Dr Vasantrao Gujadhur (ex-No 1 de la Santé) : « Rien pour améliorer ce secteur, alors qu’il y a une foule de choses à faire ! »

– « Maurice ne disposant d’aucun laboratoire pour les Highly Infectious Materias’, entre autres, comment se comparer à Singapour ? » – « Le Health Centre de Mahébourg infesté de rats, tandis que celui de Flacq n’a même pas de toilettes pour le staff féminin »

“Scandaleux !” C’est le mot qu’il utilise après avoir, dit-il, “bien pris le temps de lire le budget.” L’ancien Director of Health, le Dr Vasantrao Gujadhur, se dit “choqué et écoeuré de voir qu’il n’y a pas une ligne pour améliorer le service de santé publique.

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C’est honteux !” Pourtant, fait bien remarquer le médecin, “Renganaden Padayachy a démarré la lecture de son budget en évoquant le Covid-19 : cela m’a donné à penser qu’il allait mettre l’accent sur la contribution importante des Frontliners de la santé, qui se sont démenés comme de beaux diables, qu’ils soient à l’ENT Hospital, le centre névralgique, dans les autres hôpitaux nationaux, ou dans les centres de santé disséminés à travers le pays ! Ils méritent qu’on les salue, d’une part. Et surtout, que ce gouvernement reconnaisse leur contribution immense dans le contrôle de la pandémie, chez nous. Je pensais ainsi que ce secteur allait être renforcé. Mais que nenni ! Rien ! À peine quelques lignes pour parler de vagues recrutements, sans plus.” Il continue : “Pas de création de nouveaux postes, de recherche de techniciens et experts plus pointus pour consolider et accompagner les équipes déjà éreintées et lasses, tant ces deux dernières années ont été intenses. C’est un désastre.”

Vasantrao Gujadhur fait remarquer qu’“alors que j’étais Director of Health, j’ai fait des recommandations pour que les Public Health Centres du pays – nous en avons 13 dans différentes régions – bénéficient d’un Lifting.” Il élabore : “le centre de santé de Souillac est couvert avec… un prélart ! Et cela date de 2019. Quand j’étais à la Santé, j’avais fait transférer le staff à l’hôpital de Souillac pour leur sécurité. Mais avec le Covid-19, ils sont retournés dans les locaux… qui n’ont pas été réparés, entretemps.” Mais ce n’est pas tout, ajoute le médecin. “Des 13 centres, plusieurs sont tombés en décrépitude depuis des lustres et je n’ai jamais cessé de réclamer des travaux de rénovation et de réaménagement. Afin, d’une part, que le staff qui y travaille le fasse dans des conditions optimales. Et deuxio, comment voulez-vous que le public qui se rend sur place pour des informations, soins, conseils ou doléances, se sente en confiance en pénétrant des lieux qui tombent en ruine ?” Le Dr Gujadhur évoque, à cet effet, “le centre de Bambous, où la tôle est pourrie. Celui de Flacq est tellement insalubre que de grosses plaques de béton tombent, et ce centre n’a pas de toilettes pour le personnel féminin. J’ai appris qu’elles devaient se rendre au centre commercial de la localité pour leurs besoins… Et au centre de santé de Mahébourg, il y a des rats partout ! Et on ose se comparer avec Singapour ? Come on ! Soyons réalistes.”

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L’autre élément qui “manque cruellement dans ce budget, c’est la nécessité d’un Negative Pressure Ward. Il ne s’agit pas d’un luxe, mais d’un Must, avoue-t-il. Avec le Covid-19, et l’émergence de virus comme l’Ebola, et de même que le dérèglement climatique, il faut désormais compter avec de nouveaux virus, dont on ne connaît pas l’ampleur ni les dégâts, il convient d’avoir un Negative Pressure Ward. Il s’agit d’une aile d’isolation, où toutes les dispositions sont prises au cas où l’on identifierait dans le pays, un patient ou des patients présentant des symptômes causés par des virus virulents, comme l’Ebola. Et qu’il faut absolument contenir dans un endroit Safe, afin d’éviter toute contamination. C’est impératif, si on veut un système de santé convenable et adapté à notre époque.”

Le Dr Gujadhur explique : “J’avais établi des contacts avec une équipe de techniciens étrangers qui étaient venus à Maurice pour un Survey. Ils ont soumis leur rapport qui a d’ailleurs été approuvé par le ministère de la Santé, à l’effet de transformer l’hôpital de Souillac, pour qu’il puisse abriter ce Negative Pressure Ward. Pourquoi cet hôpital ? Parce qu’il est le plus proche de l’aéroport, et que cela représente donc, moins de dangers dans les cas éventuels de patients contaminés et qu’il faut rapidement isoler.”

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Le médecin ajoute “il était aussi question d’y démarrer un Renal Transplant Centre. Ces collaborateurs étrangers devaient même former les Mauriciens. Mais malgré toutes les fois où j’ai poussé en avant ce projet, je vois qu’il ne figure toujours pas dans la priorité de la Santé…”

Autre élément que préconise l’ancien patron de la Santé : “l’amélioration et le rehaussement du niveau des laboratoires. C’est inconcevable qu’en 2022, Maurice ne dispose que de laboratoires de Biosecurity Level 1 et 2. Nous devions avoir atteint le palier 4, qui concerne les nouveaux virus. Avec la globalisation, les gens voyagent partout ! Prenons la variole du singe. C’est un virus que l’on ne devait trouver que dans des Remote Areas du continent africain. Or, maintenant, on le détecte partout.” Afin d’être bien armés pour faire face à de tels risques, soutient le Dr Gujadhur, il convient d’avoir des laboratoires spécialisés.  Et ce niveau-là, Maurice  n’y est pas, actuellement. C’est une priorité.

Au même titre, dit-il, que d’avoir “e personnel  adéquat et formé dans le secteur de la santé publique. Comme des Sprayer Men qui , régulièrement, font de la désinsectisation ciblée vers des larves des moustiques partout dans la communauté, afin d’éviter des épidémies de chikungunya, de malaria, de fièvre Dengue, de la peste… Tous ces virus sont propres aux pays de la région. Nous devons nous en protéger. Mais le ministère de la Santé n’a pas suffisamment de ‘sprayer men’. Ne doit-on pas en recruter ?”

Pour conclure, l’ancien patron de la Santé rappelle que “par définition, la santé publique, a pour mission de « promote welfare of the entire population, ensures its security and protects people from spread of infectious diseases and environmental hazards.” Il cite aussi l’OMS, pour ce qui est des trois objectif concernant la santé publique. Il s’agit de Preventing Diseases, Promote Health et Prolong Life. Le Dr Gujadhur s’interroge sir la pertinence de ce mandat à Maurice…

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