Pénurie d’eau à Case Noyale : Les habitants veulent descendre dans la rue

Ils dénoncent « le travail bâclé » de la pose de tuyaux neufs dans le village.

L’eau est une denrée rare à Case Noyale depuis trois mois, au grand dam des habitants de ce village côtier situé entre Petite Rivière-Noire et La Gaulette.  Il y a certes eu la pose par la CWA de nouveaux tuyaux quelques jours après que Week-End a fait état, dans son édition du 9 août, de la pénurie d’eau qui sévit dans le village, mais ce n’est pas pour autant que la situation a évolué dans le bon sens. Pire, l’on constate que lesdits tuyaux n’ont pas été enfouis et traînent le long des rues, des trottoirs et dans les cours des habitants. Les riverains dénoncent ce travail bâclé qui engendre des fuites qui, du coup, accentue le calvaire auquel ils sont confrontés.

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La tension monte à Case Noyale et les choses risquent de se corser avec l’arrivée de la chaleur. La colère et le stress sont palpables dans la voix de Rebecca S., une habitante de Cité EDC, qui nous a contactés pour nous faire faire part de son désarroi. « Pa pou kapav kontinie koumsa. Nou senti nou kouma bann laissé-pour-compte. Nou zis demann inpe delo gramatin ek inpe tanto », s’insurge cette mère de trois enfants en bas âge qui n’a pas vu l’eau couler de son robinet depuis plus de 24 heures. Pour les foyers les plus chanceux, l’eau coule parfois au rythme de deux heures ou de trois heures par jour. Il y a eu un regain d’espoir que la situation allait enfin s’arranger lorsque des ouvriers de la CWA sont venus le mois dernier remplacer des tuyaux vétustes par de nouveaux dans certains quartiers du village. S’ensuit une légère amélioration en termes d’approvisionnement. L’eau coule, certes avec parcimonie quotidiennement, mais les riverains pour qui l’or bleu est une denrée rare depuis trois mois retrouvent un semblant de vie normale.

Ce genre d’installation engendre des fuites dans de nombreuses rues du village

Leur joie a été de courte durée puisque ces nouveaux tuyaux produisent, au final, des résultats peu probants. « La situation a même empiré quelques jours après à Cité CHA, où les gens étaient approvisionnés deux heures à l’aube et deux heures en fin d’après-midi. Depuis deux semaines, on ne reçoit l’eau que le matin », indique un riverain qui croit connaître l’origine de cette détérioration. « Bann travayer CWA inn instal sa bann tiyo la enn fason grotesk dan tou coin simé, lor trottoir, dan nou la cour. Loto ek dimoun pe pass lor la ziska gagn fuite », soutient notre interlocuteur. En effet, les règlements de la CWA Act stipulent que les tuyaux dans un domaine public, privé ou pour la partie reliée à une habitation doivent absolument être enfouis. Or, à Case Noyale, l’on observe la présence de plusieurs centaines de mètres de tuyaux neufs qui ont été posés hors de la terre, le long des rues, des trottoirs et dans la cour de certains habitants.

La CWA n’applique donc pas à la lettre ses propres recommandations. Cela a eu pour conséquence qu’à plusieurs endroits des véhiculent ont roulé sur les tuyaux qui ont été endommagés jusqu’à provoquer des fuites. D’autres tuyaux ont subi des actes de vandalisme ou de vol. Ce sont les habitants qui payent les pots cassés. L’indignation s’est depuis propagée dans tout le village. « Les autorités font mine de ne pas comprendre notre détresse quand on sait que la qualité de la vie, dans tous les sens du terme, se détériore à Maurice. Les gens sont mécontents au point de vouloir suivre la tendance qui est de descendre dans la rue pour manifester leur désarroi », soutient un habitant de Cité CHA. Une situation qui contraint les riverains à marcher parfois jusqu’à La Gaulette pour se procurer de l’eau chez des amis ou attendre que les camions-citernes viennent les approvisionner.  

Des débitmètres à La Nicolière pour une distribution d’eau équitable dans le Nord

S’orienter vers l’utilisation de nouvelles technologies afin de mieux adapter la quantité d’eau stockée en fonction des besoins quotidiens réels de la population. Tel est l’objectif de la Central Water Authority (CWA) et de la Water Resources Unit (WRU) qui envisagent de doter la station de  traitement du réservoir de La Nicolière de débitmètres (flow meters) qui sont des instruments destinés à mesurer la quantité exacte d’eau traitée dans la perspective d’une meilleure répartition aux consommateurs du Nord de l’île et pour l’irrigation.  

Le réservoir de La Nicolière est l’une des plus importantes sources d’approvisionnement en eau des districts de Rivière-du-Rempart et Pamplemousses. Il produit près de 100 000 m3 d’eau quotidiennement, dont la majeure partie est traitée pour être distribuée aux abonnés de la CWA.  Le ministre de l’Énergie et des Utilités publiques, Joe Lesjongard, qui a effectué mercredi dernier une site visit à la station de traitement d’eau dudit réservoir, a  fait le point sur la perspective d’une gestion plus efficace du réseau d’eau potable. « Bizin kone kot bizin plis dilo e kot bizin moins dilo », a fait ressortir le ministre.

 C’est dans cette optique que la CWA et la WRU ont décidé  d’investir dans la régulation électronique du système grâce au débitmètre qui est conçu pour affiner la distribution d’eau et commander sa gestion à distance au détriment des valves.  Ces débitmètres sont généralement placés en ligne avec le tuyau qui transporte le fluide« Cet investissement cadre parfaitement avec la stratégie des autorités de modernisation du système de distribution dans tout la pays. Nous débutons avec le Nord, puis le système s’étendra à d’autres régions », soutient Joe Lesjongard.

Le ministre n’a pipé mot en revanche suite une question de Week-End sur le projet d’agrandissement du réservoir de La Nicolière qui a fait l’objet d’une étude de faisabilité par le consultant SMEC Ltd estimé à Rs 35 millions. Le consultant qui était appelé à évaluer les options d’une surélévation du barrage a déjà soumis son rapport depuis l’année dernière. On a contacté la WRU pour avoir de plus amples renseignements, mais cette instance n’a donné suite à nos sollicitations. 

Les réservoirs avec un taux de remplissage moyen de 75,4%

Aucun réservoir n’affiche un taux de remplissage à plus de 85% actuellement. C’est ce qui ressort des dernières estimations compilées par la CWA au 25 septembre. Les sept réservoirs de l’île affichent en moyenne un taux de remplissage de 75,4% contre 87,2% à la fin du mois de septembre 2019. Ce niveau reste aussi nettement inférieur à celui de la même époque en 2018 qui était de 82,7%.

« La situation du niveau d’eau dans nos réservoirs n’est pas préoccupante pour l’instant, mais les choses pourraient changer si les grosses pluies tardent à venir. » C’est ce qu’indique une source à la CWA, à la lumière du taux de remplissage des réservoirs et des nappes phréatiques qui sont loin de la moyenne habituelle. Le paradoxe réside dans le fait que Mare-aux-Vacoas affiche actuellement un taux de 85% contre 82% à la même époque l’année dernière.

En revanche, le taux de remplissage des six autres réservoirs est nettement inférieur comparativement aux derniers jours de septembre 2019. La Nicolière  atteint au 25 septembre un taux de 72,6%, contre 82,2%  à la même période en 2019. Piton du Milieu est rempli à 84,6%, contre 99,3%. Le niveau d’eau à La Ferme est de 51,6%  alors que  Mare Longue et le Midlands Dam  affichent respectivement un taux de remplissage de 84,7% et 78,7%. Ces deux réservoirs étaient remplis à 100% en septembre 2019. Quant au Bagatelle Dam, dont la capacité de remplissage s’élève à 14,76 mm3, il est actuellement rempli à 66,1%.

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