Depuis sa création en 2022, l’Africa Bitcoin Conference s’est imposée comme le plus grand rendez-vous du Bitcoin sur le continent. Cette quatrième édition, qui s’est déroulée à Maurice sur 3 jours, placée sous le signe du leadership africain en matière d’adoption du Bitcoin, n’avait rien d’un simple forum technologique. À travers débats, témoignages et prises de position tranchées, une question centrale a dominé les échanges : comment l’Afrique peut-elle transformer le Bitcoin en un véritable levier de prospérité, sans en faire un outil de domination supplémentaire ?
Dès l’ouverture, Farida Nabourema, directrice exécutive de l’Africa Bitcoin Conference, a donné le ton. Pour elle, le Bitcoin dépasse largement le cadre de l’innovation financière. Elle a souligné que la lutte contemporaine pour la liberté inclut désormais « the right to own, save and transact without restriction ». Dans un continent longtemps marqué par des systèmes financiers contraignants, dépendants et souvent exclusifs, le Bitcoin devient ainsi un symbole de souveraineté individuelle et collective. Farida Nabourema a insisté sur le rôle stratégique de l’Afrique dans la redéfinition de l’ordre financier mondial. Loin d’être un simple terrain d’expérimentation, le continent est, pour elle, un laboratoire vivant d’innovations monétaires, façonné par des réalités bien concrètes : inflation chronique, contrôle des capitaux, monnaies faibles et exclusion bancaire. « Africa has a pivotal role in reshaping the global financial order », a-t-elle affirmé, invitant les participants à innover et collaborer autour de la justice financière et de la souveraineté économique.
Hema Hadiya Masieh, fondatrice et CEO du Groundswell Project, à travers son travail auprès de femmes réfugiées en Afrique et ailleurs, a montré comment le Bitcoin peut devenir un outil de dignité et de reconstruction. Elle a raconté comment des femmes déplacées utilisent le Bitcoin pour recevoir des fonds, épargner et créer des moyens de subsistance. Issue de racines mauriciennes et ougandaises, Hadiya Masieh a développé des programmes éducatifs sur l’utilisation du Bitcoin pour les transferts, l’épargne et les moyens de subsistance, dans des pays comme la Gambie, la Somalie, le Kenya ou encore l’Iran et l’Afghanistan. Son message est clair : dans un contexte de migration forcée et de marginalisation, le Bitcoin peut réécrire le récit, en redonnant aux individus le contrôle de leur avenir économique. « It is about rewriting the story of migration with hope », a-t-elle résumé.
Mais à l’ouverture de la conférence, c’est sans doute l’intervention de Femi Longe, Global Bitcoin Lead à la Human Rights Foundation, qui a le plus fortement secoué la salle. Avec un discours sans concession, il a exhorté l’Afrique à définir clairement son agenda. « If we are not clear on our agenda, we will serve other people’s agendas, and to our own detriment », a-t-il lancé. Pour lui, l’objectif n’est pas le Bitcoin en soi : « Bitcoin is just a tool, the real outcome is prosperity for all Africans. »
Femi Longe a rappelé une vérité brutale : l’Afrique compte certains des pays les plus pauvres au monde, et la route vers la prospérité passe par la productivité et la création de valeur « in an atmosphere of dignity ». Or, le système monétaire actuel, dominé par les monnaies fiat, joue contre le continent, estime-t-il. « People are printing fiat in mass right now, and they are buying Bitcoin in mass », a-t-il déploré. Dans ce système, a-t-il insisté, l’Afrique est structurellement perdante. D’où son appel à repenser radicalement l’approche de l’adoption du Bitcoin. « The ideal paradigm for us is to create ways for Africans to transact directly in Bitcoin. We don’t have to convert fiat currency into Bitcoin — that is our first challenge », a-t-il expliqué. Le véritable enjeu est ailleurs : « Stimulate a million ways for Africans to earn and spend Bitcoin. » Et ce, avant d’ajouter, dans une formule qui a marqué les esprits : « For this we need Bitcoin factories, not churches. »
Pour Femi Longe, demander aux Africains de simplement télécharger des portefeuilles numériques (crypto wallets) ne suffit pas. « Make Bitcoin functional, not ideological, for Africans », a-t-il martelé. Cela passe aussi par un renforcement urgent du commerce intra-africain. Trop faibles aujourd’hui, ces échanges sont freinés, dit-il, par la multiplicité et l’incompatibilité des monnaies nationales. « How do we navigate together when our currencies do not even match? Bitcoin is the solution, using a neutral currency », a-t-il souligné.
Cette idée d’un Bitcoin comme monnaie neutre pour reconnecter économiquement le continent a trouvé un écho chez Anita Posch, fondatrice de Bitcoin for Fairness. Forte de plusieurs années de terrain en Afrique, notamment au Zimbabwe, qu’elle décrit comme « trapped in hyperinflation », elle a partagé les leçons tirées de communautés confrontées à des régimes autoritaires, à l’effondrement monétaire et à des infrastructures limitées. « Fiat money serves the powerful », a-t-elle affirmé, tandis que l’argent numérique peut « empower citizens ».
Anita Posch a cité de nombreuses applications africaines permettant déjà des transactions en Bitcoin, et a évoqué l’essor du mouvement Bitcoin for Fairness à travers le continent. Si le Bitcoin lui paraît inévitable, elle appelle toutefois à la vigilance, notamment sur la question du minage. « Don’t let foreign investors extract wealth from your country. Think long term and build for your fellow Africans and the world », a-t-elle plaidé. Son message est sans ambiguïté : « Stop copy-pasting foreign models. Do not let Bitcoin become just another tool in the hands of the powerful. » Au fil des discussions, une conviction s’est imposée : le Bitcoin offre à l’Afrique une opportunité historique, mais aussi un immense défi. Celui de ne pas répéter les schémas de dépendance du passé, celui de bâtir des usages ancrés dans les réalités locales, productifs et inclusifs.
Le PM, Navin Ramgoolam :
« Mettre en avant les opportunités
que Maurice et l’Afrique ont à offrir »
Le Premier ministre Navin Ramgoolam, a déclaré que Maurice est impatiente d’accueillir des dirigeants d’Afrique et des Etats-Unis et de mettre en avant ce que Maurice et l’Afrique ont à offrir .
« Maurice est honorée d’accueillir le sommet des affaires États-Unis-Afrique 2026. Notre nation a longtemps servi de pont entre l’Afrique et le monde, et ce sommet renforce notre engagement à faire avancer des partenariats stratégiques qui stimulent les affaires, l’investissement et la collaboration économique mutuellement bénéfique entre les États-Unis et les nations africaines. Nous avons hâte d’accueillir les dirigeants mondiaux et de mettre en avant les opportunités que Maurice et l’Afrique ont à offrir », fait-il comprendre.
D’autre par la présidente et CEO du Corporate Council for Africa (CCA), Florie Liser, a rencontré aujourd’hui le Premier ministre, Navin Ramgoolam. Elle était accompagnée de Jean Raymond Boulle, Biouva Kabine et de l’ambassadeur Henry Jardine.Les discussions ont principalement porté sur l’organisation du US-Africa Business Summit, qui se tiendra à Maurice du 26 au 29 juillet 2026.

