unité. Face à la recrudescence des accidents, il est primordial de former plus de personnes. Un MoU a été signé récemment avec le MIH pour rectifier le tir », souligne le CFO qui a dressé le même constat en ce qu’il s’agit du manque d’effectif au sein de la Swift Water Rescue Unit appelée à répondre aux problèmes qui sont liées au sauvetage en eau. « Seuls 109 pompiers ont suivi des cours d’intégration à cette unité. Face au phénomène de changement climatique, surtout les problèmes d’inondation et autres, cette unité doit prendre du galon », dit-il.

Il était impensable d’éluder la question des incendies monstres ayant ravagé le centre d’enfouissement de Mare Chicose et l’abnégation des pompiers qui se relayaient quotidiennement pour circonscrire l’incendie en dépit des conséquences néfastes dues au manque de moyens et du mode d’organisation. D’aucuns ont dressé un sombre tableau des mesures de prévention des risques sanitaires déployées sur le site. Durant 16h d’affilée, ce qui est contraire aux dispositions de la Health & Safety Act, ils étaient soumis à un environnement de travail « exécrable », en l’absence d’un service médical sur le site et sans que leurs supérieurs hiérarchiques ne fassent grand cas des conséquences irrémédiables sur leur santé.

Parmi les pistes d’amélioration préconisées par Ashok Ramdhean figure le recrutement de pompiers volontaires : « Les effectifs déployés dans des incendies de grande envergure doivent pouvoir recevoir le renfort de pompiers volontaires lors de gigantesques incendies dans le but de densifier le dispositif de lutte. Si on a pris 30 jours pour circonscrire le feu à Mare Chicose, on pourrait le faire en moins de 20 jours si on a un fort dispositif de volontaires formés par nos soins ».

L’absence du camion Hazmat sur le site de Mare Chicose, un véhicule stationné aux casernes de Coromandel et disposant de bacs et d’autres équipements pouvant asperger les pompiers de produits de décontamination, a aussi été décriée par le personnel. Acheté en provenance d’Allemagne en 2021, ce camion abrite aussi tous les engins techniques et spéciaux destinés au transfert et la manipulation de liquides corrosifs, de liquides inflammables et de gaz comprimés, mais aussi un appareil de mesure pour calculer la direction du vent. « Des officiers aguerris ont été formés pour manier lesdits bacs, mais ce qu’il faut faire, c’est de créer une équipe dédiée spécialement à cette activité. L’achat de nouveaux casques, de masques de respiration et nouvelles bottes, etc. est un must », souligne Ashok Ramdhean.

Quid de l’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans la formation des sapeurs-pompiers ? « J’ai assisté à des stages à l’étranger, en Corée du Sud notamment. Cette évolution technologique permet d’optimiser l’apprentissage et d’améliorer la préparation des interventions, tout en garantissant une meilleure sécurité pour les équipes d’intervention comme pour les civils. Cette option est envisagée », confie notre interlocuteur…Reste à savoir si le gouvernement lui allouera les fonds nécessaires pour mener à bien son entreprise.

ANDY SERVIABLE

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