Jeux paralympiques 2020 : le rugby-fauteuil, un sport qui « casse les clichés »

Comme des boucliers vikings, les roues rondes s’entrechoquent dans un bruit mat, entre feintes, accélérations et demi-tours fulgurants: le rugby-fauteuil est spectaculaire et pour ses joueurs, il n’y a pas mieux pour bousculer les préjugés sur le handicap.

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« C’est un sport qui casse les clichés, où on dépasse nos limites » explique à l’AFP Christophe Salegui, 35 ans, joueur de l’équipe de France de rugby-fauteuil qui participe actuellement aux Jeux paralympiques de Tokyo.

« C’est clairement un de ces sports qui intéresse les gens à cause de son étrange nature, les collisions et les contacts », ajoute Stuart Robinson, 39 ans, un membre de l’équipe de Grande-Bretagne.

« Je pense qu’il suffit de regarder (un match, NDLR) pour se rendre compte qu’on est loin d’être fragiles, qu’on n’a pas peur d’aller au contact et de se taper un peu dessus », complète Zak Madell, 27 ans, le meneur de l’équipe du Canada.

Il arrive fréquemment qu’un fauteuil se soulève lors d’un puissant choc frontal, voire chute avec son occupant. Lequel est relevé avec précaution par le staff avant de retourner prestement au combat.

– « Un jeu d’échecs » –

Pour marquer des points, il faut franchir la ligne de but adverse avec le ballon (rond et non ovale, pour faciliter les passes et les rebonds) dans les mains, sur un parquet de basket (28×15 mètres).

Les attaquants n’ont que 12 secondes pour faire franchir la ligne médiane au ballon et doivent marquer un essai en 40 secondes. Passé ce délai, le ballon est remis à l’adversaire.

Malgré des apparences de mêlée parfois confuse pour un spectateur novice et l’ancien nom provocateur de ce handisport inventé au Canada dans les années 1970 (« murderball », c’est-à-dire balle meurtrière), le rugby-fauteuil est en réalité « très technique et très tactique », précise Christophe Salegui.

« C’est un jeu d’échecs, l’objectif c’est de se placer avant l’adversaire », renchérit Olivier Cusin, l’entraîneur de l’équipe de France depuis 11 ans.

Pendant les matchs, il crie régulièrement à ses joueurs de mystérieuses combinaisons de chiffres comme « 3-3-2-0! ».

En fait, il leur annonce les rotations dans l’équipe adverse, pour que chacun adapte son rôle en fonction.

En rugby-fauteuil, chaque joueur est classé par points selon son degré de handicap: de 0,5 point (pour le plus pénalisé) à 3,5 points.

Une équipe ne peut totaliser plus de 8 points sur le terrain, mais faire entrer une joueuse augmente le plafond de 0,5 point.

– Fauteuils à la Mad Max –

Si le rugby-fauteuil est donc un sport mixte, les hommes sont ultra-majoritaires et certaines équipes à Tokyo ne comprennent aucune femme, comme la France.

« C’est un sport relativement nouveau en France, donc il n’y a pas beaucoup de licenciés. Il y a une petite dizaine de filles qui jouent au rugby-fauteuil en France, mais le très haut niveau c’est beaucoup de travail, pour l’instant on n’a pas trouvé la perle rare. Mais on la cherche! » assure Olivier Cusin.

Les joueurs ont généralement quelques petits bleus à la fin et de longues séances de massage sont nécessaires après chaque match.

Mais « c’est surtout les fauteuils qui sont mis à rude épreuve. Ce sport a quand même été fait pour préserver l’intégrité des joueurs, qui sont harnachés (…). Je n’ai jamais vu une blessure grave », souligne M. Cusin.

Sortes d’auto-tamponneuses revisitées à la sauce Mad Max, cette franchise de films d’action post-apocalyptiques mettant en scène de fougueux engins mécaniques, les fauteuils de ce sport sont des personnages à part entière.

Il en existe deux types: les « offensifs », aux bords avant arrondis pour mieux se faufiler et aux roues plus larges pour avoir davantage de puissance une fois lancés, et les « défensifs », munis d’une grille à l’avant, pour mieux contrer les attaquants d’en face.

Et comme les joueurs, les fauteuils sont préparés avant chaque match et soignés après. Chaque équipe à son mécano attitré, surtout pour entretenir les roues.

« Celle-ci est tordue, elle a plié là », montre Adrien Corompt, le mécano de l’équipe de France, dans laquelle évolue son fils Christophe. « Les chocs, les chocs… mais c’est le sport ».

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