Blessée lors des inondations de Canal Dayot-Corinne Yue Chan : Une combattante à toute épreuve

En aidant ses voisins lors des inondations de 2013 à Canal Dayot Corinne Yue Chan glisse et chute. Elle se révèle pour poursuivre la coordination entre les sinistrés et les autorités avant de se retrouver à l’hôpital quelques semaines plus tard. Le diagnostique fit était d’un vertèbre écrasé et deux autres déplacés. Quotidiennement elle vit avec des douleurs. Outre son handicap, cette mère de trois enfants fait face à d’autres soucis. Malgré tout, c’est une battante qui nous accueille avec le sourire afin de donner de l’espoir à d’autres.

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Elle en est convaincue : “Dans la vie, rien n’arrive au hasard. Mais au lieu de s’apitoyer sur tous les points négatifs, il faut apprendre à dénicher les côtés positifs pour avancer.” Sans sa canne, rien ne laisse présager que Corinne Yue Chan a un problème à ses deux jambes. Pourtant, il lui arrive très souvent d’être clouée au lit quand la douleur est atroce. A cause des allergies dont elle souffre, elle ne peut trouver de soulagement avec des antidouleurs : “Mem enn panadol mo pa kapav pran.” Depuis 2013, toute sa vie a basculé. Mais, sa vie n’était pas pour autant si rose auparavant. N’empêche, les quelques pas que cette habitante de Canal Dayot arrive encore à faire, sont pour sa famille car : “Je veux avancer et je ne peux pas rester les bras croisés.”

Une femme dans la métallurgie.

Corinne Yue Chan se décrit comme une personne débrouillarde. Même en étant la seule fille de sa famille, elle n’a pas hésité à se faufiler dans l’atelier de son père, soudeur de profession. “J’ai appris à travailler et manipuler le fer sans problème. J’étais même en mesure de créer des dessins, car à l’époque le préfabriqué n’existait pas encore. Je suis capable de monter sans hésitation une porte en accordéon du début à la fin. Mo ti suiv mo papa ziska lor santie pou ed li. Seki konn mwa byen kone ki zame mo per. Monn konn impe de tou, koup dibwa, monte desann trase koupe kan bisin.”

Après le secondaire, elle décide de s’inscrire à des cours en puériculture, même si son premier choix était la coiffure. Titulaire d’un certificat de l’UNICEF, elle décroche de l’emploi dans une école maternelle. Pendant près de 15 ans, elle travaille avec de nombreux enfants de Pointe aux Sables, Vallejee et même ceux du Centre d’Éveil. Elle finit par tout arrêter à la naissance de son troisième enfant. “Je sentais le besoin de lui consacrer plus de temps.” Une fois cette dernière suffisamment indépendante, celle qui ne peut jamais resté à rien faire se trouva un nouveau job dans un atelier de polissage de granite.

Squatteuse depuis 2003

Jusqu’ici, son parcours ne semblait pas difficile. Sauf qu’en fait, Corinne Yue Chan a une manière bien à elle pour aborder ses périodes sombres. Depuis maintenant dix-sept ans, elle squatte un lopin de terre se trouvant derrière le terrain familial.  Quand je me suis mariée, j’étais dans l’incapacité de trouver ou de payer un logement. Ne sachant pas où habiter, j’ai construit une petite maison en tôle mais avec la ferme intention d’économiser et de faire avancer ma situation.” Pour se faire elle nettoie et défriche ce bout de terre sur trouvant sur une pente d’une petite colline pour y planter des arbres fruitiers. 36 manguiers, mais aussi des arbres de koronsol, de bilimbi, de jamblon, de papayes, de bergamote, de goyaves, etc. Toute une variété de fruits rares sans oublier son élevage de poules, de canards et de cabris. Paralèllement, elle a entrepris plusieurs démarches administratives auprès du ministère des Terres pour régulariser sa situation, mais en vain “On a appris que ce n’était pas un crownland mais un rejet land. Des officiers sont venus visité. Puis ils ont envoyé une lettre disant qu’ils reviendraient vers moi mais rien n’est fait jusqu’à l’heure.”

Une chute aux lourdes conséquences

Lors des inondations de 2013, sa maison subit aussi des dommages. C’était superficiel comparé à mes autres voisins”, précise cette habitante de Canal Dayot. Raison pour laquelle elle s’est empressée de leur porter son aide. “C’est dans ma nature, je pouvais pas rester insensible face à tant de détresse. J’étais un peu devenue la porte-parole des sinistrés. Je les ai poussés à descendre dans la rue pour avoir de l’aide des autorités. Nou finn lager ansam ek lerla ki bann parlmanter ti vinn isi. J’ai aussi agi en tant que coordinatrice.”

Dans ce cadre, alors qu’elle arpente les ruelles, Corinne Yue Chan glisse et chute lourdement. Elle se relève sans prêter plus attention et continue à canaliser les volontaires avant de reprendre son travail. “À un moment j’ai ressenti que mon corps ne faisait bizarrement mal. J’ai été à l’hôpital et on m’a misz au repos pour une semaine. Même si je sentais que quelque chose ne fonctionnait pas bien, j’ai repris le boulot après ce sick leave.”

Mais c’était sans savoir que cette étrange sensation allait s’aggraver : “Un après-midi alors que j’étais dans le messroom du boulot, je n’ai pas pu me lever de ma chaise. J’étais clouée sans pouvoir bouger un pouce. Une douleur atroce à tel point qu’on a du appeler les pompiers pour venir me sortir.” Elle séjourna trois mois à l’hôpital où le diagnostique sera très dur à encaisser : un vertèbre écrasé et deux autres déplacés.

Une battante malgré tout

A la même période, le père de Corinne Yue Chan décède tandis que son mari se voit dans l’obligation de rembourser le prêt d’un ami pour lequel il s’était porté garant. “J’ai fait une grave dépression. Mo ti nepli anvi sorti lor lili. Pa kapav leve telma douler pe dominn mwa. J’étais révoltée contre moi-même car étant toujours débrouillarde dans la vie, je me retrouvais handicapée.”

Elle parvient finalement à reprendre le dessus “Mes enfants sont venus me dire qu’ils étaient heureux de m’avoir à la maison. Ca me donné du courage. Ca m’a aidée à prendre conscience de mon importance dans leur vie et que je ne pouvais pas me laisser abattre par cette grave blessure. Je me suis forcée à me lever tout doucement. J’ai reçu énormément de soutien de part et d’autres. Ma famille, mes belles-sœurs, ma mère, mon mari surtout.” Dès lors chaque matin, Corinne Yue se motive : “Mo pan sa douler la mo poz li dan enn kwin, mo fer seki bisin fer ek mo repran li kan mo mont lor lili.” 

Derrière son sourire, elle cache sa douleur. A 41 ans, c’est un à un qu’elle surmonte les obstacles  » Ce n’est pas dans ma nature de ne pas être en mesure de subvenir aux besoins de mes enfants. J’ai commencé à vendre des achards et mettre mes fruits à sécher. Kan lapli tombe pa kapav fer zasar, lerla mo komans fer hakien ek ban lezot ti snack. J’arrive à arrondir permettent ainsi les fins de mois.”

Nanye na pa fer mwa per

La détermination de cette ancienne volleyeuse de Vallejee Citizen ne faiblit jamais. Pas même lorsque sa maison prend feu en 2018 et qu’elle a du tout reconstruire à zéro. “Mo rappel kan mo ti lekol ti apran nou ki nigativ plus nigativ fer twa positif. Depuis je garde précieusement ce concept. Dans chaque épreuve qui survient dans ma vie, je veille à trouver du positif.” Tous ces malheurs ont ainsi ressoudé les liens au sein de son foyer. Corinne Yue Chan espère encourager d’autres à ne jamais baisser les bras. Aujourd’hui encore plus elle n’a peur de rien. Elle nous le confirme en nous interprétant quelques paroles d’une chanson qu’elle a écrite : « Mo lespri li an pe, mo dan la zwa, nanye na pa fer mwa per ».

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