Lilowtee Rajmun-Joosery (directrice générale de la Mauritius Export Association) : « L’exportation ne pourra pas se permettre une fermeture totale en cas d’une 2e vague »

La COVID-19 a été un coup dur pour les entreprises tournées vers l’exportation. En vue de soutenir les opérations malgré les difficultés au moment où la pandémie battait son plein à Maurice, les entreprises ont manœuvré, comme elles le peuvent, afin d’être en mesure d’assurer la continuité de leurs activités. Alors que la reprise se fait graduellement, une éventuelle deuxième vague de la COVID-19, qui menace nos principaux marchés d’exportation, est réelle. Si Maurice fait face à une autre vague de la pandémie, l’exportation ne pourra pas se permettre une fermeture totale étant donné que se secteur est un pourvoyeur important en devises étrangères.

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Quelle est la vraie situation des entreprises orientées vers l’exportation post-COVID-19 ?

La situation demeure difficile car tous nos marchés américains et européens sont affectés par la pandémie. Mais il n’empêche que les magasins sur ces marchés sont toujours ouverts faisant rouler leurs économies. Ceci est une bonne retombée pour Maurice. De ce fait, nous continuons à obtenir des commandes. Même si la situation est difficile, les commandes sont présentes. Ceci est très important. Nous travaillons avec des clients dans l’e-Commerce. D’ailleurs, nous avions déjà développé une relation avec ces derniers, dont ASOS. Même pendant la pandémie, nous recevions toujours des commandes. L’e-Commerce a d’ailleurs grimpé pendant le confinement. Les commandes sont intéressantes aujourd’hui mais elles ne sont pas du même niveau que l’année dernière. Nous nous attendions aux 30 à 40% mais elles sont supérieures à cela. Certains secteurs affichent complet alors que pour d’autres, tel n’est pas le cas. Même pour le textile, les commandes des t-shirts nous parviennent. Par contre, s’agissant des chemises, les commandes ne sont pas aussi importantes vu que plusieurs personnes travaillent chez elles. L’exportation, elle, se porte bien mais pas autant que l’année dernière. Cependant, elle est relativement mieux au regard de nos prévisions. De ce fait, les devises continuent à entrer dans le pays. Nous sommes une économie tournée vers l’exportation et les deux secteurs qui injectent les devises dans l’économie sont l’exportation et l’hôtellerie. Si l’hôtellerie est à plat, le secteur de l’exportation arrive quand même à attirer les devises. Je crois qu’en termes de visibilité, nous avons des commandes pour les deux prochains mois. Nous constatons que les clients ne veulent pas s’engager sur le long terme à cause de la COVID-19. Mais ce qui est bien, c’est que le pays parvient à rattraper les commandes. Étant donné que nous sommes petits, nous travaillons sur des commandes moins importantes que le Bangladesh et nous répondons vite à la demande du client. Nous répondons à la flexibilité que recherche celui-ci.

Quels sont les nouveaux défis post-COVID-19 ?

Nous nous situons dans une très grande incertitude, à deux niveaux. Premièrement, nos marchés expérimentent soit une deuxième ou une troisième vague. Nous ne savons pas ce qui se produira demain. Nous ne savons pas comment réagiront les marchés. Nous ne savons même pas ce qui se passera lorsque les frontières s’ouvriront.

Une pression est-elle exercée pour l’ouverture des frontières ?

Pas à notre niveau. Le fait que nous exportons par voie maritime, les cargos partent. Par cette voie, les opérations n’ont pas cessé et les prix n’ont pas augmenté. Sur le plan de la voie aérienne, nous avons deux « cargos freighter ». Nous continuons à desservir nos destinations correctement. Je crois que l’hôtellerie subit davantage de pression par rapport à nous. La circulation des marchandises n’est pas un problème contrairement à la circulation des gens. Toutefois, en tant que Marketing People, nous voyageons. Mais avec la COVID-19, nous avons appris à travailler virtuellement. Ainsi, nous pouvons confirmer les commandes.

Les exportations ont baissé de 81% en avril, certainement à cause du confinement. Qu’ont fait les exportateurs pour redynamiser le secteur ?

Nous nous attendions à cette baisse de 81% dans nos exportations à cause du confinement, qui a commencé le 19 mars et s’est terminé le 15 avril. Durant cette période, nous n’avions eu aucune activité. Mais, après le confinement, ce niveau a augmenté à 59%. D’ailleurs, nous avions fait des représentations que des secteurs doivent redémarrer pendant le confinement. Le Royaume-Uni, qui est notre client principal pour le thon en conserve, nous exigeait du thon car les gens en cherchaient. Nous avons dû faire des représentations auprès gouvernement à ‘relâcher’ ce secteur pour qu’il commence à opérer car le gouvernement britannique en demandait pour ses consommateurs. En ce moment, le secteur de l’exportation tourne autour des 85% sauf la bijouterie où nous n’avons pas autant de commandes. Et pour importer les matières premières, elles doivent passer par des coffres-forts dans les aéroports, qui sont fermés.

Une deuxième vague est redoutée. Vos opérateurs sont-ils parés à cette éventualité ?

Au niveau de la MEXA, un travail a déjà été enclenché. Il est très important que l’on conserve un protocole sanitaire car il nous faut nous attendre au pire. Allons dire que les frontières sont ouvertes et de nouvelles contaminations sont enregistrées, nous n’allons pas pouvoir cesser nos activités. Je le répète. Notre stand est relativement fort dessus. L’exportation ne pourra pas se permettre une fermeture totale en cas d’une deuxième vague. Si nous comparons le premier confinement, nos marchés étaient fermés. Mais dans l’éventualité d’une deuxième vague, nous ne pourrons pas cesser nos activités car nos marchés ont appris à vivre avec la COVID-19. Ils s’adaptent. Si nos marchés poursuivent leurs opérations, nous ne pourrons pas nous arrêter car nous avons déjà un momentum et une confiance au regard de nos clients. Nous devons continuer à prendre des commandes. Si ce secteur ne fonctionne pas, nous n’aurons pas de devises et ce sera une crise pour l’économie mauricienne. Je crois que le gouvernement devra savoir prendre une ‘balanced decision’ quant à ce qu’il veut faire car l’aspect économique et social doit être pris en compte.

Depuis l’apparition de la COVID-19 à Maurice, plusieurs femmes ont été licenciées par leur entreprise. Cette situation ne vous interpelle-t-elle pas ?

Nous faisons tout pour préserver l’emploi. Mais, si certaines ont perdu leur emploi, nous travaillons pour qu’elles regagnent leur poste ou qu’elles soient redéployées ailleurs.

 

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