RAPPORT 2020 – National Human Rights Commission : La pandémie met à mal les droits humains

  • – Le président de la CNDH plaide pour que les prisonniers au-delà de 70 ans soient relâchés sur parole pour être pris en charge par leur famille
  • – Des Regional Specialised Courts recommandées pour se pencher sur les cas de “gender-based violence”
  • – L’impact négatif du confinement sur les personnes âgées et handicapées souligné dans le rapport

Tout en relevant, dans son analyse circonstanciée de la situation du respect des droits de l’homme à Maurice en 2020, qu’il n’y a pas eu de « sérieuses violations » des droits humains durant la période en revue, Dheeraj Seetulsingh fait observer qu’« avec le progrès économique et l’avènement des nouvelles technologies, les droits humains doivent évoluer et s’adapter aux nouvelles situations, tout en préservant les libertés fondamentales ».

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L’impact du Covid 19 sur les droits humains ne peut être négligé car la pandémie a mis à mal les droits des personnes vulnérables. Parmi ses recommandations, le droit des LGBT, la situation du fléau de la drogue ou encore les plaintes reçues en prison concernant le non-respect des droits des détenus.

Avec la pandémie de Covid-19 et le confinement, la protection des droits de l’homme a été au premier plan, en particulier pour ceux se trouvant dans une position vulnérable. « Public health measures to contain the pandemic impacted on the human rights of citizens, but they were necessary in the circumstances », écrit le rapport. Pour contrôler toute propagation probable de l’épidémie dans les centres de détention, les autorités ont décidé de libérer quelque 400 détenus dont la peine d’emprisonnement se terminait en 2020. Cela a allégé la tâche des gardiens de prison et leur a permis de mettre en place un système de distanciation sociale.

Le président de la CNDH rappelle les devoirs de l’État. « La société mauricienne est de plus en plus sensibilisée sur la question des droits humains et accueille de nouveaux développements. Alors que les citoyens deviennent de plus en plus conscients de leurs droits, l’État prend également conscience de ses obligations, comme en témoignent ses rapports réguliers aux instances appropriées des Nations unies », dit-il.

La situation en prison

La National Preventive Mechanism Division (NPMD) en fait partie. Cette structure, mise sur pied en 2014, selon les recommandations de l’OPCAT (The Optional Protocol to the Convention against Torture and other Cruel, Inhuman or Degrading Treatment or Punishment), doit s’assurer de la qualité du traitement reçu par les détenus. Il y a maintenant en prison des détenus qui ont plus de 70/75 ans. La NHRC recommande qu’ils soient libérés dans les cas qui sont conformes à l’article 51 de la Reform Institutions Act et qu’ils sont pris en charge par leurs proches. La NHRC recommande aussi que la loi soit modifiée pour prévoir des amendes moins lourdes et pour que les contrevenants soient libérés pour bonne conduite.

Pendant le confinement, la NPMD n’a pas pu effectuer de visite dans les lieux de détention mais néanmoins, elle a continué à recevoir et à traiter les plaintes par courriel. De juillet 2020 à octobre 2020, la NPMD a effectué 68 visites dans des centres pénitentiaires. Elle a constaté cinq décès de détenus de causes naturelles comme un infarctus, une septicémie ou une crise d’asthme. La NPMD a aussi fait état de manquements dans les prisons comme l’absence de caméras CCTV dans des cellules, et l’accès restreint à des facilités sanitaires dans les cellules. La NPMD a rappelé, par ailleurs, le besoin de s’assurer que la cellule d’un prisonnier est privée de moyens pouvant faciliter son envie de mettre fin à ses jours.

Droits LGBT

De même, poursuit Dheeraj Seetulsingh dans son rapport, les droits de la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels (LGBT) viennent en force sous les feux de l’actualité. Il rappelle que l’Equal Opportunities Commission reconnaît déjà l’existence de l’orientation sexuelle et interdit la discrimination sur cette base. Il fait ressortir qu’un Sexual Offences Bill, avec une clause pour la décriminalisation de la sodomie entre adultes consentants, avait été référé à un Select Committee de l’Assemblée nationale, mais est maintenant caduc. « It is usual to refer to the LGBTQ community as being a separate group. But nowadays LGBTQ persons are being considered as ordinary members of society and lead a normal life – whether in employment, in education, in cultural activities », écrit le rapport.

Nouvelles législations

Le rapport de la NHRC fait état de plusieurs nouvelles législations durant la pandémie pour contribuer au respect des droits humains. « The COVID-19 Act has amended some 56 existing legislations which relate to various sectors including inter alia public health, employment, consumer protection, environment protection, banking and tourism. The COVID-19 Act has introduced several measures under a public health emergency in line with human rights obligations », souligne le rapport.

La Quarantine Act 2020, poursuit-il, qui a abrogé et remplacé la loi sur la quarantaine de 1954, promeut et protège le droit du citoyen à la santé, notamment à la lumière d’une crise sanitaire, comme lors de la pandémie de Covid-19. La loi prévoit un cadre moderne qui établit des mesures appropriées pour la prévention et la propagation des maladies transmissibles.

181 plaintes contre 287 en 2019

La commission a reçu 181 plaintes en 2020, contre 287 en 2019. La baisse du nombre de plaintes est due au confinement. Pendant la période de confinement, la NHRC a reçu 14 plaintes par courrier électronique. Cinq des plaintes reçues concernaient la situation difficile rencontrée par les Mauriciens qui étaient bloqués à l’étranger et qui voulaient être rapatriés. Comme la question du rapatriement ne relevait pas du mandat de la commission, les plaignants ont donc été conseillés de contacter le ministère des Affaires étrangères. Les autres plaintes reçues concernaient principalement le voisinage et problèmes environnementaux. La commission a informé les plaignants que les parties concernées seraient convoquées après la période de confinement afin de trouver une solution à leurs problèmes.

En 2020, il y avait 101 plaignants masculins, contre 54 plaignants femmes. Très peu de plaignants ont signalé des violations des droits de l’homme en vertu du chapitre II de la Constitution. En 2020, nous avons reçu plus de plaintes liées à des problèmes économiques, sociaux, culturels et de droit qui incluent le droit de l’homme au travail, le droit à un niveau de vie suffisant, y compris l’alimentation, l’habillement et le logement, le droit à la santé physique et mentale, le droit à la sécurité sociale, le droit à un environnement sain et le droit à l’éducation. Des Regional Specialised Courts sont, par ailleurs, recommandées pour se pencher sur les cas de “gender-based violence”.

La charge provisoire

La pratique de la charge provisoire est assez unique à Maurice et a été critiquée par d’éminents juristes et la société civile. L’article 5 de la Constitution stipule ainsi que « No person shall be deprived of his personal liberty save as may be authorized by law ». La commission note que la détention provisoire prolongée accroît la pression sur les infrastructures pénitentiaires, le personnel et les ressources. Elle réduit les perspectives de santé et de réadaptation des détenus. Cela constitue de sérieux risques pour la santé et la sécurité publiques comme on l’a vu en 2020 avec la pandémie de Covid-19, lorsque la décision a été prise de libérer près de 500 détenus dans le respect des normes de santé.

Au cours des dernières années, le rapport entre les prévenus et les condamnés a été en constante augmentation, dépassant celle des condamnés en 2020. Avec la même capacité, les autorités pénitentiaires ont dû revoir leur système de gestion.

Les prisons à Maurice sont classées selon certains critères, à savoir le niveau de sécurité, les installations fournies, le profil et le statut des détenus, entre autres. L’admission se fait exclusivement par la New Wing Prison pour hommes, puis ils transiteraient par la prison centrale de Beau-Bassin ou la GRNW Prison, où les prévenus constituent l’essentiel de la population jusqu’à leur condamnation. Un phénomène alarmant est l’augmentation constante du nombre de personnes en détention provisoire. Avec l’inculpation provisoire, les prisons mauriciennes comptent désormais plus de prévenus que détenus condamnés.

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