Ritesh Ramphul, député du n°12: «Que ce soit le PM ou le ministre de la Santé, zot tou bizin demisione…»

Ritesh Ramphul, député du no 12 (Mahébourg/Plaine-Magnien), est un fidèle de la direction du PTr et de Navin Ramgoolam dont il soutiendra la candidature au poste de Premier ministre, que ce soit seul ou en alliance avec les autres partis de l’opposition, car il est, à ce stade, le seul à pouvoir rassembler autour de l’objectif principal de botter le MSM hors du pouvoir, pensant même que le PM, Pravind Jugnauth, et son ministre de la Santé, Kailesh Jugatpal doivent démissionner.

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S’il reste modeste sur un rôle majeur à l’avenir, il n’en pense pas moins qu’il faudra faire de la politique autrement car les jeunes sont mieux informés. Pour l’heure, il se contentera de soutenir les électeurs du sud du pays abusivement poursuivis par l’État dominère — surtout ses mandants, privés d’eau. Week-End l’a rencontré vendredi après-midi.

D’emblée, Ritesh Ramphul, titillé sur la question de la pénurie d’eau à Bambous-Virieux où des habitants sont en outre poursuivis pour avoir manifesté contre le manque l’eau, réagit avec véhémence : « C’est inacceptable qu’en 2022, dans une démocratie telle que Maurice, les habitants soient privés d’eau, une des basic necessities. C’est inacceptable que des personnes qui réclament leur droit à des basic necessities of life soient arrêtées ».

Il explique que le problème d’eau ne concerne pas seulement Bambous-Virieux et qu’à Mahébourg, qui se trouve dans sa circonscription, les habitants en ont aussi été privés. Il raconte être personnellement intervenu, en vain, auprès de la CWA et qu’il a dû payer des citernes privées pour régler la situation dans certains lieux. Ainsi, il fustige la CWA et martèle que la situation y est catastrophique, aussi bien au niveau des services que des finances.

« L’organisme est tellement endetté que dans chaque budget, la CWA continue à emprunter de l’argent à l’État. Chaque année, un projet revient dans le budget : la construction du Rivière-des-Anguilles Dam, mais jusqu’aujourd’hui, rien n’a été fait. Ce n’est pas possible que dans un pays où il pleut autant — d’ailleurs, nous venons de vivre des épisodes de débordements —, nous n’ayons pas tous accès à l’eau. Kot tou sa delo là aller ? »

Le Sud parent pauvre, malgré deux ministres

Il rappelle qu’en 2015, la population avait payé Rs 4 par litre d’essence pour refaire les tuyaux défectueux, et que l’ancien Deputy Prime Minister, Ivan Collendaveloo avait promis à la population qu’à la fin de son mandat, en 2018, on aurait l’eau 24/7. L’avocat Ritesh Ramphul se demande, par ailleurs, ce qu’ont fait les trois députés de la circonscription n° 11 pour leurs mandants de Bambous-Virieux, arrêtés pour manifestation illégale, et se dit prêt à défendre ceux qui sont poursuivis.

À la question de savoir si le Sud est le parent pauvre du développement à Maurice, Ritesh Ramphul acquiesce et ajoute : « On a un ministre des Finances dans la circonscription No 13. On a un ministre des Infrastructures publiques dans la circonscription No 12. Rien n’a été fait depuis 2015. Pourtant, on avait promis qu’on convertirait Mahébourg en un village touristique et qu’une route serait érigée de l’aéroport passant par Ferney pour aller dans le Nord. »

Par ailleurs, Ritesh Ramphul explique que concernant le Wakashio et les dédommagements, « minis là meme pas conner ». Il avance, selon ses propres recherches, que le GM réclamerait Rs 2,8 millards à l’assurance qui, pour sa part, a entré une action en Cour suprême pour limiter la compensation à environ à Rs 900M. Mais ce qui le tracasse davantage, c’est le fait qu’on n’a pas dit aux pêcheurs que des Rs 112,000 de compensation, seraient déduites les Rs 10,200 d’allocation qu’ils ont perçue pendant huit mois. « Comment ces pêcheurs feront-ils pour vivre ? Et que fera le GM de l’argent obtenu de l’assurance, finalement ? Y aura-t-il suffisamment d’argent pour être distribué aux pêcheurs, aux restaurateurs et les autres… touchés par le drame du Wakashio pendant de longs mois ? », se demande-t-il.

Situation économique extrêmement grave

Concernant le gouvernement et sa gestion en général, Ritesh Ramphul la juge « incompétente » et parle d’ « échec à tous les niveaux ». Ce qui l’inquiète davantage c’est que la population ne réalise pas que « le pays est dans une situation économique extrêmement grave dont l’origine date bien avant le Covid ».

Selon lui, le pays est en train de survivre avec l’argent qu’on emprunte des pays amis et grâce aux réserves. Il ajoute que le GM a puisé Rs 25 millards dans les réserves du MIC pour injecter dans Airports Holdings Ltd. « Pe tir dans enn pos, pe met dans lot. C’est un autre exemple qui démontre que depuis 2019, le GM est en train de deplete nos réserves. Il ne faut pas oublier qu’il avait pris Rs 18 milliards dans les caisses, ensuite Rs 60 millards pour le budget, et là encore Rs 25 milliards.

Or, parallèlement on ne produit rien. Tous nos  secteurs traditionnels sont au rouge. Nous pe viv lor dette.. Nou pe gagn zafer avec enn GM pyromane ». Et Ritesh Ramphul de pointer du doigt le rôle de la MBC pour donner une autre image de l’opposition et du PTr en utilisant des stratégies communales pour rester au pouvoir. Il se réjouit que certaines personnes aujourd’hui, dont les groupes socioculturels, se réveillent et comprennent que l’avenir appartient à une île Maurice plurielle.

Gouverma là bizin allé

Lorsque Week-End évoque la crise sanitaire, le député PTr du N°12 ne décolère pas et dénonce avec force que le gouvernement MSM qui a tiré profit de la situation sanitaire pour faire du business sur la tête des patients et ceux qui sont malheureusement décédés : « Pendant le premier confinement, il y a eu le scandale de la STC, kot finn donne contrat à gogo à des bijouteries et quincailleries… pou acheter des équipements médicaux. Que s’est-il passé avec les ventilators pour lesquels le GM a dépensé des millions? L’ICAC est toujours en train d’enquêter. Quelques fonctionnaires ont été arrêtés, mais le ministre n’a pas été inquiété ».

Il ajoute que ce GM n’a pas tiré de leçons du passé, comme le démontre le scandale avec le Molnupiravir. Il regrette que l’ICAC ne dit pas ce que la population veut savoir : Who gave instructions ? « Li pa possible que le ministre ne soit pas au courant d’un contrat de Rs 70 M. Si cela s’est passé sous son nez et qu’il prétend ne pas être au courant, cela veut dire ki li pa conne nanien ki pe arriver dans so ministère et qu’il ne peut pas gérer son ministère. »

Lorsque Week-End lui demande s’il faut que le ministre de la Santé démissionne, il n’hésite pas une seconde pour le reconnaître, mais il pointe du doigt également le Premier ministre : « Depuis deux ans, nous savons que le PM lui-même siège sur le High Level Covid Committee et qu’il oversee toute la gestion du Covid. En tant que PM, il doit être au courant de tout. Lors d’une PNQ de Xavier Duval lui demandant de soumettre les minutes of Proceedings des réunions du HLC, Pravind Jugnauth a répondu qu’il n’y en avait pas ».

Les élections de 2018 ont été volées

« Ala couma ène crise sanitaire pareil gérée par gouverma ! Pour nous, le PM lui-même est à blâmer. Ils sont tous responsables ! Que ce soit le PM ou le ministre de la Santé, zot tou bizin démissionner. Gouvernma-là bizin aller sa ».  Surtout que le ministre de la Santé Kailesh Jugatpal n’a pas fait preuve de compassion vis-à-vis des membres de son staff médical décédé des suites du Covid, comme l’a montré, lors de son Cocoricoo Dancing Party, comparable à ce qu’a fait Boris Johnson en Angleterre au 10, Downing Street, pendant le confinement, à la veille des funérailles du mari de la Reine, le Prince Philip. « Il aurait dû avoir plus de retenue dans une période pareille. He is set to give example.».

Lorsque nous abordons la question du fait qu’un nouveau décompte des voix est envisagé, deux ans après les élections dans la circonscription No 19, Ritesh Ramphul remercie et félicite le Commissaire électoral : « Chapeau au Commissaire électoral qui, finalement in all fairness, dans un souci de transparence, a concédé en Cour qu’il y a eu des irrégularités lors du décompte des voix élections au No 19 ». Mais il regrette amèrement que cette décision soit tombée à mi-mandat, que pendant 2 1/2 ans un candidat probablement illégitime a siégé au Parlement, que la liste des Best Losers pourrait changer. Il rappelle néanmoins que cette affaire était « a Matter of public order » et qu’il faudra attendre un jugement de la Cour qui ordonnera, ou pas, le recount.

Le député rouge épouse l’affirmation de son leader Navin Ramgoolam que les élections de 2018 ont été volées comme mentionné dans les pétitions électorales, même si chaque cas est différent. « Dans le cas du No 19, on a vu qu’il y avait des irrégularités sur les documents. Il y a des preuves sur les documents. Pas ti kapav sortir de là ! Pa ti pou kapav casiet. Mais dans certaines pétitions, les plaignants avancent certaines choses qui se sont passées, par exemple, les agents dans les salles de classes, etc», explique-t-il.

Comme beaucoup d’observateurs, Ritesh Ramphul souhaiterait qu’à l’avenir, les pétitions soient prises le plus vite possible et ne pas être victimes de la légendaire lenteur de la justice, mais il souligne que les juges ne sont pas toujours responsables de la lenteur de la justice. Il y a surtout  des delaying tactics des défendeurs et leurs avocats, comme les demandes de renvoi ou le refus de prendre le document ou sortir des raisons bidons just to delay the process. Il reconnaît qu’« on ne peut, certes, pas avoir une Cour spéciale en permanence car les élections se déroulent chaque 5 ans », mais suggère « qu’après chaque élection, des juges soient délégués pour écouter au plus vite les contestations. »

Abordant le sujet des prochaines échéances électorales, il trouve normal et dans le droit fil de la pratique parlementaire que XLD doit céder son poste de leader de l’opposition au PTr avec Arvin Boolell aux commandes. Il explique que la Constitution prévoit que les postes de leader et du Whip reviennent au parti de l’opposition ayant une majorité d’élus. « Il y a eu ce front commun avec le MMM et le PMSD et finalement, nous avons cédé le poste à XLD. Aujourd’hui, avec les événements en cours, l’objectif est de botter le MSM hors du pouvoir au plus vite. Sur ce principe, tous les partis de l’opposition sont d’accord, mais il faut trouver la bonne formule. Le PTr a obtenu 33% du suffrage contre 37% du GM. Alors évidemment, pour nous, la bonne formule c’est que la locomotive de n’importe quelle alliance soit le PTr. Dans la logique des choses, il y aura, sans doute, une discussion. Mais ce n’est pas juste le poste de leader de l’opposition qui est important. Nou bizin guette le bigger picture, et c’est quoi? Nou bizin tire MSM du pouvoir. »

Le député de Mahébourg pense que tous les partis de l’opposition doivent trouver un accord. Un accord d’alliance non pas pour l’intérêt du PTr, du MMM ou du PMSD, mais pour l’intérêt du pays. Il explique que la population a pu mesurer le danger quand un parti tel que le MSM arrive au pouvoir. Il prend pour exemple ce que les membres de ce parti ont fait avec le Parlement et les autres institutions. « L’ingérence partout… Pe roule bann institutions couma dire pe roule Sun Trust. Il est important de get rid du MSM car l’intérêt de la population doit primer. Nous devons venir avec un projet de société et nous devons tout faire pour ne pas répéter les mêmes erreurs qu’a faites le MSM. Tout cela doit être discuté. Et plus important encore, il faut qu’il y ait LA personne. Les Mauriciens ont tendance à se fier au leadership quand ils vont voter. »

Pour un accord d’alliance des partis de l’opposition

Une façon pour lui de convaincre que le poste doit revenir à Navin Ramgoolam car, selon lui, l’électeur se décide par rapport à l’expérience du leader. « C’est pourquoi le plus important dans une alliance c’est d’avoir un leader expérimenté qui aura la poigne pour prendre les décisions. Pas ce leader que nous avons, ce PM qui doit se soumettre aux pressions de Lakwizinn et les pressions des groupes socioculturels. Pas coum sa ki roule enn pays. » Il définit ce leader avec une précision qui ne fait aucun doute sur son choix et son allégeance. « Il faut un leader qui n’a aucun compte à rendre à personne si ce n’est à la population. Qui osera prendre les décisions, mêmes impopulaires, dans l’interêt du pays ».

Et dans le contexte, la seule personne pour cela, selon lui… c’est Navin Ramgoolam.
Cependant, il met en garde le parti : « Il ne faudra pas faire les mêmes erreurs du passé. Nous ne faisons plus face à cette population d’avant. Les jeunes sont éduqués. À travers les réseaux sociaux, la population est bien informée et elle veut voir du renouveau, une autre façon de faire la politique. Il faut un leadership renouvelé et dynamique et aussi un changement en terme d’image. Je ne dis pas qu’il faut éliminer les vieux pour mettre les jeunes, non! Il faut changer la façon dont nous faisons la politique. »

Même s’il dit fortement souhaiter aller aux élections en alliance avec tous les partis de l’opposition en ayant trouvé la bonne formule et les conditions nécessaires, il n’exclut pas d’aller seul. Pour lui, « la bonne formule c’est qu’il faut que le PTr soit la locomotive de cette alliance. Nous devons tomber d’accord sur un projet de société. Nous devons revoir plusieurs choses comme le système électoral. Je ne parle pas des élections mais du bureau du commissaire électoral, du ESC, des pouvoirs de l’ESC. Il faut un ESC indépendant et qui a les pouvoirs nécessaires pour superviser les élections.

Pas d’ambition démesurée pour l’instant

Saviez-vous que la section 41 de la Constitution stipule que l’ESC a les pouvoirs as may be prescribed ? Or, jusqu’à aujourd’hui, aucun pouvoir ni fonction n’a été prescrit. L’ESC n’a pas de pouvoir de sanction. C’est tout cela que nous devons revoir ». Il parle aussi de la révision du fonctionnement du Parlement et s’appuie sur la façon de faire du Speaker actuel. Il rappelle que les standing orders de la House of Commons ont été amendés en Angleterre, alors qu’à Maurice, nous continuons de les suivre même s’ils sont archaïques. Il dit falloir revoir cela car ces loop holes qui existent dans le standing orders continueront à favoriser des abus au Parlement.

« It cannot be business as usual dans un prochain GM.  Il faut un complete change dans la façon que nous faisons la politique. C’est ce que nous proposons. Ce sont nos conditions. Actuellement, nous entendons les conférences de presse chaque semaine où chaque parti avance ça ou ça. Mais si les partis de l’opposition sont intéressés par l’unification, il faut une vraie discussion en ce sens », conclut-il sur le sujet d’une éventuelle alliance.

Ritesh Ramphul, qui assume avec plus de confiance et de maturité son rôle au Parlement et au sein de son parti, récuse toute ambition de sa part, en ne fermant pas complètement la porte « Chaque chose en son temps ». Il raconte qu’il est un enfant qui a grandi dans sa circonscription et qu’il a voulu faire de la politique pour pouvoir servir les habitants de sa circonscription et son pays. « Mo adore mo circonscription et j’essaye de la servir au mieux de mes capacités et de mes compétences. J’avais l’ambition de faire de la politique et c’est fait. Mais de là à servir le pays dans une autre capacité, much higher, on va voir. Ce n’est pas à moi de choisir, c’est à la population de faire son choix. Et au PTr, il y a des instances qui décident. De par mon caractère, je n’ai jamais eu d’ambition démesurée, que ce soit dans mon travail ou dans la politique ».

En guise de conclusion, Week-End lui a demandé ce qu’il souhaitait pour l’année 2022. Son premier souhait est que les conséquences du Covid sur le plan local et international soient atténués. Autrement, c’est plutôt un vent de pessimisme et d’interrogations qui l’anime et il appelle la population à rester on alert et à collaborer avec l’opposition pour pouvoir tirer le pays des mains de ce GM. « En ce qui concerne le pays, je suis très tracassé, surtout par rapport à l’économie. Nous survivons avec des emprunts, des dettes et grâce aux réserves. Je me pose la question : où le GM trouvera-t-il l’argent pour le prochain budget ? Le GM pe kapav embet la population en donnant des emplois dans le secteur public. Mais que se passera-t-il dans le secteur privé ? Aurons-nous assez d’investissements ? Si ce n’est pas le cas, nos jeunes auront-ils un emploi ? Il va falloir faire très attention, surtout que nous avons affaire à un GM prêt à entraver les droits des citoyens et à les persécuter, comme cela a été le cas avec les habitants de Bambous-Virieux. »

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