Parole aux partenaires sociaux — 2025: Les syndicalistes dressent un bilan nuancé et appellent à un dialogue social renforcé en 2026

Haniff Peerun (MLC)

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« Une année difficile pour les Mauriciens »

« L’année 2025 avait été porteuse de beaucoup d’espoir pour les travailleurs en général, avec l’arrivée au pouvoir d’un nouveau gouvernement, porté par le peuple avec enthousiasme. Cependant, la dure réalité est que le peuple a été berné par des politiciens qui mangent tous à la même assiette. Cette année a été difficile non seulement pour les travailleurs, mais pour l’ensemble des Mauriciens.

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« En plus du coût élevé de la vie, plusieurs privilèges ont été supprimés. Le coup fatal a été le retrait d’un droit acquis des pensionnés, avec le relèvement de l’âge de la Basic Retirement Pension de 60 à 65 ans. Nous avons été quotidiennement harcelés par des discours tels que la caisse est vide ou encore que Moody’s nous surveille.

« Nous avons également assisté aux défilés de grosses pointures devant la Financial Crimes Commission, mais sans grande suite, renforçant la perception qu’il existe une loi pour les riches et ceux au pouvoir, et une autre pour les pauvres : bail for the rich and jail for the poor.

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« Les Mauriciens ont compris que leur destin dépend d’eux-mêmes et non des politiciens. Les fléaux de la société n’ont pas régressé. La lutte contre la drogue et le crime organisé est déjà perdue, faute de décisions rapides de la part des autorités. Malgré plusieurs aides accordées par le gouvernement au secteur privé, il n’y a pas eu de créations d’emplois, mais plutôt des pertes d’emplois. Bref, le changement tant attendu s’est rapidement évaporé.

« Nous souhaitons que l’année 2026 soit meilleure et que nous remportions des victoires sur tous les plans : les droits des travailleurs, le respect des engagements pris par les politiciens au pouvoir, la lutte contre les dérives sociales, l’éradication de la pauvreté absolue et le rétablissement des droits supprimés, notamment la pension de vieillesse. Le plus grand combat demeure la consolidation de l’unité nationale, car nous constatons une augmentation des dérives communales, tant sur les réseaux sociaux que dans la vie quotidienne. Nous espérons que chaque famille puisse vivre décemment, dans la paix et la dignité. »

Deepak Benydin (FPBOU)

« Appauvrissement généralisé de la population »

« Je souhaite à tous les Mauriciens – enfants, jeunes, adultes, personnes âgées – ainsi qu’à tous les travailleurs étrangers exerçant dans notre pays, de bonnes fêtes de fin d’année et une meilleure année 2026.

« L’année 2025 a malheureusement été marquée par un appauvrissement généralisé de la population, touchant particulièrement les classes moyennes et les couches les plus vulnérables de la société. Le coup le plus dur a été porté aux personnes du troisième âge. La pension de vieillesse à 60 ans a été supprimée pour être progressivement repoussée à 65 ans. Les prix des produits de consommation courante n’ont cessé d’augmenter, rendant le coût de la vie de plus en plus élevé. La Wage Assistance, soit la garantie du salaire minimum, a été réduite de Rs 1 000 et continuera de diminuer avant de disparaître totalement dans deux ans. L’assistance financière accordée aux enfants jusqu’à l’âge de 3 ans a été supprimée. Le prix de l’essence n’a pas baissé comme cela avait été promis. Les compensations accordées aux travailleurs sont dérisoires.

« La plus grande déception concerne les petits fonctionnaires. Le rapport du Pay Research Bureau (PRB) n’a pas été appliqué rétroactivement à partir de 2025, contrairement aux promesses faites. Les travailleurs n’ont bénéficié que des miettes, tandis que les hauts cadres s’approprient des salaires princiers. Au lieu de payer les arriérés dus depuis la dernière révision du salaire minimum, il a été décidé de verser le nouveau salaire en deux tranches. Cela signifie que les travailleurs au bas de l’échelle ne bénéficieront pas réellement du salaire minimum.

« Pour la prochaine année, le combat pour le retour de la pension de vieillesse à 60 ans se poursuivra. La lutte pour la baisse des prix des produits alimentaires et des services continuera. Des réformes législatives sont nécessaires pour lutter efficacement contre la fraude, la corruption et les abus dans le recrutement au sein des organismes parapublics. La mise sur pied d’une Statutory Bodies Service Commission demeure une priorité, en lien avec la Financial Crimes Commission. La Statutory Bodies Act doit être revue.

« Les employés des organismes parapublics doivent être confirmés après une année de service. Les transferts ou mouvements entre organismes parapublics et gouvernement doivent se faire dans les mêmes conditions, avec la préservation de tous les droits acquis (ancienneté, salaire, congés, etc.

« Les comités disciplinaires contrôlés par les employeurs doivent être abolis, car ils sont à la fois juges et parties, avec un pouvoir excessif de Hire and Fire. Toutes les procédures disciplinaires doivent relever du ministère du Travail. La formation syndicale, l’éducation et le renforcement des compétences doivent être une priorité. Le Trade Union Trust Fund doit devenir une organisation centrale au service de tous les travailleurs.

« Le projet de construction d’un bâtiment dédié doit sortir des tiroirs et être financé par le gouvernement et l’ILO. Maurice peut devenir un centre régional de formation pour les travailleurs. »

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 Clency Bibi (GWF)

« Une île Maurice forte ne peut exister sans le respect des travailleurs »

« L’année 2025 restera gravée dans la mémoire des travailleurs et de la population en général comme une année de désillusions, de luttes et de résistance avec un début de démantèlement de l’État-Providence annoncé dans le budget. Personne ne s’attendait à une telle mesure venant du gouvernement du changement, pourtant plébiscité par une large majorité des Mauriciens. Malgré les promesses répétées, beaucoup de salariés ont continué à subir l’érosion de leur pouvoir d’achat, la flambée des prix des produits essentiels et des décisions prises sans réelle consultation des partenaires sociaux.

« Les attentes placées dans les mécanismes du dialogue social, dans les ajustements salariaux et dans les réformes annoncées n’ont pas toujours été à la hauteur des sacrifices consentis par les travailleurs. Trop souvent, la voix syndicale a été écoutée mais pas entendue, et les revendications légitimes sont restées lettre morte. Les amendements aux lois du travail se font toujours attendre, par exemple la révision de la définition du terme Worker dans la Workers Rights Act.

« Pourtant, 2025 a aussi été une année de dignité et de courage sur le plan syndical. Les travailleurs ont refusé la résignation. Ils ont rappelé, par leurs mobilisations et leurs déterminations, que le progrès économique ne peut se faire au détriment de la justice sociale. Les syndicats ont continué à jouer leur rôle de rempart contre l’injustice, malgré un contexte parfois hostile et difficile.

« Nous avons aussi connu en 2025 une arrivée record de touristes (avoisinant les 1,4 million). Pourtant il y a (et sans explication) pénurie de devises sur le marché. La roupie se déprécie par un manque de décision politique et cela joue en faveur des exportateurs au détriment des consommateurs.

« En tournant la page vers 2026, nos souhaits sont clairs et sincères. Nous appelons à une année de dialogue social réel, et non de façade, une année où les décisions économiques tiendront compte de la réalité vécue par les familles. Une année où le travail sera reconnu à sa juste valeur, où les salaires suivront le coût de la vie, et où les droits acquis seront protégés et renforcés.

« Que 2026 soit une année de respect, d’écoute et de solidarité, où le gouvernement, le secteur privé et les syndicats avanceront ensemble dans l’intérêt du pays ! Car une île Maurice forte ne peut exister sans des travailleurs respectés, protégés et justement rémunérés.

« Les syndicats resteront vigilants, unis et engagés. La lutte continue, non par confrontation stérile, mais par conviction que la justice sociale est le fondement d’un développement durable et humain. »

  Rajnarain Guttea (travailleur social)

« Maurice a besoin de se développer dans de nouveaux secteurs »

« L’île Maurice a impérativement besoin de se développer dans de nouveaux secteurs afin d’absorber les jeunes professionnels titulaires de diplômes et de grades universitaires, qui attendent toujours des possibilités d’emploi décent.

« Le rapport du Pay Research Bureau (PRB) a été publié, mais il comporte de nombreuses anomalies qui doivent être corrigées afin d’éviter toute frustration. Il serait souhaitable de mettre en place des arbitres indépendants pour les travailleurs qui ne relèvent pas du régime du PRB.

« Concernant le fléau de la drogue, les autorités doivent faire preuve d’une grande fermeté et renforcer les contrôles au niveau de l’aéroport et du port. Il est également nécessaire d’instaurer un Fast-Track pour achever les projets de logements de la NHDC, car chaque citoyen a droit à un toit.

« Étant donné la hausse continue des prix des médicaments, les pensions des personnes du troisième âge ne devraient pas être imposables. La corruption continue de gangrener le pays et demeure une maladie grave de notre société. Le peuple doit impérativement voir les fraudeurs traduits en justice et condamnés.

« Un appel est lancé pour stabiliser la roupie mauricienne. Le secteur touristique est un pilier essentiel de l’économie, et la sécurité des touristes est primordiale. Un contrôle strict des prix est également nécessaire.

« Par ailleurs, une surveillance accrue doit être assurée dans les gares routières et aux alentours des écoles, afin d’empêcher les trafiquants de drogue d’y opérer. Il est aussi préconisé de mettre en place une télévision privée. »

Gheerishsing Gopaul (GSEA)

 « L’équipe de la GSEA continuera à être aux côtés des travailleurs en 2026 »

« Durant cette année qui tire à sa fin, il y a eu beaucoup d’événements concernant la classe laborieuse. En tant que syndicaliste et représentant des travailleurs et partenaire social auprès des autorités, nous avons beaucoup suivi les actualités du moment. L’année 2025 a été marquée par les Assises de l’Éducation, celles du Travail, de l’Art et de la Culture et de la Sécurité sociale. Nous avons eu l’occasion d’exprimer nos opinions et de faire des propositions.

« La décision de repousser le paiement de la Basic Retirement Pension à l’âge de 65 ans a créé toutefois beaucoup de mécontentement. Je profite de l’occasion pour exprimer mes sincères sympathies aux travailleurs qui ont perdu leur emploi dans les collectivités locales et au sein du ministère de l’Agriculture.

« Nous terminons l’année avec la publication du rapport du Pay Research Bureau qui ne sera pas appliqué avec effet rétroactif. Nous espérons cependant qu’il y a davantage de recrutements au sein de la fonction publique et que le paiement des heures supplémentaires au sein du ministère de la Santé se fera le plus vite possible. L’équipe de la GSEA continuera à être aux côtés des travailleurs en 2026.   Je vous souhaite une bonne et heureuse année 2026 à tous. »

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