Clinique ferrière : Dr Vicky Naga : « Soulager la souffrance, c’est respecter la dignité humaine »

Les soins palliatifs ne se résument pas à l’accompagnement de la fin de vie. Ils représentent une approche globale du patient et de sa famille face à la maladie grave. C’est ce qu’a tenu à rappeler samedi le Dr Vicky Naga, responsable du département de soins palliatifs de la Clinique Ferrière, à l’occasion du 2e Congrès régional de soins palliatifs, organisé ce samedi en collaboration avec plusieurs professionnels de santé de Maurice, de La Réunion et de France.
« Les soins palliatifs visent avant tout à améliorer la qualité de vie du patient, qu’il soit adulte ou enfant, et de ses proches », explique le Dr Naga. « Il s’agit de prévenir et de soulager la souffrance par une identification précoce, une évaluation correcte et un traitement adapté de la douleur, mais aussi des problèmes psychologiques, sociaux ou spirituels. »
L’approche palliative, insiste-t-il, ne s’arrête pas à la prise en charge des symptômes physiques. « Nous devons accompagner la personne dans toutes les dimensions de sa vie, jusqu’à son dernier souffle, et soutenir sa famille dans cette épreuve. C’est une démarche profondément humaine et éthique. »
Reconnu par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme une composante du droit fondamental à la santé, le soin palliatif doit être intégré aux services médicaux, tout en tenant compte des besoins et des préférences de chaque individu. Les chiffres sont parlants : plus de 50 millions de personnes dans le monde nécessitent chaque année des soins palliatifs, mais à peine 12% d’entre elles y ont réellement accès. Selon le Dr Naga, « ces inégalités entraînent des souffrances inutiles, alors qu’une meilleure accessibilité permettrait d’éviter des hospitalisations répétées et de rendre le système de santé plus efficace ».
Les maladies chroniques représentent la majorité des situations nécessitant un accompagnement palliatif : maladies cardiovasculaires (38,5%), cancer (34%), maladies respiratoires chroniques (10,3%), sida (5,7%) et diabète (4,6%). D’autres pathologies, comme la sclérose en plaques, la maladie de Parkinson, la démence ou l’insuffisance rénale, appellent également une prise en charge adaptée.

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« Soulager la douleur, un devoir éthique »

À Maurice comme ailleurs, la gestion de la douleur reste un enjeu central. « La douleur et la difficulté à respirer sont les symptômes les plus fréquents et les plus redoutés », rappelle le Dr Naga. « Huit patients sur dix atteints de cancer ou du sida souffrent de douleurs modérées à sévères à la fin de leur vie. Dans ces situations, les opioïdes jouent un rôle essentiel. »
Ces traitements, ajoute-t-il, ne concernent pas seulement la douleur : « Ils permettent aussi de soulager d’autres symptômes physiques très pénibles, comme la dyspnée. Contrôler ces manifestations dès les premiers stades, c’est une obligation morale et médicale. Soulager la souffrance, c’est respecter la dignité humaine. »
À Maurice, les soins palliatifs sont encore un champ émergent, mais les progrès sont notables.« Nous avançons vers une approche multidisciplinaire, où médecins, infirmiers, psychologues, sociologues, mais aussi familles et aidants travaillent ensemble », souligne le Dr Naga.
Le premier Congrès de soins palliatifs, tenu en octobre 2023, avait marqué un tournant dans la reconnaissance de cette spécialité. Il avait permis aux praticiens généralistes et spécialistes de mieux comprendre les différents aspects du domaine : approche médicale, dimension humaine et spirituelle, cadre légal, accompagnement psychologique et social. Cette année, la Clinique Ferrière a accueilli des experts de Maurice, de La Réunion et de France autour de plusieurs thèmes, dont La collaboration régionale entre Maurice, La Réunion et la France dans le domaine des soins palliatifs; Les défis rencontrés dans les deux îles; L’aspect émotionnel lié à la perte d’un proche; Les compétences infirmières nécessaires dans une unité de soins palliatifs (présentation en visioconférence); et une discussion sur les projets futurs dans le développement de cette discipline.
Pour le Dr Naga, ce rendez-vous va au-delà du simple partage de connaissances. « Il s’agit de bâtir un réseau régional solide, d’échanger nos pratiques et d’avancer ensemble vers un modèle de soin plus humain, plus intégré, et plus proche des besoins réels des patients », dit-il. Le congrès a bénéficié de la participation du Dr Escudier, oncologue de France – dont le discours a porté sur Les critères de prise en charge palliative en oncologie. Il était question notamment des critères médicaux et éthiques permettant de déterminer quand un patient oncologique relève d’une prise en charge palliative et de la collaboration entre oncologues et équipes de soins palliatifs.
Le Dr Claude Grange, expert en soins palliatifs et auteur du livre Le dernier souffle, s’est, lui, appesanti sur La médecine palliative : un difficile changement de paradigme. Il a abordé les défis rencontrés dans l’adoption de la médecine palliative, tant au niveau des soignants que des patients, et comment la médecine palliative transforme les pratiques médicales traditionnelles.
Le Dr Philippe Walker, professeur associé en médecine palliative à l’Université de La Réunion, a pour sa part parlé de L’expérience des soins palliatifs en outre-mer. Dans le cadre de sa présentation, il a exploré la réalité des soins palliatifs dans les départements d’outre-mer, avec un focus particulier sur les défis uniques rencontrés à La Réunion, et l’importance d’adapter les pratiques aux spécificités culturelles.

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