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Les nouveaux rhums – Saveurs locales et grands crus

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Les nouveaux rhums – Saveurs locales et grands crus

Le rhum mauricien ne se cantonne plus aux tavernes et boutiques du coin. Ce breuvage trouve sa place dans les salons et n’a rien à envier à un scotch, un brandy, un cognac, à d’autres boissons dites nobles. Il décroche même de prestigieuses récompenses à l’international. Qu’il soit blanc, ambré, aromatisé, épicé, arrangé ou vieux, le rhum local se diversifie, grâce à plusieurs distilleries locales proposant des produits qualitatifs sur le marché local et à l’exportation.

Face à une telle diversité, comment s’y prendre pour reconnaître un bon rhum ? Pour les producteurs, dont Grays (Terra), Médine Distillery et Oxenham, “c’est assez complexe et difficile à dire. On parle là de rhums de connaisseur et de caractère. Comme pour toutes les autres boissons, tout dépendra de l’expérience que recherche la personne et de ce qu’elle veut mettre dans son verre”.

Chaque personne est libre de goûter et d’apprécier un rhum à sa manière. Certains préfèrent le rhum blanc classique, d’autres recherchent une version plus légère, douce, corsée ou forte. “Notre rôle est d’offrir plusieurs variétés pour satisfaire un maximum de personnes. Ceux qui découvrent ou redécouvrent les saveurs du rhum seront en mesure de savoir si le breuvage est à la hauteur de leur attente.” À Maurice, on trouve principalement deux variétés de rhum : à base de mélasse ou de pur jus de canne.

Direction Grays à Beau Plan, la deuxième plus ancienne distillerie de l’île, pour découvrir les étapes de fabrication du rhum de mélasse. Elle a été la première après le changement dans la réglementation en 2001 à travailler sur l’élaboration d’un rhum haut de gamme. “Nous produisons aujourd’hui 7 millions de litres d’alcool pur extra-neutre à 100%, soit une capacité de 30,000 litres par jour”, précise Florence de Coriolis, Brand Coordinator. Le vieillissement est sous la charge de Loïc Lionnet, assistant maître de chais.

Cédric Oxenham

Les étapes de fabrication.

Trois grandes étapes aboutissent à la fabrication du rhum. Elles sont plus ou moins les mêmes pour le rhum à base de mélasse ou de pur jus de canne : la fermentation, la distillation et la maturation (vieillissement). La mélasse est un liquide visqueux brun, encore très riche en sucre (jusqu’à 40%), tandis que le taux d’alcool varie de 40° à 60° pour le jus de canne.

La fermentation est un procédé au cours duquel le sucre est transformé en alcool, avec l’apport de levures. La distillation est l’opération par laquelle on extrait l’alcool du vin alcoolique résultant de la fermentation. Elle se fait dans les colonnes à distiller ou dans un alambic. Chez Médine, “nous utilisons les deux techniques, mais aussi un assemblage des deux. De manière générale, comme chez les autres distilleries de Maurice, la fermentation au pur jus de canne fraîchement pressé ou à la mélasse est assurée avec des levures sélectionnées, permettant à une lente fermentation pendant 18 à 24 heures”, indique Anouchka Roy, Senior Brand Executive. Ceci afin de libérer l’alcool et les arômes pour le processus de distillation.

Plusieurs étapes minutieuses sont nécessaires lors de l’élaboration d’un rhum haut de gamme chez Grays

Chez Oxenham, qui s’est lancé dans la production depuis 2010, la distillerie a la particularité d’être le seul rhum de mélasse fait en alambic à Maurice. “Notre approche tient à notre héritage vinique. On travaille la matière première comme on travaille le vin : une fermentation à basse température lente et contrôlée, la distillation dans des petits alambics de 400 litres. C’est ce qui donne du corps au produit”, explique Cédric Oxenham, l’un des quatre œnologues que compte la société.

Puis vient l’étape de maturation. Entre dix et dix-huit mois pour le rhum blanc, dans des cuves en inox. Le vieillissement se fait dans des fûts en chêne, qui donnent du caractère au rhum.

Tous les producteurs locaux font une sélection minutieuse des fûts, qui permettent de révéler les arômes et laissent aux rhums d’exprimer pleinement leur intrigante complexité. Limousin, cognac, américain et bourbon pour Grays, entreposés dans un chai pour un minimum de trois ans pour les rhums bruns et jusqu’à 25 ans pour les rhums vieux. C’est ce procédé qui a permis la naissance de la marque phare de Grays, New Grove. En fût de xérès, de cognac et de chêne de bourbon et de muscats chez Oxenham pour sa gamme de rhums Bougainville, pour développer des arômes exotiques intenses de caramel, de miel, d’agrumes confits et d’épices. Pour son rhum de jus de canne, Oaks & Ames, la distillerie a choisi des barriques de bourbon, de sauternes, ainsi que des barriques neuves. Quant aux rhums de Médine, ils sont vieillis dans deux chais, où s’empilent les fûts, principalement de bourbon ou qui ont servi pour le cognac et le whisky. Grâce à des techniques de vieillissement et d’assemblage, Médine a permis la création de suées exceptionnelles, Pink Pigeon et Penny Blue.

Les types de rhums

Le rhum est produit dans plus de 80 pays, selon des méthodes très différentes, avec de nombreuses variations de fermentation, différents types de distillation, une myriade de styles de mélanges et pléthore de techniques de vieillissement. Qu’on l’appelle rhum (pour le rhum français), rum (anglais) ou bien ron (espagnol), la plupart des rhums peuvent être classés dans une ou plusieurs catégories distinctes, sous l’appellation agricole ou traditionnelle. Florence de Coriolis précise : “Le rhum agricole est une catégorie spécifique de rhum, fabriqué principalement dans les territoires français. À Maurice, on utilise plutôt le terme “rhum de style agricole”.”

Le rhum blanc ou clair : Le rhum blanc est clair, a généralement une saveur plus douce et un corps plus léger que le rhum doré ou foncé. Ces types de rhum léger sont le plus souvent utilisés pour créer des cocktails, qui n’ont pas besoin d’une saveur de rhum gras. Le rhum blanc est populaire dans les cocktails courants comme le Daiquiri, le Mojito et la Pina Colada. Beaucoup de cocktails utilisent un rhum blanc ou léger, un rhum doré ou un rhum foncé ou épicé.

Le rhum ambré ou doré : Le rhum s’adoucit dans les barriques avec le temps, il prend des teintes ambrées ou dorées. Ces rhums dorés présentent généralement un profil plus savoureux que les rhums blancs ou clairs. Les rhums dorés sont utilisés pour faire des cocktails dans lesquels une saveur plus forte est désirée. Le rhum doré est souvent vieilli plusieurs années, et certains fabricants ajoutent aussi quelques colorants pour lui donner de la consistance. Des arômes subtils de vanille, d’agrumes, de caramel, entre autres, peuvent être présents selon le type de barriques utilisées dans le processus de vieillissement. Le rhum ambré est souvent apprécié pur ou avec de la glace, et est aussi utilisé dans les recettes de cocktails. “Il est populaire dans les recettes de pâtisserie comme le baba au rhum et la préparation de desserts”, souligne Cédric Oxenham. Ces rhums moyennement corsés sont souvent très abordables par rapport aux rhums plus âgés, qui ont mûri pendant de nombreuses années. Les rhums vieux sont des produits vieillis de nombreuses années dans des fûts de chênes.

Le rhum vieux, foncé, dark : Le terme “rhum foncé” n’a sur le papier aucun sens. Beaucoup de rhums vieillis sont appelés “rhums vieux”, “rhums foncés”, pour les distinguer par leur couleur, explique Loïc Lionnet, assistant maître de chais chez Grays. L’étiquette d’un rhum foncé est souvent attribuée à une gamme de rhums qui ne sont pas clairs. Les rhums vieux sont souvent vieillis en fûts de chêne pendant de longues périodes. Utilisés dans les recettes de cocktails, ce sont des rhums robustes qui offrent un contraste de profils plus savoureux que les rhums blancs ou les rhums aromatisés et épicés.

Les rhums noirs : Le rhum le plus foncé, le plus riche et le plus corsé est souvent appelé rhum noir ou dark rum, offrant une essence tropicale audacieuse aux recettes. Les rhums noirs sont des ingrédients populaires utilisés pour équilibrer les saveurs des boissons avec celles du rhum doré, blanc et épicé. La plus grande partie du rhum est fabriquée à partir de mélasse, puisque le liquide épais, foncé et sucré, reste dans le processus de fabrication du sucre cristallisé. Les rhums noirs conservent une grande partie de cette saveur riche de mélasse et de caramel et sont parfois colorés avec du caramel brûlé pour obtenir des teintes foncées uniformes. Le rhum noir est essentiel à de nombreuses utilisations dans l’industrie de la boulangerie et de la confiserie, conférant des saveurs sucrées et épicées audacieuses aux gâteaux, bonbons, desserts et sauces. Loïc Lionnet précise que les fûts utilisés pour faire mûrir les rhums noirs sont souvent cuits lourdement, ce qui confère au liquide une grande partie de la forte saveur du bois. Ils peuvent aussi contenir des restes de mélasse.

Le rhum premium, rhum âgé : Beaucoup de rhums fins sont vieillis en fûts de chêne pendant des années pour obtenir un profil aromatique supérieur. L’interaction de l’esprit et du bois a un effet positif sur la finesse, la richesse et les saveurs subtiles du rhum. Les fûts de chêne calcinés peuvent donner des tons sombres. Les fûts de cognac et de xérès peuvent produire une teinte rougeâtre. Les rhums vieillis représentent souvent les meilleurs exemples de rhums mûrs d’une distillerie, souvent mélangés pour obtenir une complexité et des profils de saveurs distinctifs. “Le coût de stockage et la perte d’une partie du rhum des barriques par évaporation augmentent le coût de production des rhums âgés”, confie Laurence de Coriolis, de Grays, le pôle commercial principal du groupe Terra. Ces rhums plus anciens et plus matures sont souvent dégustés purs ou sur glace comme un bon cognac ou un scotch single malt. Cédric Oxenham précise que “de nombreuses recettes de cocktails exigent l’inclusion de ces types de rhum savoureux et riches”. Les rhums premiums prennent généralement des couleurs plus foncées et plus riches en raison du temps passé en barrique.

Le rhum Vintage, millésimé : Alors que la plupart des rhums vendus sont mélangés à partir de sources multiples avant la mise en bouteille, certains rhums uniques sont mis en bouteille à partir de millésimes spécifiques de production. Les marques de rhum maison préservent et stockent une quantité de rhum d’une seule année de production, font vieillir le produit, avant de le mettre en bouteille lorsque la maturité est à son maximum. Selon Anouchka Roy, “ces types de rhums ont tendance à être des éditions limitées, qui sont précieuses pour les collectionneurs et les amateurs de rhum sérieux. D’où l’intérêt d’accroître notre présence sur le marché international”. Comme dans la production de grands vins, certaines années la récolte est abondante, tandis que d’autres le sont moins. “La quantité de sucre contenue dans la canne brute peut varier d’une année à l’autre, en raison des variations des précipitations”, explique Cédric Oxenham. Les différences qui en résultent sont notées par le maître distillateur, et le processus de maturation est contrôlé pour obtenir le profil de saveur idéal pour cette année de millésime. Les rhums millésimés sont étiquetés avec l’année de distillation et l’endroit où ils ont été distillés.