Marie-Noëlle Elissac-Foy (consultante en relations publiques) : « Beaucoup de tort à l’image de la femme en politique »

Marie-Noëlle Elissac-Foy, ancienne journaliste, travaille aujourd’hui avec les entrepreneurs. Elle est la cofondatrice du réseau Smart Moves for Entrepreneurs. Consultante en relations publiques, elle gère elle-même sa petite entreprise, The Talent Factory Ltd, et insiste sur l’importance de l’entreprenariat de service. Elle revient également sur la campagne de Women in Networking (WIN), dont elle était l’une des chevilles ouvrières, en faveur d’une meilleure représentativité féminine au Parlement. Elle considère dommage que 50 ans après l’indépendance, il faille encore passer par des projets de loi pour garantir un plus grand nombre de femmes à l’Assemblée. Revenant sur la démission de la présidente de la République, elle estime que « la façon dont elle est partie a fait beaucoup de tort à l’image de la femme » en politique. Marie-Noëlle Elissac-Foy plaide enfin pour un entreprenariat durable et un cycle de consommation plus vertueux, privilégiant la production locale.

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En 2009, WIN menait campagne pour doubler la représentativité féminine au Parlement. Quel constat faites-vous après dix ans ?

Je précise avant tout que je ne fais plus aucune association féminine depuis belle lurette. Car j’ai vu un peu les limites de cette action. Les associations pour durer nécessitent un “full time job”. Pour en venir à cette campagne, force est de constater qu’on n’a pas vraiment progressé au final. On est à peu près à 12% de représentation féminine. Ce qui est très peu et très loin de tous les protocoles. Il n’y a pas aujourd’hui une association qui parle au nom des femmes. Cela dit, le combat que nous avons mené il y a dix ans reste toujours pertinent. Un combat pour plus de parité, pour une participation plus active de la femme dans la vie politique et économique. Même si les associations, les initiatives ne sont plus là, les enjeux, eux, restent les mêmes. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour qu’il y ait plus de femmes en politique et pour une participation plus visible dans la vie économique. On vient de fêter les 50 ans de notre indépendance et il ne faut pas oublier que ce pays a été construit avec les efforts, la sueur et le sacrifice des Mauriciennes. Qu’on en soit encore, 50 ans après, à parler de projet de réforme pour la parité veut dire que, quelque part, il y a quelque chose que nous avons raté.

Quelles sont ces limites des associations dont vous parlez ?

Toutes les associations, quelles qu’elles soient, débutent avec beaucoup de bonne volonté. C’est sur la durée qu’elles sont mises à l’épreuve. Il faut vraiment installer les actions dans la durée. Et pour cela, il faut des ressources humaines et financières. On ne peut plus compter sur le bénévolat. Si on veut militer pour la cause des femmes aujourd’hui, c’est presque un “full time job”. Mais il y a aussi des associations qui font du bon travail sur d’autres enjeux touchant à la vie des femmes, notamment tout ce qui est violences domestiques, etc. Ce sont quand même des associations qui durent. Mais si on veut mettre sur pied des associations pour la “gender parity” ou plus d’émancipation économique et politique, il faut plus de moyens. Et comme je l’ai dit, un vrai “full time job”.

Des femmes ont été appelées à assumer des responsabilités récemment. Mais on parle de déceptions. C’est aussi le cas pour vous ?

Je vais être très claire, je n’ai pas besoin de langue de bois : on a été très déçue par les femmes qui sont entrées en politique. Personnellement, j’ai été très déçue par ce qui s’est passé avec la présidente. Je crois que je ne suis pas la seule. On avait placé beaucoup d’espoirs en elle. La façon dont elle est partie a fait beaucoup de tort à l’image de la femme en politique. Aujourd’hui, je me demande si, quand une femme décidera de faire de la politique, on ne lui dira pas si elle va faire comme X, Y, Z… Ce qui devait être pour moi une avancée aura été un vrai recul. Cela dit, cela ne devrait pas décourager les femmes à entrer en politique. Les femmes mauriciennes ont une place à prendre en politique. Je crois qu’en cette année préélectorale, il est urgent de rappeler aux leaders des partis que l’électorat se compose à plus de 50% de femmes. On le disait il y a dix ans : la voix des femmes compte. Aujourd’hui, je ne vois pas pourquoi un parti ne pourrait pas aligner 20 femmes. Pour moi, il est impensable qu’un parti politique bien établi ne puisse pas faire émerger 20 candidates de ses propres rangs. C’est à se demander ce qu’a fait ce parti pendant tout ce temps.

Cette question de la représentativité des femmes est à double face. Car il n’est pas juste question d’aligner plus de femmes, mais qu’on élise aussi plus de femmes. Je suis les élections aux Etats-Unis et quand je vois des femmes au Congrès avec différents profils (une qui est réfugiée, une autre qui est mère célibataire, des jeunes…), cela fait plaisir à voir. Pourquoi pas ça à Maurice ?

Comment évaluez-vous nos femmes en politique de manière générale ?

Malheureusement, on ne peut actuellement parler de vraie performance. La femme en politique reste comme un homme en politique. Elle va suivre la loi du parti. Une fois qu’on entre en politique, on entre dans un jeu malheureusement. À moins d’être vraiment très forte dans sa tête et d’avoir un fort sens de l’indépendance. On a vu les cas d’injures contre les femmes qui nous restent encore au travers de la gorge. Il faut dénoncer ce patriarcat, cette misogynie qu’il y a dans les partis politiques.

Il y a aussi un “parliamentary gender caucus”, mais à quoi ça sert exactement ? En cette année préélectorale, je m’attendais à ce que ce “parliamentary gender causus” vienne de l’avant avec une vraie campagne pour faire élire plus de femmes, “accross party”, car c’est un caucus parlementaire et ça dépasse le cadre politique. En cette année préélectorale, c’est le moment ou jamais pour ce “parliamentary gender caucus” d’être actif.

Vous-même, personnellement, cela ne vous a jamais tenté de faire de politique ?

Quand je vois tout ce qui se passe, je crois que pour entrer en politique, il faut vraiment être indépendante financièrement. Je ferai de la politique quand je ne devrais plus rien à personne. Ce qui me permettrait de garder ma liberté de parole, ma liberté de pensée. Mais je ne me vois pas participer tout de suite à des élections générales. Je voudrais d’abord m’impliquer dans les élections villageoises. S’il y avait eu les élections villageoises cette année, je crois que je me serais présentée. C’est important de commencer par là, de faire ses preuves, et non pas lâcher quelqu’un comme cela dans l’arène politique au niveau national. C’est comme cela qu’on éviterait de se casser la gueule. Il faut une préparation. Il faut être bien entourée, bien mentorée…

Que pensez-vous du projet de réforme électorale, garantissant un tiers des sièges aux femmes ?

Ça reste toujours un projet. Mais je crois que c’est important qu’il y ait un mécanisme imposé. Je ne sais pas si on va appeler ça un quota. Car on a tellement de retard à rattraper que si on n’impose pas d’avoir une femme sur trois, par exemple, on n’y parviendra pas. On l’a déjà fait pour les élections villageoises, on aurait pu l’appliquer au niveau national. Si on ne force pas les partis politiques à aligner plus de femmes, les leaders ne le feront pas d’eux-mêmes.

Comment réagissez-vous à la violence domestique qui perdure dans notre société ?

Ça continue année après année et ça empire, selon moi. La violence à l’égard des femmes a atteint des degrés de barbarie jamais atteints à Maurice. Aujourd’hui, on découpe des femmes à coup de sabre, de marteau… Je ne comprends pas comment la plupart des femmes victimes bénéficiaient toutes d’un “protection order”. Il y a une espèce de faille dans ce processus. Il faudrait une vraie volonté politique pour réunir autour d’une même table les associations, la police et le corps juridique. Il faut savoir où ça cloche. Est-ce que c’est dans la façon dont l’enquête est menée, est-ce que c’est au niveau de la cour ? Ce qui est sûr, c’est qu’il y a quelque part un “loophole” qui permet à l’agresseur d’échapper à la justice et qui ne protège pas assez la femme. On parle beaucoup de crimes, mais très peu de condamnations au final. On devrait pouvoir faire une étude pour savoir combien de cas de violence domestique aboutissent à une vraie condamnation. On voit beaucoup de femmes qui sont battues, mais qui reviennent dans leur maison. Il faut aussi donner plus de moyens pour construire des “shelters” pour les femmes. Il n’y a pas assez de structures pour accueillir les femmes. Ne serait-ce pour qu’elles puissent souffler. Au lieu de mettre de l’argent dans les grands projets d’infrastructures comme le métro, on aurait pu prendre un dixième de ce qu’on est en train de dépenser et faire des centres pour les femmes. Pour un petit territoire comme le nôtre, je trouve que les chiffres de la violence sont effrayants. On ne peut venir se targuer d’être No 1 en Afrique dans tous les grands indices alors qu’on est un peu No 1 en termes de violence domestique. Il faut mettre les moyens pour trouver des solutions.

Que pensez-vous du cas de cet homme condamné pour le meurtre de sa femme et qui a bénéficié d’une remise de peine de 15 ans ?

Je trouve ça scandaleux. Je crois que ça envoie un très mauvais signal pour les femmes de Maurice. Surtout quand on se souvient que cette femme a été agressée à coup de sabre. Encore une fois, c’est cette barbarie-là qu’on aurait dû dénoncer. Je ne comprends pas cette grâce présidentielle. Pourquoi la présidence ne ferait pas plutôt un programme de prévention contre la violence domestique ?

Qu’est-ce que cela implique d’être entrepreneur aujourd’hui ?

Personnellement, c’est plus enrichissant depuis que je travaille à mon compte comme consultante en relations publiques. Être entrepreneur, cela nous force à avoir un autre rapport à la vie carrément. Car c’est un autre rapport à l’argent, à comment s’organiser… Cela fait cinq ans que je suis à mon propre compte. J’ai des clients de différents profils. Des grands comme des petits. C’est encourageant, je suis assez contente de ce que je fais. Être entrepreneur, c’est se battre tous les jours. Ne pas se décourager. Je le dis souvent aux femmes : il ne faut pas avoir peur de se lancer. Il faut apprivoiser cette peur qu’on a de se lancer, vivre avec cette peur de se dire “est-ce qu’on aura un client demain, comment cela va se passer” ? Au final, c’est croire en soi. Moi je suis assez contente que mes clients me fassent confiance. Être entrepreneur, cela apporte une certaine liberté aussi, pour pouvoir organiser sa vie comme on le veut. Il y a différentes facettes de l’entreprenariat. Pas plus tard que la semaine dernière, j’ai reçu un appel d’une femme me disant : « Je veux être entrepreneur, mais je ne sais rien faire de mes mains. » Je lui ai dit : « Qu’est-ce que cela veut dire que vous ne savez rien faire de vos mains ? » Elle m’a répondu : « Je ne sais faire ni achards ni artisanat… » Je dis qu’il ne faut pas limiter l’entreprenariat à l’artisanat. En lui posant la question, elle m’a dit qu’elle était secrétaire. Je lui ai dit : « Alors, pourquoi ne pas mettre vos compétences dans ce domaine au service des autres entrepreneurs ? » Du coup, elle est en train de réfléchir à ça. Je crois qu’il y a un gros potentiel pour l’entreprenariat de service, qui est totalement négligé dans les budgets. On veut créer des “hubs” et cela demande également des entrepreneurs de service. Ce que j’ai remarqué en travaillant sur Smart Moves For Entrepreneur, c’est qu’il y a un gros problème d’accès à l’information. Il y a beaucoup de “schemes”, de programme d’aide, mais l’entrepreneur a la tête dans le guidon. Il n’a pas le temps d’aller chercher ces informations. Pour moi, un entrepreneur qui réussit est un entrepreneur qui sait s’entourer. C’est extrêmement important. Je le dis souvent : on peut réussir seul, mais on réussit plus vite si on est bien entouré. Cela veut dire avoir les services d’un comptable, de quelqu’un spécialisé en marketing, en communication… Un entrepreneur peut faire appel à d’autres entrepreneurs de service.

Il y a eu différents plans d’aides aux PME. Les entrepreneurs y ont-ils accès facilement ?

Il y a une bonne volonté pour aider les entrepreneurs, par exemple avec la création de SME Mauritius, mais personnellement, je crois que ça arrive un peu tard. Le “master plan” également. C’est quelque chose qui aurait dû être fait il y a deux ou trois ans afin de pouvoir l’implémenter. Nous sommes malheureusement dans la dernière année du mandat du gouvernement. Ensuite, il faudra attendre les élections pour savoir si on continue ou pas avec ce qui a été commencé. C’est cela aussi le drame des entrepreneurs. Chaque gouvernement qui vient veut apporter son propre programme au lieu de voir ce qu’il y avait de bon avant et continuer à bâtir dessus. Alors que l’entreprenariat se construit dans la durée. Il faut vraiment avoir une vision à long terme pour l’entreprenariat.

Aujourd’hui, j’ai encore des personnes qui m’appellent pour me demander où se tourner pour recevoir de l’aide. Est-ce qu’il faut aller vers les banques, est-ce qu’il faut aller vers SME Mauritius ? Le One Stop Shop, on ne sait pas si ça fonctionne encore. C’est pour cela que je dis que les entrepreneurs doivent savoir s’entourer. Aller dans les petits réseaux pour pouvoir aller plus vite. Apprendre des erreurs des autres, apprendre auprès des autres entrepreneurs, savoir comment ils fonctionnent, comment on traverse certains écueils, comment on va plus loin… Il manque cette plateforme d’information aux entrepreneurs. Aujourd’hui, on a beaucoup d’acteurs, mais on n’a pas un point focal. SME Mauritius, je pense, a beaucoup de bonne volonté, mais l’implémentation doit se faire dans la durée. C’est une nouvelle entité, il faut lui donner le temps de s’installer, de définir sa vision… Mais comme je l’ai dit, nous sommes dans une année préélectorale, il ne nous reste qu’un an. Je ne sais pas trop ce qu’on peut faire en un an. Mais je dois reconnaître qu’il y a la volonté.

Il y a aussi des programmes qui sont intéressants, comme le “graduate scheme”. Mais là aussi, il faut donner la liberté aux entrepreneurs de pouvoir choisir les diplômés qu’ils veulent employer. Pour l’instant, on place les gens chez vous. C’est un peu une question de chance d’avoir quelqu’un du profil que vous recherchez. Le mieux serait d’avoir un programme “tailor-made” qui s’adapte aux besoins des entrepreneurs. Pour le financement, c’est la même chose. Il y a différents types de financement, mais ce n’est pas toujours évident d’y avoir accès. Et comme je l’ai dit, les entrepreneurs de service sont oubliés. On se concentre sur tout ce qui est production. Il y a beaucoup de personnes comme moi qui veulent elles aussi apporter leur contribution à travers l’entreprenariat de service.

Que pensez-vous de l’initiative « Lokal is beautiful » de la MCB ?

En tant qu’entrepreneur et en tant que citoyenne vivant sur une île, je crois que l’avenir de notre pays passera pas le local. On est appelé à passer d’un modèle où on importe, on consomme et on jette, à un modèle où on consomme ce que nous produisons localement. Je crois qu’une telle initiative est un signal très fort que la MCB, en tant qu’acteur économique, envoie à l’ensemble de l’écosystème. Je pense que “Lokal is beautiful”, tout comme l’initiative “Made in Moris”, devrait être de vrais “game changers” pour le pays et la région. On doit de plus en plus tendre vers une économie circulaire, un mode de vie durable et un cycle de consommation plus vertueux. Je le fais personnellement de façon très personnelle. J’essaie de consommer que du “Made in Moris”. Je sais que lorsque je consomme du local, je fais vivre une famille mauricienne. Tandis que si j’achète des produits importés, c’est de l’argent qui ira ailleurs. L’argent que je consomme ici est réinjecté dans le pays. Il ne faut pas oublier qu’on a un pays de plus en plus pollué, un environnement de plus en plus en danger. Il faut qu’on adopte des comportements plus vertueux. Il faut penser à la consommation en vrac, refuser le plastique et adopter les quatre “R” (Refuser, Réduire, Réutiliser et Recycler). Aujourd’hui, on devrait arriver à ce que le recyclage soit la dernière option. Pour avoir cette économie circulaire, tous les acteurs doivent être impliqués. Ce qui est important dans cette initiative de la MCB, c’est qu’elle vient poser “Lokal is beautiful” comme un projet de société et elle veut amener les entrepreneurs dedans. J’ai toujours dit que pour un entreprenariat dynamique et durable, on doit s’inscrire dans un projet de société. Cette initiative devrait faire émerger une nouvelle génération d’entrepreneurs qui vont nous apporter des solutions afin que notre consommation ait le moins d’impact possible. Le local est une vraie filière économique et la MCB a eu l’intelligence de le reconnaître. J’espère qu’ils vont encourager les entrepreneurs à aller chercher des solutions pour une économie plus durable.

Vous avez siégé à la Creole Speaking Union. Que pensez-vous de la polémique autour du Musée intercontinental de l’esclavage ?

Notre histoire, celle de cette île, sera incomplète tant que ce musée restera à l’état de projet. Ce musée renforcerait la cohésion nationale au sein de la République. Un édifice utile et légitime. J’imagine ce lieu comme un outil pédagogique, indispensable pour lutter contre les préjugés et se rappeler les combats pour la liberté. Il est dommage que l’on n’ait pas jugé utile, voire symbolique, de concrétiser ce projet pour les 50 ans de notre indépendance ou même pour la récente visite du président de la République du Mozambique. Que d’occasions ratées ! Est-ce délibéré ? Veut-on occulter la contribution des esclaves et de leurs descendants à la construction de l’île Maurice ? La grandeur d’un pays est d’assumer toute son histoire !

Cela dit en passant, quand on parle de représentativité, il faut aussi prendre en considération la représentativité des créoles dans la vie politique et économique. Moi, je suis une femme créole, je suis une femme entrepreneur et je contribue au pays. Il y a des centaines et des milliers d’autres qui le font. Il faut aussi commencer par reconnaître le mot “Créole” dans la Constitution. On vient de fêter les 50 ans de notre indépendance et il est triste de dire que moi, qui suis femme créole, je n’existe pas dans la Constitution. C’est un combat qu’il faudra mener. Cela ne veut pas dire non plus que lorsqu’on revendique son appartenance à une communauté on est moins Mauricien. On ne peut être totalement Mauricien si on ne reconnaît pas ma part de créolité officiellement. On parle de peuple arc-en-ciel et toutes les couleurs doivent être représentées officiellement. Il y a un grand combat à mener contre les discriminations envers les minorités. Heureusement qu’Affirmative Action est venu libérer la parole et dire certaines vérités.

Propos recueillis par

Géraldine Legrand

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