Santé — ANDROPAUSE, ce passage silencieux qui bouleverse la vie des hommes

On parle souvent de la crise de la cinquantaine, ce moment de doute et de remise en question chez les hommes. Mais derrière les clichés, une réalité biologique bien moins connue mérite qu’on s’y attarde : l’andropause, ou la baisse progressive du taux de testostérone avec l’âge. Un phénomène naturel, mais encore trop souvent ignoré, qui peut transformer profondément le corps, l’humeur, la libido et la qualité de vie.

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Un phénomène naturel… et méconnu

Contrairement à la ménopause chez la femme, qui survient brutalement avec l’arrêt des règles, l’andropause est plus discrète, plus lente, mais tout aussi réelle. Elle touche environ 1 homme sur 5 à partir de 50 ans, et jusqu’à la moitié des hommes après 70 ans.

La testostérone, hormone sexuelle masculine produite dans les testicules, joue un rôle crucial : elle agit sur la libido, les muscles, les os, la production de spermatozoïdes, l’énergie, la mémoire… et même l’humeur. Dès la trentaine, sa production commence à diminuer, doucement mais sûrement, à raison de 1 à 2 % par an. Ce déclin s’accentue avec le temps.

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Mais alors, comment reconnaître l’andropause ? Et surtout, que faire quand elle s’installe ?

Des signes qui ne trompent pas

Chez certains hommes, les changements sont nets. Chez d’autres, plus subtils. Souvent, les premiers signes sont attribués au stress, à la fatigue ou au simple vieillissement. Pourtant, certains symptômes doivent alerter :

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  • Une baisse du désir sexuel, accompagnée parfois de troubles de l’érection

  • Une fatigue persistante, même en dormant bien

  • Une prise de poids, surtout autour du ventre

  • Une perte de muscle, de force et d’endurance

  • Des troubles du sommeil : insomnies, réveils fréquents

  • Des sauts d’humeur, de l’irritabilité, voire de l’anxiété ou une déprime

  • Des difficultés à se concentrer ou à mémoriser

  • Une fragilité osseuse grandissante, avec un risque de fractures

Tous ces signes, pris séparément, peuvent sembler anodins. Ensemble, ils dessinent une image plus claire de ce que vivent de nombreux hommes – souvent en silence.

Pourquoi si peu d’hommes consultent ?

La réalité, c’est que beaucoup d’hommes hésitent à en parler. Par gêne, par peur de paraître faibles, ou simplement parce qu’ils ne savent pas que l’andropause existe. Et même lorsqu’ils consultent, les médecins ne posent pas toujours immédiatement ce diagnostic, tant les symptômes peuvent se confondre avec d’autres problèmes.

Un simple bilan sanguin, réalisé de préférence le matin, permet pourtant de vérifier le niveau de testostérone. Si celui-ci est anormalement bas, le diagnostic peut être confirmé. Des questionnaires comme l’ADAM (pour « Androgen Deficiency in Aging Males ») aident aussi à évaluer les symptômes.

Pas une maladie, mais un tournant à accompagner

Il ne s’agit pas d’une maladie, mais d’une transition hormonale. Et comme toute transition, elle demande de l’écoute, de l’adaptation… et parfois un accompagnement médical. Car une baisse trop marquée de testostérone peut avoir des conséquences plus graves, comme un risque accru de maladies cardiovasculaires, de diabète de type 2, d’ostéoporose, ou encore une dégradation de la santé mentale.

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Que peut-on faire ?

La bonne nouvelle, c’est qu’on peut agir. Et cela passe d’abord par le mode de vie.

1. Bouger plus, manger mieux

L’activité physique est un allié de poids : elle aide à maintenir la masse musculaire, régule le poids, et soutient l’humeur. Une alimentation équilibrée, riche en légumes, protéines de qualité, bonnes graisses, et pauvre en sucres rapides, contribue aussi à un meilleur équilibre hormonal.

2. Gérer le stress, bien dormir

Le stress chronique et le manque de sommeil pèsent lourd sur la production de testostérone. Apprendre à décrocher, à ralentir, à mieux gérer ses émotions, c’est aussi préserver son équilibre hormonal.

3. Soutien psychologique

Parler, être écouté, consulter un thérapeute si besoin : la santé mentale fait partie intégrante de l’andropause. Ce n’est pas un luxe, mais une nécessité quand les émotions débordent ou que le moral flanche.

4. Le traitement hormonal, en dernier recours

Dans certains cas, le médecin peut proposer un traitement hormonal substitutif. Il consiste à administrer de la testostérone sous forme de gel, d’injection ou de comprimé. Ce traitement peut être efficace, mais il nécessite une surveillance médicale stricte, car il comporte des risques, notamment cardiovasculaires ou au niveau de la prostate.

Il ne s’agit jamais d’un traitement automatique, mais d’une décision à prendre au cas par cas, après évaluation complète.

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La testostérone, bien plus qu’une hormone sexuelle

On la résume souvent à la virilité ou à la libido. Pourtant, la testostérone joue un rôle bien plus large : elle agit aussi sur le cœur, les os, le cerveau, les globules rouges, et même sur la façon dont on réagit au stress. Sa baisse affecte donc l’ensemble de l’organisme.

Et ce déclin peut être aggravé par certains facteurs : l’obésité, le tabac, l’alcool, la sédentarité, ou encore une alimentation trop riche en graisses saturées. À l’inverse, un mode de vie actif et sain permet de freiner cette chute hormonale, voire d’en limiter les effets.

Briser le tabou

L’andropause reste un sujet tabou, souvent passé sous silence. Mais il est temps de changer cela. Les hommes ont, eux aussi, le droit de parler de leur santé, de leurs changements, de leurs doutes. Et d’être écoutés, compris, accompagnés.

Parler d’andropause, ce n’est pas parler de faiblesse. C’est parler de santé.

Ce n’est pas la fin de la virilité, ni le début du déclin. C’est une nouvelle étape de la vie, qu’on peut aborder avec lucidité, courage… et les bons outils. Car mieux informé, on vit mieux. Et avec un accompagnement adapté, l’andropause peut devenir une transition maîtrisée, et non une fatalité.

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Entretien avec le Dr Jean-François Biset, urologue

 » N’attendez pas ! « 

« C’est le message aux hommes de plus de 50 ans qui ressentent une perte d’énergie ou de désir… »

Le déficit hormonal lié à l’âge, encore trop souvent désigné sous le nom d’andropause, demeure un sujet sensible pour de nombreux hommes à partir de la cinquantaine. Pour mieux comprendre cette réalité encore taboue,  le Dr Jean-François Biset, chirurgien urologue aux cliniques Life Together à Forbach, Tamarin et Bon Pasteur nous en parle.

Le terme « andropause » est très répandu. Est-ce un concept médicalement reconnu ?

Pas exactement. Andropause est un terme largement utilisé dans le langage courant et par les médias, par analogie avec la ménopause féminine. Mais sur le plan médical, nous préférons parler de déficit androgénique lié à l’âge ou DALA. La différence est importante : contrairement à la ménopause, qui marque un arrêt brutal et irréversible de la production hormonale chez la femme, chez l’homme, la baisse de testostérone est progressive, parfois silencieuse, et ne s’accompagne pas toujours de symptômes. C’est donc un processus bien différent, qui mérite sa propre approche.

Que se passe-t-il exactement dans le corps d’un homme lorsqu’il traverse cette phase ?

Avec l’âge, la production naturelle de testostérone diminue, en général à partir de 40 ans, au rythme d’environ 1 % par an. Dans un premier temps, cette baisse peut passer inaperçue. Mais chez certains hommes, elle va se traduire par une perte d’énergie, une diminution du désir sexuel, une certaine irritabilité, voire des troubles du sommeil. D’autres remarqueront une réduction de leur masse musculaire ou une prise de poids inexpliquée. Ce sont des signaux d’alerte qu’il ne faut pas négliger, surtout s’ils s’installent durablement.

Est-ce que tous les hommes sont concernés, ou seulement une minorité ?

La baisse hormonale est un phénomène universel et naturel, mais ses effets varient énormément d’un homme à l’autre. Certains traversent cette phase sans le moindre symptôme. Pour d’autres, en revanche, cette baisse hormonale a un véritable impact sur leur qualité de vie. Ce n’est donc pas tant la chute du taux de testostérone qui importe, mais la façon dont elle se manifeste au quotidien. C’est à partir de là que l’on peut parler de DALA.

Comment distinguer un déficit hormonal d’autres troubles liés à l’âge, comme la dépression ou le burn-out ?

C’est une vraie difficulté. Les symptômes peuvent se ressembler : perte d’élan, fatigue chronique, baisse de motivation, troubles sexuels… Le DALA peut s’entremêler à d’autres problématiques comme un syndrome métabolique, un stress prolongé ou un état dépressif sous-jacent. C’est pourquoi un bilan médical complet est indispensable avant d’envisager un traitement. Il permet d’éliminer d’autres causes possibles et d’objectiver le déficit hormonal.

Comment établit-on le diagnostic ?

On combine l’observation clinique à une analyse biologique. Le patient décrit ses symptômes et leur impact sur sa vie quotidienne. Ensuite, on procède à deux dosages sanguins, réalisés tôt le matin, entre 7h et 10h, moment où la testostérone est à son pic. On mesure à la fois la testostérone totale et la testostérone libre, qui est la forme biologiquement active. Dans certains cas, on complète avec des dosages d’hormones comme la LH, la FSH ou la prolactine pour vérifier s’il n’y a pas une cause endocrinienne secondaire.

Dans quels cas un traitement est-il proposé ?

Le traitement substitutif est envisagé uniquement si les symptômes sont bien présents, que les taux de testostérone sont confirmés bas à deux reprises, et qu’il n’existe aucune contre-indication médicale. On parle ici de cas où le taux de testostérone est inférieur à 8 ou 10 nmol/L. Il ne s’agit pas de prescrire des hormones de confort, mais de traiter un vrai trouble clinique. Et il faut bien sûr s’assurer qu’il n’y ait pas de contre-indication, comme un cancer de la prostate actif ou une pathologie cardiovasculaire mal contrôlée.

Quels effets concrets les patients peuvent-ils attendre d’un tel traitement ?

Quand le traitement est bien indiqué et bien suivi, les résultats sont souvent spectaculaires. On observe un retour progressif du désir sexuel, une amélioration de la fonction érectile, une remontée de l’énergie vitale. Les hommes retrouvent aussi leur tonus musculaire et perdent parfois de la masse grasse. Certains paramètres métaboliques peuvent s’améliorer également, notamment la glycémie ou les lipides. Mais attention : ce n’est pas une pilule miracle. L’efficacité dépend aussi du mode de vie.

Y a-t-il des risques liés à ce traitement sur le long terme ?

Comme tout traitement hormonal, il existe des effets secondaires potentiels. Le plus connu est la polyglobulie, c’est-à-dire une augmentation anormale du nombre de globules rouges. On surveille aussi le risque d’aggravation des apnées du sommeil, et bien sûr tout ce qui touche à la prostate. Le lien entre testostérone et cancer de la prostate reste débattu, mais par précaution, un suivi régulier du PSA et un toucher rectal sont indispensables.

Comment assurez-vous ce suivi ?

Le suivi est à la fois clinique et biologique. On revoit le patient quelques mois après le début du traitement pour faire le point sur les effets ressentis. On vérifie aussi les dosages hormonaux, le PSA, l’hématocrite, le bilan hépatique. Ensuite, ce suivi devient annuel. Ce n’est pas un traitement à prendre à la légère : il s’inscrit dans la durée et doit s’adapter à l’évolution de l’état de santé du patient.

Existe-t-il des alternatives au traitement hormonal ?

Oui, surtout lorsque les symptômes sont modérés. L’activité physique régulière, la perte de poids, un meilleur sommeil et une alimentation équilibrée peuvent suffire à relancer naturellement la production de testostérone. On peut aussi envisager des compléments alimentaires — zinc, vitamine D — si des carences sont identifiées. Enfin, certains médicaments qui bloquent la transformation des androgènes en œstrogènes sont à l’étude, mais restent expérimentaux.

Le mode de vie joue donc un rôle essentiel ?

Absolument. L’exercice physique stimule la production de testostérone. Une bonne hygiène de vie, un sommeil réparateur, une gestion du stress… tout cela a un impact direct sur l’équilibre hormonal. On ne le répétera jamais assez : la première médecine, c’est le mode de vie.

Quelle est la place de l’urologue dans la prise en charge du DALA ?

L’urologue est souvent en première ligne, car beaucoup de patients viennent consulter pour des troubles de l’érection ou de la prostate. Mais nous collaborons régulièrement avec des endocrinologues, des cardiologues ou des sexologues, surtout lorsque la problématique est complexe. C’est un travail d’équipe, avec l’homme au centre du parcours de soins.

Pour finir, que diriez-vous à un homme de plus de 50 ans qui ressent une perte d’énergie ou de désir, mais qui n’ose pas consulter ?

Je lui dirais : n’attendez pas. Ce que vous ressentez n’est pas anormal, et il ne faut pas en avoir honte. Une simple prise de sang peut suffire à clarifier la situation. Et aujourd’hui, il existe des traitements efficaces, bien tolérés et personnalisés. Mais encore faut-il franchir le pas. Consulter, c’est aussi faire de la prévention, pas seulement pour le déficit hormonal, mais pour votre santé en général.

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