Un patrimoine qui mérite d’être sauvé

Architecte en Chef DPLG, Inspecteur Général des Monuments Historiques (h), Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. François Jeanneau dirige le cabinet d’architecture ARCHITRAV. Enseignant au CDHEC (Ecole de Chaillot Paris), Sofia (Bulgarie), Erevan (Arménie) sur la restauration de la pierre et la fidélité et le compromis du projet de restauration. Avec de nombreuses réalisations de restauration de patrimoine historique dont le Château de la Malmaison, le Conservatoire National des Arts et Métiers, la Cathédrale de Coutances, il a été en charge de la restauration du Mont Saint Michel pendant plus de vingt ans.Au cours de sa visite à l’Ile Maurice en octobre 2025, accompagné d’Alain La Hausse de Lalouvière, fondateur de l’Institut du Patrimoine et de l’Architecture de l’océan Indien avec Thierry Le Breton, François Jeanneau a dressé un constat de la situation du patrimoine à Maurice…

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Un grand intérêt architectural

François JEANNEAU

Architecte en chef, Inspecteur général des Monuments Historiques (h) Responsable technique de l’Institut du Patrimoine et de l’Architecture de l’océan Indien

Les constructions historiques de Maurice sont très intéressantes. Le mode de construction en pierre est de qualité, voire de très grande qualité où les techniques de taille de la pierre respectent ce que l’on connait habituellement dans les pays où elles sont utilisées :  des pierres bien calibrées, bien taillées avec des ciselures, ce qui montre un grand savoir-faire dans la taille d’une pierre très dure comme le basalte. On retrouve des parements de qualité de taille dans les éléments d’ouverture comme les arcs, les linteaux droits. Les joints sont relativement fins, ce qui démontre une précision de taille préétablie. 

Les constructions en bois, grandes maisons coloniales ou maisons plus modestes des villes et villages sont de grande qualité architecturale dans leur forme, leur structure et leur organisation spatiale et fonctionnelle interne. On y retrouve une même façon de construire qu’il conviendra de préciser. Je retiendrai également le mode de couverture en bardeaux recouvert de peinture ou de bitume, de paille de canne, de tôle sur des charpentes parfaitement assemblées.

Ancien poste de police de Moka

Un patrimoine menacé 

Le mauvais état de ces constructions est un vrai souci car leur disparition raye de l’île toute une partie très intéressante de son histoire. Quel dommage de ne pas préserver ces constructions, témoins du labeur des hommes, des colons mais aussi de toute cette main d’œuvre, esclaves ou artisans libres qui ont travaillé dur pour les édifier. L’ignorer, c’est faire abstraction de l’histoire de l’île et de ses habitants. On ne peut laisser disparaître la mémoire des hommes et le fruit de leur travail. Ce que j’ai vu est en général parfaitement restaurable. Il est grand temps d’en prendre conscience et d’œuvrer à la préservation de ce patrimoine bâti en perdition.

La restauration, est-ce possible ? 

Les techniques de mise en œuvre sont simples que ce soit pour la pierre comme pour le bois. Il n’est donc pas difficile de restaurer, c’est-à-dire de sauver de la disparition ces constructions.  Nous connaissons des entreprises qui maîtrisent parfaitement les techniques de restauration. Elles seront certainement prêtes, avec les architectes du patrimoine de l’Institut, à venir enseigner ces savoir-faire. Elles peuvent venir de La Réunion, d’Inde, de France, ou d’ailleurs. Il faut donc se mettre à l’ouvrage pour démontrer la facilité d’utiliser les techniques anciennes et l’Institut sera là pour enseigner et promouvoir ces techniques, en contrôlant leur bonne exécution.

Maison à Mahébourg

 

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