Hong Kong: les militants pro-démocratie redoutent la « terreur blanche »

Des hommes ont soudainement sauté sur Stanley Ho, lui écrasant les deux mains à coups de barres de fer: une attaque qui n’a rien d’inhabituel à Hong Kong où des militants pro-démocratie se disent menacés par une « terreur blanche ».

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Depuis fin août, huit figures hongkongaises du mouvement en faveur de la démocratie ont subi les coups d’inconnus.

Les auteurs de ces agressions sont soupçonnés d’appartenir aux triades –des gangs violents– qui se seraient ralliées à Pékin dans la crise politique affectant depuis cinq mois l’ex-colonie britannique, la pire depuis sa rétrocession à la Chine en 1997.

Parmi les victimes se trouvent des militants à l’origine des manifestations, des parlementaires de l’opposition, des dirigeants de mouvements étudiants et des candidats aux futures élections.

Ho, un syndicaliste de 35 ans, a été agressé fin septembre par au moins trois personnes à Sai Kung, une région rurale de l’est de la mégapole, où il est candidat à des élections locales face au parti pro-Pékin qui domine ce district depuis des décennies.

« La raison de cette attaque peut être liée à deux choses: les prochaines élections et l’actuel mouvement » pro-démocratie, a expliqué M. Ho à l’AFP.

« Des personnes puissantes créent +une terreur blanche+ en collaboration avec des criminels », affirme-t-il, un bras encore dans le plâtre.

L’expression « terreur blanche » a été employée à travers les âges pour évoquer des périodes de répression politique. Mais à Hong Kong, elle est empruntée à l’île voisine de Taïwan.

La « Terreur blanche » y désigne les décennies de répression sous le règne de Tchang Kaï-chek et de son fils, de 1949 jusqu’à 1987 et la levée de la loi martiale.

– Attaques ciblées –

Hong Kong a connu au fil des mois une escalade de la violence, tant du côté des pro-démocratie que des pro-Chinois.

Alors qu’aucune issue à la crise ne se profile, des manifestants pro-démocratie ont violemment battu ces dernières semaines des personnes ne partageant pas leurs opinions. Ces déchaînements de violence s’apparentent à des accès de colère spontanée des manifestants.

Les figures du mouvement pro-démocratie ont, de leur côté, fait l’objet d’attaques nettement plus ciblées.

La semaine dernière, Jimmy Sham, leader d’une organisation à l’origine des plus grandes manifestations de ces derniers mois, a été laissé dans une mare de sang après avoir été violemment agressé à coups de marteau par des inconnus.

Cinq victimes ont signalé des agressions à la police mais seuls trois hommes ont été arrêtés jusqu’ici, pour le cas de M. Sham.

Isaac Cheng, un étudiant de 19 ans appartenant au parti politique pro-démocratie Demosisto, a été battu par trois hommes début septembre devant chez ses parents après avoir organisé une grève dans les établissements scolaires.

Il doute de la capacité de la police à résoudre cette affaire, la soupçonnant de partialité.

Des accusations réfutées par police qui se dit déterminée à poursuivre tous les crimes, quelle que soit leur motivation politique.

Mais la réputation des forces de l’ordre a été mise à mal en juillet quand des policiers ont mis plus de 45 mn à intervenir après l’attaque de manifestants antigouvernementaux par un groupe d’hommes à Yuen Long, près de la frontière chinoise.

– Ne pas céder à la peur –

Des policiers ont été filmés laissant des hommes armés de bâtons quitter les lieux.

Rejetant ces accusations, la police affirme avoir interpellé 34 personnes dans le cadre de cette affaire, certaines ayant des liens avec les triades.

Hantés par la peur et ne faisant pas confiance aux forces de l’ordre, des militants pro-démocratie organisent leur propre protection, avec des moyens limités.

« Tout ce que je peux faire, c’est être plus prudent et recruter plus de volontaires pour ne pas me retrouver seule quand je mène ma campagne dans la rue », explique Janelle Leung, une candidate aux élections locales qui a été attaquée.

Max Chung, à l’origine d’un rassemblement organisé après les événements de Yuen Long, a été battu fin août. Il s’est depuis équipé d’armes défensives et ne communique plus son emploi du temps.

Davin Wong, ex-leader d’un syndicat étudiant, est parti vivre à l’étranger après avoir été attaqué.

Mais la majorité des victimes refusent de se laisser intimider.

« Je crains que de telles attaques ne deviennent plus fréquentes et graves », s’inquiète Roy Kwong, un parlementaire pro-démocratie assailli le mois dernier par un groupe d’hommes.

« Un des moyens pour dépasser la peur est de continuer à mener une vie normale et montrer (…) que nous ne sommes pas intimidés », a-t-il ajouté.

Cheng, de Demosisto, veut croire que ceux qui aspirent à gouverner en faisant régner la peur perdront sur le long terme.

su/jta/juf/lch

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