(Post-Wakashio) Vincent Degert (UE) : « Comme il y a des aiguilleurs du ciel, il en faut aussi de la mer »

L’ambassadeur de l’Union européenne (UE), Vincent Degert, a visité en début de semaine l’Île aux Aigrettes et Petit-Bel-Air, où des opérations de nettoyage effectuées par la firme Polyeco sont en cours. Tout en faisant état de son appréciation du progrès réalisé, il constate que ces travaux dureront encore « un certain temps » avant que le lagon du sud-est ne retrouve son état d’origine, après la marée noire provoquée par l’échouage du Wakashio. Il plaide également pour des réglementations fortes et une meilleure surveillance des mouvements maritimes pour éviter ce genre de catastrophe à l’avenir.

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Très impliqué dans la cause environnementale, le chef de la délégation de l’UE était déjà à Mahébourg il y a un mois pour sensibiliser sur l’importance du nettoyage. Sa visite à l’Île aux Aigrettes et à Petit-Bel-Air lui a permis de constater de visu le progrès accompli grâce aux équipes sur place. « Je vois que le travail progresse, malgré les difficultés. C’est aussi une bonne chose que les gens de la région, affectés par ce désastre, puissent avoir du travail. Malheureusement, il y a encore beaucoup d’huile encastrée dans les cavités et dans le sable. C’est un travail de longue haleine qui, d’après ce que je comprends, durera jusqu’à Noël, voire jusqu’à février de l’année prochaine. »

À l’Île aux Aigrettes, les pêcheurs procèdent au nettoyage du pourtour  de l’île calcaire. Après le lavage à pression, on procède au brossage des rochers pour enlever l’huile encastrée. Nelvi Armoogum, le chef d’équipe, explique que le travail se fait en deux temps. « On est sur les lieux à 7h30 du matin. On opère par rapport à la marée. Quand elle est basse, on procède au nettoyage de la partie donnant dans la mer. Et quand la marée monte, on nettoie la partie supérieure, hors de l’eau. » La difficulté, c’est que de par la nature de l’île, il y a des cavités un peu partout. « Lors de la marée noire, de l’huile est entrée dans ces cavités. À la marée haute, l’eau entre dans ces cavités et ramène l’huile dans la mer. C’est pour cela que nous devons recommencer le travail plusieurs fois au même endroit. »

À ce sujet, Nikos Vlachos, Operations Manager de Polyeco, indique que tout le périmètre de l’Île aux Aigrettes a déjà été nettoyé une première fois. « On refait le tour pour vérifier s’il y a d’autres dépôts d’huile. Et on va le refaire encore, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de traces. » Pour l’heure, l’île reste toujours fermée au public, contrairement à ce qu’avait prévu la Mauritian Wildlife Foundation (MWF), car le nettoyage se poursuit, ajoute-t-il, rappelant que son équipe travaille en partenariat avec l’ONG. « Une équipe de la MWF repère les lieux où il y a des plantes contaminées, et nous procédons au nettoyage. »

À Petit-Bel-Air, les équipes procèdent au “flooding”, opération consistant à insérer un tuyau projetant de l’eau sous pression dans le fond pour faire remonter l’huile à la surface. Celle-ci est ensuite collectée à l’aide de “pads” absorbants. Ici également, le travail se fait en fonction des marées. La même opération est souvent répétée, car l’huile est enfouie dans les profondeurs.

Devant une telle difficulté, Vincent Degert parle de la nécessité de prévenir de tels accidents. « Les îles sont très vulnérables. Ce qui s’est passé ici peut se produire à La Réunion ou à Madagascar. Ce sont de petites îles, mais avec des zones maritimes gigantesques à surveiller. Il faut mettre les moyens en commun et pouvoir gérer ensemble quand une catastrophe survient. »

À ce sujet, il affirme que l’UE a déjà mis en place des outils de travail à travers la COI. Il y a ainsi un centre à Madagascar qui assure le “monitoring” de  tous les navires circulant dans la zone. « J’ai appris l’autre jour que 5 000 tankers traversent l’océan Indien chaque année. Donc, on comprend le risque, qui est absolument énorme. Comme il y a des aiguilleurs du ciel pour surveiller les avions, il faut aussi des aiguilleurs de la mer pour surveiller les bateaux. On a vu avec le Wakashio les conséquences dramatiques que cela peut avoir sur le long terme sur l’écosystème et sur les populations, qui sont directement affectées. Il faut éviter que cela se reproduise. »

Il ajoute que cela dépend également de la volonté des pays. La COI, dit-il, a ainsi proposé un certain nombre d’actions dans ce domaine. « Nous, on soutient un gros programme de sécurité maritime à hauteur de 42 M d’euros. C’est un investissement très, très lourd qu’on a fait. Il faut bien utiliser cela et, ensuite, il faut que les États mettent en commun non seulement leur savoir-faire, mais aussi leur législation pour imposer des règles et des normes afin de mieux protéger les côtes ici. Il faut travailler pour que ce type de catastrophe ne se reproduise plus. Il va falloir réfléchir avec les autorités, les transporteurs et l’ensemble des partenaires pour qu’on puisse préserver cet environnement magnifique. »

Vincent Degert précise que l’UE travaillera avec l’Université de Maurice pour évaluer l’impact sur l’écosystème marin sur le long terme. Il s’agira de déterminer si, au-delà du nettoyage, il y aura des choses à faire à moyen et long termes. « Et puis il faudra réfléchir au corridor de transport pour la région et avoir des systèmes d’alerte qui fonctionnent correctement quand il y a des déviations. »

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