ÉDUCATION GRATUITE: Au coeur d’une économie parallèle et d’un marché juteux

L’éducation est plus que jamais présente dans l’actualité en cette fin d’année scolaire avec les débats sur la pertinence d’octroyer un jour de congé aux enseignants à l’occasion du Teachers’ Day à la veille des examens. Et voilà qu’un syndicat d’enseignants demande au ministre de l’Éducation d’envisager la possibilité de décréter un « jour férié » pour honorer la profession. Une requête qui n’est pas sans susciter des commentaires au sein même des professionnels de l’éducation : « Ridicule », « farfelue », « Nonsense ! » et « Abus » sont les plus entendus, bien que tous reconnaissent l’importance et l’immense contribution des éducateurs au développement de la personne humaine. Cette semaine a été aussi marquée par l’annonce par le ministre Vasant Bunwaree d’un énième forum débat national sur la réforme du CPE, et déjà des voix s’élèvent contre son éventuelle abolition. La grande bataille demeure l’abolition du système de sélection et l’abolition du ranking. Le bras de fer perdure entre les différents ministres de l’Éducation qui ont essayé d’enclencher des changements majeurs et tant les enseignants que les parents et certaines organisations socioculturelles, toujours les mêmes depuis trois décennies. À un moment où l’on se targue de notre système d’éducation gratuite, les parents investissent un budget énorme dans l’éducation de leurs enfants. Le budget du ministère a atteint Rs 11, 6 milliards, dont Rs 3,7 milliards consacrées aux salaires et autres dépenses du personnel. La part du lion de ce budget va à l’éducation primaire et secondaire. Mais au bout des douze ans de scolarité gratuite, le système ne bénéficie qu’à une poignée considérée comme « élite » : seuls 9 000 élèves terminent leur parcours sur les 27 000 qui entrent au primaire. Le taux d’échec demeure inchangé en fin de cycle primaire : entre 30 et 40 % depuis 30 ans. Le Mauricien propose à ses lecteurs quelques “insights” révélateurs d’un système vicié.
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Examinateurs de SC/HSC : jusqu’à Rs 50 000 en une saison
La somme payée aux « examinateurs » et « organisers » pour l’organisation et le déroulement des examens pratiques d’un certain nombre de matières – tels que Sciences, Food & Nutrition, Arts & Design, Design & Communication et Dress & Textiles – est loin d’être négligeable. Quelques-unes de ces matières sont considérées comme des « scarcity areas » et, de ce fait, il y aurait un petit « pool » d’examinateurs chaque année. Un « cercle très fermé » disent certains.
Et comme une image vaut toujours mieux qu’un long discours, laissons les chiffres parler :
– Rs 1 200 par session pour un examinateur de Food & Nut (HSC), qui est aussi très souvent l’examinateur de Food Studies (SC). En outre, il perçoit une allocation supplémentaire pour le planning des examens ainsi qu’une autre allocation de Rs 150 pour le « monitoring ». Il faut savoir qu’il y a environ 12 sessions pour les examens de SC et six pour le HSC.
– Un examinateur de Fashion & Fabrics percoit une somme de Rs 150 par candidat pour le « course work assessment » et une somme de Rs 75 par candidat pour le « practical work assessment ».
– Un examinateur d’Arts & Design obtient, lui, Rs 480 par session de trois heures et Rs 750 par session de six heures
– Le Chief organiser de Food & Nutrition gagne Rs 4 300 pour l’organisation globale des examens. Il peut aussi agir comme « examinateur », percevant alors les allocations relatives à ce poste.
– Le Chief organiser pour les Sciences obtient Rs 14 000 pour l’organisation globale des examens tandis que son assistant gagne, lui, Rs 6 000.
– Un « organiser » pour les Sciences peut obtenir jusqu’à Rs 2 200 par session avec un maximum de 50 candidat.
– Le chief organiser d’Art & Design gagne Rs 5 300.
A noter qu’un « examinateur » pour une de ces matières pratiques peut aussi agir comme « supervisor » pour d’autres sujets. Selon cette logique, un examinateur peut ainsi toucher une somme totale de Rs 50 000 par saison d’examens de SC/HSC, qui dure environ 30 jours. Outre ces allocations, examinateurs, supervisors et organisers se voient également attribuer des allocations de transport.
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SC & HSC — Food & Nutrition : service taxi pour examinateurs !
Des examinateurs de Food & Nutrition ont protesté durant la semaine écoulée contre l’abolition cette année d’un service de taxi mis à leur disposition pendant le déroulement de examens. Il y a au total une vingtaine d’examinateurs pour le Food Studies (SC) et pour Food & Nutrition (HSC). Chacun d’entre eux bénéficiait jusqu’à l’année dernière d’un service de taxi individuel, soit à partir de leur lieu de résidence jusqu’au centre d’examen et back home. Ce service “taxi” personnel en vigueur depuis de nombreuses années s’avère très coûteux pour le MES. Dépendant du trajet et de la durée de l’attente du taxi, le coût de ce service transport par jour pour un seul examinateur peut atteindre les Rs 3 000. Selon nos informations, l’organisme aurait dépensé en 2010 uniquement en taxi pour ces examinateurs de “food & nutrition” … Rs 210 000 ! Ces examinateurs refusent l’offre d’un mileage allowance comme préconisé par le PRB pour utiliser leur propre véhicule. Le MES a opté cette année pour un transport regroupant des examinateurs allant dans la même direction, mais certains d’entre eux s’y opposeraient. Le nouveau système les obligerait à changer certaines habitudes. À signaler que le poste d’examinateurs pour le SC/HSC est confié aux enseignants avec plusieurs années de métier.
Par ailleurs, le refus catégorique des supervisors (enseignants de carrière) d’avoir cette année un accompagnateur pendant le transport des questionnaires des locaux du MES jusqu’au centre d’examens – une mesure de sécurité préconisée par Cambridge aux pays participant à ses examens –  est sévèrement commenté dans plusieurs milieux. Soulignons que ces questionnaires sont gardés sous haute sécurité au MES (coffre-fort et présence policière en permanence).
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Matières techniques, matières coûteuses
Des matières techniques et artistiques, proposées au syllabus de HSC et comprenant Arts & Design, Food & Nutrition, Dress & Textiles, Arts, Computer, entre autres, nécessitent un déboursement conséquent de la part des parents pendant les deux années de préparation. Des candidats en Art & Design dépensent aujourd’hui près de Rs 2 000 par trimestre pour l’achat du matériel nécessaire à la réalisation de leur course work
L’investissement est nettement plus conséquent pour les candidats en Food & Nutrition. Une candidate de cette matière confie qu’elle a dépensé au cours de l’année plus de Rs 500 par semaine pour les classes de pratique. Selon ses calculs, son investissement pour les deux ans (préparation des différents types de plat et de son course work) se chiffre à Rs 20 000. Le programme de SC comprend la préparation de deux plats chaque semaine et celui de HSC, trois plats. Faute de moyens financiers de bons candidats abandonnent cette matière en arrivant en HSC.
Le course work obligatoire pour les matières techniques comprend la partie dissertation d’un projet présenté dans un portfolio d’une centaine de pages et la réalisation de l’objet mentionné dans le projet.
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PRIMAIRE: Les petits “bonus” aux enseignants
Enhancement Programme — Pour les trois jours de cours de Enhancement Programme (EP) par semaine à l’intention des élèves de Std IV, le personnel perçoit les allocations mensuelles suivantes : Rs 3 000 pour les enseignants, Rs 3 800 pour les head masters et Rs 4 200 pour les inspecteurs. Pour le EP destiné au Std III, les enseignants obtiennent Rs 3 000. Les profs de langues orientales touchent Rs 200 par session.
Examens du CPE — Invigilation Fees : Rs 2 293 pour les Presiding invigilators, Rs 2 412 pour les Assistant presiding invigilators et Rs 2 227 pour les Invigilators.
Correction fees — Les personnes engagées dans la correction, dépendant de leur grade, reçoivent entre Rs 3 738 et Rs 5 292.
Kreol morisien — Les enseignants qui ont finalement accepté d’enseigner le kreol morisien – introduit en Std I à compter de janvier prochain –, perçoivent un stipend de Rs 1 000 mensuellement pendant la durée du programme de formation pour cet enseignement. Cette formation, qui a commencé au mois d’août, prendra fin le mois prochain.

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