Riambel : dans le froid hivernal, des bébés d’un à 8 mois dorment à la belle étoile

Cinq bébés d’un à huit mois, 18 enfants d’un à cinq ans et 29 autres de 6 à 15 ans. Cinquante-deux au total : tel le nombre d’enfants qui dorment actuellement sous des tentes aménagées à Cité Dieu, à Riambel, après que les forces de l’ordre ont détruit les maisons construites illégalement sur les terres de l’État. Ces chiffres ont été compilés la semaine dernière, soit après une rencontre avec les squatteurs à Riambel, organisée par les différentes Ong de la région. Étaient présents des représentants de l’Église catholique, des habitants du village de Surinam ainsi que des membres du Conseil de district de Savanne.

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La réunion, qui était animée par les pères Gérard Mongelard et Jean-Claude Véder, ainsi que la présidente du Groupe Social de Souillac, Priscilla Bignoux, avait pour but, dans un premier temps, de faire une évaluation sur le terrain en écoutant les doléances des squatteurs et, ensuite, trouver des solutions pour reloger ces familles. Pour rappel, environ une trentaine de maisons avaient été construites illégalement sur les terrains de l’État à Cité Dieu, Riambel.

Priscilla Bignoux, qui avait la responsabilité de recueillir les données auprès de ces familles, témoigne : « Ces enfants dorment sous des tentes de fortune, aménagées avec l’aide de quelques volontaires, et dans des conteneurs, et ce depuis le 2 mai, après que les forces de l’ordre avaient démoli leurs maisons. Cela fait mal au cœur de voir ces enfants dormir et grelotter dans le froid chaque matin dès qu’ils se réveillent. Chaque être humain, qui a un peu de bon sens, ne peut rester insensible face à une telle situation. »

Engagée dans le social depuis de très longues années, Priscilla Bignoux connaît la région comme sa poche. « Comparée à d’autres endroits, la réalité des squatteurs de la Cité Dieu est complètement différente. Li enn pos de povrete kot ena plizir problem a lafwa », dit-elle. Parmi les 108 demandes qui ont été faites par les familles auprès des autorités pour obtenir une maison, seulement 60 ont été considérées. « Ena fami ki pe viv dan bann sitiasion extrememan difisil. Ena fami pe viv dan de lasam avek plizir fami de zenerasion an zenerasion. Ena osi parmi ki finn fer zefor pou esey fer sakrifis pou epargne pou kapav gagn enn twa. Ena bann per de fami ki pena enn travay stab », indique-t-elle.

Selon Priscilla, qui dit avoir étudié de près la politique du logement à Maurice, elle avance qu’elle « ne répond pas aux besoins des pauvres du pays ». Elle ajoute qu’il faut revoir les critères et étudier cas par cas avant d’allouer une maison à un bénéficiaire. « Il y a des cas à Souillac, où des familles ont eu une maison et n’y sont jamais venues habiter. Pie pe pous lor lakaz », déplore-t-elle. Elle poursuit : « Dans certains cas, des maisons vides ont été livrées et ensuite sous-louées par les propriétaires. » Toutefois, dit-elle, il y a aussi ceux qui ont un Plan d’Épargne Logement (PEL) depuis longtemps, mais qui sont toujours en attente d’un toit. « Bizin reget tousala e donn lakaz bann dimoun ki vreman dan lebezwin », a insisté Priscilla Bignoux.

Lors de la réunion, les différents intervenants ont parlé de la nécessité pour que chaque citoyen ait une maison. « C’est un droit fondamental. Nous sommes dans un pays de droit et, lorsqu’il n’y a pas de méritocratie et que le droit d’un citoyen est bafoué, cela le pousse à la révolte, à la frustration et la personne ne respecte pas les lois. Sa amenn bann sitiasion ki nou pe trouve inpe partou zordi », a expliqué Priscilla. D’où la décision de mettre sur pied le “Komite Enn twa-Enn drwa”, dont les membres n’ont pas manqué d’observer que certaines familles étaient venues occuper les terres de l’État pendant le confinement. « C’était très difficile pour ces gens qui devaient rester confinés dans leurs maisons avec plusieurs membres de leur famille et leurs enfants », dit-elle.

Après la réunion, le père Gérard Mongelard a fait une fiche et a demandé aux squatteurs, avec l’aide des volontaires, de la remplir pour connaître l’ampleur du problème. Ces fiches devaient être soumises aux autorités qui, dit le prêtre, se baseront sur ces données pour comprendre l’ampleur des problèmes auxquels sont confrontés les squatteurs. Les deux prêtres Mongelard et Véder ont pris l’engagement de suivre de près ce dossier. « Nous allons faire les choses en toute transparence », disent-ils.

Le “Komite Enn twa-Enn drwa” a rencontré le ministre du Logement et des Terres, Steven Obeegadoo, mardi, où étaient aussi présents les pères Gérard Mongelard et Jean-Claude Véder, ainsi que Priscilla Bignoux, entre autres. « Le ministre a prêté une oreille attentive à nos suggestions et a promis qu’il allait étudier le dossier au plus vite. Une réunion sera fixée entre le père Mongelard et le ministre Obeegadoo pour un suivi et pour trouver des solutions », a confié Priscilla Bignoux au Mauricien.

Les quelques suggestions faites par le “Komite Enn twa-Enn drwa” sont : « Étudier la possibilité de trouver un logement temporaire ou de construire des longères pour ces familles et, plus particulièrement, pour ces enfants en bas âge qui dorment sous les tentes en attendant que le Covid-19 Solidarity Fund aille de l’avant avec un projet de logement; et construire des logements sociaux ou mettre à la disposition de ces personnes le concept de “Site and Services” pour permettre à la National Empowerment Foundation de construire des maisons sur ces terrains pour ces familles. » Priscilla Bignoux poursuit : « Nous ne sommes pas là pour encourager les squatteurs à continuer à vivre dans l’illégalité, mais pour les soutenir et trouver des solutions durables. Nou bizin pa zis donn dimoun pov lakaz apre lav lame ar zot. Fode pa ki tou aret la. Bizin kapav akonpagn zot, ankadre zot. »

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