45 ans après la qualification pour la CAN : Le bonheur de se retrouver entre copains

Mars 1974. La sélection mauricienne de football, forte de 22 éléments, se trouvait en Égypte afin de participer à la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations. Mars 2019, soit 45 ans après, ceux toujours de ce monde s’étaient donné rendez-vous au Dodo Club. Cette initiative des anciens internationaux de la formation curepipienne aura permis en ce mercredi 6 mars de donner lieu à des retrouvailles empreintes de chaleur et d’émotion. L’occasion pour cette bande de copains de revivre cette épopée jamais égalée jusqu’ici et de se remémorer des souvenirs qui resteront sans doute gravés à jamais.

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C’était l’occasion pour Cassam Mooniaruck,
Shyam Oodunt et Anwar Jackaria
de revivre des souvenirs

Une certaine nostalgie de ce rendez-vous historique, avec Robert Espitalier-Noël et Shyam Oodunt qui portent fièrement le costume offert pour ce déplacement. Une certaine surprise également de voir Édouard Leste, désormais barbu, et Parmanand Ramchurn, qui ne possède plus sa longue chevelure. Des regrets aussi que le groupe ne se trouve pas au complet. David Bathfield, Farook Dinally et Alain Perdrau n’ayant pu répondre à l’appel pour des raisons de santé. Même si physiquement ils ont changé, la solidarité et la bonne humeur sont toujours présentes au sein du groupe. Surtout quand les anecdotes fusent de toutes parts. « Sa boug-la finn bien tir to manzé », lancera ainsi Shyam Oodunt à Robert Vallet, en voyant arriver Parmanand Ramchurn. Ce qui fera éclater de rire Reshad Mohun, Mukesh Ramrakha, Cassam Mooniaruth et Anwar Jackaria, occupés de leur côté à revoir les photos de la qualification mauricienne aux dépens de la Tanzanie au mythique stade George V le 14 juin 1973. Comme celle de Mamade Elahee porté en triomphe par Sylvio Jatha et Farook Dinally.

45 ans après, la solidarité existe encore.
Robert Espitalier-Noël et Raoul Maurel
aidant Parmanand Ramchurn à se rendre sur le terrain

Certes, l’ombre de cet entraîneur humble mais ô combien respecté a plané lors de ces retrouvailles. « Au cours de cette rencontre cruciale face à la Tanzanie, il m’avait demandé de même qu’à Farook Dinally d’effectuer notre entrée sur le terrain. Cela m’avait surpris, car il ne restait que cinq minutes à jouer. Toutefois, en fin stratège, Mamade savait qu’il pouvait compter sur nous pour l’épreuve des tirs au but. Farook et moi n’avions pas trahi sa confiance », se souvient Serge Munso. Afin de rendre hommage à Mamade Elahee, son fils, Anwar, était un invité lors de cette journée de retrouvailles. « Mon père était aux commandes d’une sélection qui s’était retrouvée parmi les huit meilleures équipes africaines. Cet exploit n’a pu être égalé jusqu’ici. L’État et la Mauritius Football Association doivent avoir une certaine reconnaissance pour ces joueurs qui ont agi comme des ambassadeurs », soutient Anwar Elahee qui, du haut de ses onze ans à l’époque, était présent au stade, tout près du banc de la sélection nationale.

Rencontre avec Cassius Clay
Pour atteindre la phase finale, la sélection mauricienne avait dans un premier temps pris le meilleur de celle du Lesotho (0-0 et 5-1), avant de disposer de la Tanzanie (1-1 et 0-0). Il fallait donc la fatidique épreuve des tirs au but pour départager les deux forces en présence. Après deux tentatives infructueuses des visiteurs et le tir manqué de Dany Imbert, Robert Espitalier-Noël avait donc le penalty de la qualification au bout de ses crampons. Aujourd’hui encore, il ressent cette émotion qui l’a envahi au moment du tir.

« J’ai fait le vide autour de moi et il existait comme un silence de cathédrale dans le stade. J’étais conscient de mon énorme responsabilité et j’ai tiré de toutes mes forces, comme à mon habitude, à droite du gardien. Le penalty réussi, je n’ai pas entendu les clameurs de la foule, mais j’ai vu mes coéquipiers courir vers moi. J’étais dans un autre monde. » Édouard Leste était également un héros de cette rencontre, avec les deux penalties repoussés. « J’avais évacué la pression et j’avais mis en pratique ma tactique. À savoir de lire sur le visage de l’adversaire de quel côté il allait tirer. Cela a payé », relate-t-il.

Reste que la phase finale a constitué une tout autre paire de manches pour le XI national, tiré dans le groupe B en compagnie du Congo, de la Guinée et du Zaïre (vainqueur de la compétition). Qui plus est, les moyens d’aborder une compétition aussi élevée étaient pour le moins dérisoires. « Nous n’avions que quatre ballons pour les séances d’entraînement et des tricots troués. Pas de stage à l’étranger, mais une marque de cigarette qui nous avait soutenus financièrement. Tout était rudimentaire », souligne Raoul Maurel, alors vice-capitaine de la sélection et qui possède encore comme souvenir une petite croix d’Égypte. Toutefois, la volonté et l’envie de côtoyer les grands du continent étaient présentes pour feu Roland Augustin et ses coéquipiers. L’histoire retiendra que Maurice, considérée comme le petit Poucet de la compétition, s’était inclinée 0-2 face au Congo, 1-2 face à la Guinée et 1-4 face au Zaïre. L’histoire retiendra également que les deux buts mauriciens étaient l’œuvre de Dany Imbert.

Maurice éliminée sans surprise, mais quel honneur d’avoir croisé le fer par exemple avec des Zaïrois qui devaient par la suite participer à la phase finale de la Coupe du Monde. « Évoluer à un tel niveau était irréel et grandiose. Nous ressentions une telle fierté », relate Shyam Oodunt, qui avait été titularisé d’entrée lors de la rencontre face au Congo.

Aujourd’hui encore, les souvenirs sont vivaces et l’amour du ballon rond toujours attachant. « Certains d’entre nous évoluent au sein d’une équipe de vétérans et nous avons jusqu’ici disputé neuf rencontres dans des villages de l’île. Le public répond à chaque fois nombreux », avance de son côté France Moutou. Reste qu’un des temps forts de l’aventure au pays des pharaons a été pour quelques joueurs plus chanceux d’être pris en photo avec le légendaire Cassius Clay, alors roi des rings. Une anecdote parmi tant d’autres qui devrait être compilée dans les livres d’histoire.

Et si on se donnait rendez-vous pour le jubilé d’or pour en reparler…

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