Chagos Deal : la House of Lords en face de trois préoccupations

• Les Chagossiens dénoncent la « Profound Injustice » de leur déracinement, appréhendent l’incapacité de Maurice de répondre à leurs aspirations et anticipent « a Greater Chagossian Agency » dans l’administration de l’archipel
• Le rapport de l’IRDC en date d’hier : « Mistrust of the Mauritian government emerged as a consistent theme »

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En marge de la séance du Whole Committee de la House of Lords du lundi 5 janvier prochain devant être consacrée à la dernière étape parlementaire du Diego Garcia Military Base and British Indian Ocean Territory Bill, un nouvel élément a été versé aux débats, hier, en sus de la mise sur pied avec l’appui des conservateurs britanniques d’un Chagos Government in Exile (voir Le Mauricien du 17 décembre). Ainsi, l’International Relations and Defence Committee, présidé par Lord de Mauley et comprenant onze peers, a soumis son rapport sur l’online survey axé sur le Chagos Deal auprès de la communauté chagossienne à travers le monde et principalement à Maurice, au Royaume-Uni et aux Seychelles. Et de toute évidence, des 3 123 soumissions consignées, avec une participation à égalité des Chagossiens installés à Maurice et ceux relogés au Royaume-Uni, le rapport met en évidence le fait que « mistrust of the Mauritian government emerged as a consistent theme. »
Toutefois, l’International Relations and Defence Committee prend le soin de souligner à cet effet que « this view (mistrust) was especially salient among respondents from the UK, but was also noticeable among submissions from people in Mauritius and the Seychelles. » Le rapport indique aussi que « around half of the respondents based in Mauritius indicated some degree of confidence in their government’s ability to facilitate resettlement, for instance—although very few respondents in the UK shared this view. » Par contre, pour justifier cet élément d’absence de confiance, le rapport s’appuie sur le fait que « allegations of corruption, financial self-interest and the ineffectiveness of the Mauritian government were also cited as reasons for mistrust. »
Au-delà de cette perception, les membres de la House of Lords siégeant sur cette instance relèvent trois préoccupations majeures exprimées dans la conjoncture avec la date du 1er février prochain donnée pour la conclusion du traité anglo-mauricien sur la restitution de la souveraineté de Maurice sur l’archipel des Chagos en date du 22 mai 2025. Mais à la condition expresse d’un vote favorable au projet de loi lors de la séance de la rentrée du 6 janvier prochain à la House of Lords.
Cette instance identifie ce qu’elle qualifie de « three clear cross-cutting findings emerged in the qualitative responses », soit sensiblement les mêmes appréhensions exprimées par les Chagossiens lors d’un roundtable en décembre 2024, à savoir :
• the profound injustice felt by Chagossian communities at their displacement and a yearning for redress;
• concern that the Mauritian government may not be able to fulfil the aspirations of Chagossians.
• a clear wish for Greater Chagossian Agency in future decisions made about the islands. »
Le rapport de l’International Relations and Defence Committee, qui se décline en 56 pages et cinq chapitres, procèdent à une analyse des principales étapes de l’exil des Chagossiens de leur archipel natal tout en mettant l’accent sur ce qui devrait être les priorités du jour en faveur de ces mêmes Chagossiens. « Historical marginalisation, neglect and mismanagement, were given as reasons for their scepticism about the goodwill of the authorities. Closely linked to this sense of mistrust is the community’s unequivocal demand for agency. In their responses, Chagossians consistently emphasised that decisions affecting the islands and their future must involve them directly, to ensure their views shape the outcomes that have an impact on their lives », note-t-il d’emblée.
Dans le cadre de la mise à exécution des propositions de l’accord bilatéral, le volet de resettlement est présenté comme « a central concern. » L’exclusion de Diego Garcia dans la liste des îles susceptibles d’accueillir le retour des Chagossiens est remise en question. « For Chagossians, this is more than a technical omission — it is a profound personal and cultural loss », concède le rapport, qui énumère des obstacles à surmonter sur la voie du resettlement, en l’occurrence une infrastructure insuffisante et déficiente, des services de santé limités de même que des problèmes sur le front de l’éducation, du logement et du transport.
Par ailleurs, la question des emplois sur la base militaire de Diego Garcia est également remontée à la surface avec 2 477 Chagossiens sur les 3 123 mettant l’accent sur cette urgence d’avoir de « greater opportunities to work on Dego Garcia. » De ce fait, le rapport préconise que « employment on Diego Garcia, absent from the Agreement, was repeatedly emphasised as essential — not only economically, but as a vital pathway to reclaiming dignity and connection to the islands. »
L’autre priorité exprimée par les Chagossiens lors de cet online survey agréé au niveau de la House of Lords se résume aux Financial Support Mechanisms. Les Chagossiens ont exprimé une préférence pour un direct support en dépit des propositions pour mettre sur pied un Trust Fund avec des fonds de l’ordre de £ 40 millions et un Development Grant annuel de £ 45 millions à Maurice. Ils prônent aussi un « Chagossian-led oversight, majority representation in decision-making, and independent auditing to ensure transparency. » Les core priorities devant être financées sous le guichet du Trust Fund demeurent le logement, l’éducation, la santé et les pensions.
La demande pour une plus grande participation des Chagossiens dans l’administration de l’archipel sous la forme d’une Greater Chagossian Agency a ouvert la voie sur la question délicate de la self determination. À ce chapitre, l’International Relations and Defence Committee a été des plus catégoriques. Cette question ne se pose pas en matière de Droit international. D’abord, cette instance de la House of Lords affirme qu’elle n’a pas abordé de manière délibérée cette réclamation persistance venant d’une partie de la communauté chagossienne pour ne pas entretenir des unrealistic expectations, car elle tombe « outside of the scope of the UK-Mauritius Agreement. »
Plus fondamental est le fait que « International law does not afford the Chagossian people an independent right to self-determination. That right is defined with reference to the entire territory at the point of decolonisation. Since the Chagos Archipelago was treated as part of colonial Mauritius at the time, it is the “people of Mauritius” as a whole who are recognised as having the legal right to self-determination. Chagossians, as a subset of the broader Mauritian population, are therefore not classed as a people with their own right to self-determination. » C’est ce que soutient le rapport.
Toutefois, dans un autre d’ordre d’idées en matière de participation des Chagossiens, le document rendu public hier met en avant le fait que « survey responses from Mauritius, the Seychelles and the UK bolstered the Committee’s previous findings. It is clear that many Chagossians feel sidelined and wish greater involvement in future decision-making. Others noted a sense of shaken trust—survey respondents stated that, after decades spent seeking to achieve justice for their displacement, they are sceptical that the UK’s Agreement with Mauritius will rectify historic wrongs. »
Sur le front de l’environnement, notamment le Chagos Marine Proteced Area, l’engagement du Chagossian Stewardship est considéré comme étant primordial dans la mesure où « the Chagos Archipelago hosts globally significant biodiversity, and respondents emphasised that traditional Chagossian small-scale fishing has always been sustainable and compatible with the delicate ecosystem. » Les principaux facteurs retenus dans le cadre de la préservation de l’environnement marin sont « community-led conservation, sustainable fishing zones, and integration of ancestral knowledge into ecological management. »
En conclusion, avec le rendez-vous crucial du 5 janvier 2026 en point de mire, le comité de Mauley reconnaît que « underlying all practical concerns is a powerful emotional and cultural attachment to the Chagos Archipelago. Diego Garcia, in particular, is described as more than an island — it is the heart of a people’s history, and respondents spoke of wanting to live and die in their homeland, preserve cultural heritage, and reconnect with ancestral practices. »

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