Conclave 2025 : un Collège électoral plus universel que jamais

Alors que le Conclave s’ouvrira le 7 mai, le corps électoral chargé d’élire le nouveau Pape reflète une Église de plus en plus globale. Sur les 135 cardinaux électeurs, plus de 80 % (108) ont été nommés par le défunt Pape François, jésuite, qui a profondément renouvelé et diversifié le Collège cardinalice au fil de son pontificat.En mettant l’accent sur les « périphéries » de l’Église — souvent ignorées ou sous-représentées — il a façonné le Conclave le plus international de l’histoire moderne. Finalement, 133 Cardinaux électeurs (sur 135, deux étant absents pour raisons de santé) se réuniront à huis clos au Vatican, dans une atmosphère à la fois solennelle et décisive.

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Un recul relatif de l’Europe
Même si l’Europe conserve encore 53 électeurs, dont 19 pour l’Italie, le reste du monde dépasse désormais l’Europe en nombre. Les Amériques comptent 37 cardinaux (répartis entre l’Amérique du Nord, centrale et du Sud), l’Asie en compte 23, l’Afrique 18, et l’Océanie 4.

Pour la première fois, 15 pays – dont Haïti, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Cap-Vert, le Myanmar, les Tonga et le Soudan du Sud – sont représentés par des cardinaux issus de leur population locale. Il s’agit d’un tournant important, marquant une rupture avec les modèles eurocentrés du passé et soulignant l’universalité croissante de l’Église.

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Âge et appartenance religieuse
Le plus jeune électeur est Mikola Bychok, âgé de 45 ans, originaire d’Australie (mais né en Ukraine), tandis que le plus âgé est Carlos Osoro Sierra, un Espagnol de 79 ans. La majorité des électeurs sont nés entre les années 1940 et 1970, la cohorte la plus représentée étant celle de 1947.

On note également que 33 cardinaux appartiennent à des ordres religieux, les plus nombreux étant les Salésiens avec cinq membres. D’autres proviennent des Jésuites, des Franciscains, des Dominicains et de congrégations moins connues comme l’Institut Séculier Pie X ou les Missionnaires de la Consolata.

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Deux absents
En raison de problèmes de santé, deux cardinaux ne participeront pas, ramenant à 133 le nombre d’électeurs présents lors du Conclave.

Vers un tournant décisif ?
Même si l’élection du prochain Pape ne dépend pas uniquement des facteurs régionaux ou démographiques, la diversité inédite de ce collège électoral marque peut-être un tournant historique. Le futur pontife pourrait incarner non seulement une nouvelle orientation théologique, mais aussi une représentation élargie de la communauté catholique mondiale.

Succession : Deux italiens pour contrer le reste du monde
Le Conclave de 2025 suscite de nombreuses spéculations quant au successeur du pape François. Plusieurs cardinaux sont considérés comme des « papabili », c’est-à-dire des candidats potentiels au pontificat. Deux italiens devront faire face à cette montée

Voici un aperçu des figures les plus fréquemment citées :
Pietro Parolin (Italie, 70 ans)
Actuel Secrétaire d’État du Vatican, il est reconnu pour son expérience diplomatique et sa capacité à naviguer entre les différentes sensibilités de l’Église. Cependant, certains critiques pointent ses compromis avec des régimes autoritaires, notamment la Chine.

Matteo Zuppi (Italie, 69 ans)
Archevêque de Bologne et président de la Conférence épiscopale italienne, il est apprécié pour son engagement en faveur de la paix et du dialogue interreligieux. Son profil centriste pourrait en faire un candidat de consensus.

Luis Antonio Tagle (Philippines, 67 ans)
Ancien archevêque de Manille et actuel préfet du Dicastère pour l’Évangélisation, il incarne une Église tournée vers l’Asie et les périphéries. Bien que proche de François, son influence semble avoir diminué récemment.

Péter Erdő (Hongrie, 72 ans)
Archevêque d’Esztergom-Budapest, il est considéré comme un candidat conservateur, attaché à la doctrine traditionnelle. Son expertise en droit canonique est largement reconnue.

Fridolin Ambongo Besungu (RDC, 65 ans)
Archevêque de Kinshasa, il est engagé dans les questions de justice sociale et de protection de l’environnement. Sa nomination renforcerait la représentation de l’Afrique au sein de l’Église.

Jean-Claude Hollerich (Luxembourg, 66 ans)
Jésuite et archevêque de Luxembourg, il est connu pour ses positions progressistes, notamment sur l’inclusion des personnes LGBTQ+ et le rôle des femmes dans l’Église. Il a été rapporteur général du Synode sur la synodalité.

Jean-Marc Aveline (France, 66 ans)
Archevêque de Marseille, il est proche des idées du pape François, notamment sur l’accueil des migrants et le dialogue interreligieux. Sa nomination serait symbolique pour l’Église en Europe occidentale.

Le Cardinal Maurice Piat, ne votera pas
Aujourd’hui âgé de 83 ans, il ne participe pas au Conclave de 2025, ayant dépassé la limite canonique des 80 ans. Il conserve néanmoins un rôle moral et spirituel majeur, notamment en tant que référence pour les Églises d’Afrique et des îles de l’océan Indien.
Né le 19 juillet 1941 à Moka, Maurice E. Piat est l’une des grandes figures de l’Église catholique dans l’océan Indien. Il a été évêque de Port-Louis de 1993 à 2023, avant de devenir évêque émérite.

Ordonné cardinal par le pape François lors du consistoire du 19 novembre 2016, il est le premier Mauricien à avoir reçu la pourpre cardinalice. Ce geste avait été perçu comme une reconnaissance du rôle pastoral et social qu’il a joué à Maurice, mais aussi de l’importance croissante des petites Églises du Sud global dans la dynamique universelle de l’Église.
Théologien formé à Rome, membre de la congrégation du Saint-Esprit (Spiritains), le cardinal Piat s’est distingué par son engagement en faveur des plus vulnérables, sa défense d’un développement intégral et son souci du dialogue interreligieux. Très respecté dans la région, il a aussi été un artisan du renouveau pastoral, notamment à travers la mise en place des synodes diocésains.

Que signifie la fumée blanche au Vatican ?
Lorsque de la fumée blanche s’élève au-dessus de la chapelle Sixtine, c’est le signe le plus attendu au monde catholique : un nouveau pape vient d’être élu. Cette tradition visuelle, aussi solennelle que symbolique, obéit à un rituel bien codifié, mêlant modernité technique et charge spirituelle.

Une tradition bien rodée
Dès qu’un cardinal obtient les deux tiers des voix nécessaires au conclave, le doyen ou un cardinal de rang supérieur lui pose cette question : « Acceptez-vous votre élection canonique comme souverain pontife ? »En cas de réponse positive, il lui est ensuite demandé : « Par quel nom voulez-vous être appelé ? »

À cet instant précis, l’élu devient Pape, évêque de Rome, chef de l’Église universelle et du collège des évêques, en vertu de la Constitution apostolique Universi Dominici Gregis (1996).
La fumée blanche : un signal codé
Le poêle à fumée actuel, en fer, date de 1939, année de l’élection de Pie XII. Le rituel repose sur un code couleur simple :
• Fumée noire : pas encore de pape. Le vote est infructueux.
• Fumée blanche : un pape a été élu, et il a accepté.

La fumée noire est obtenue à partir d’un mélange de perchlorate de potassium, anthracène et soufre. La fumée blanche, plus récente (1978), est produite grâce à un mélange de chlorate de potassium, de lactose, de colophane… et de bulletins de vote brûlés.

La chambre des larmes : un moment d’intimité
Après son élection, le nouveau pape se retire dans un petit espace discret, surnommé la chambre des larmes. Située dans un recoin de la chapelle Sixtine, cette pièce de 3 m² abrite les différentes tailles de la soutane papale. C’est là qu’il se change et qu’il vit souvent un moment d’intense émotion. Selon la légende, plusieurs papes y auraient pleuré en réalisant l’ampleur de leur mission.

L’annonce au monde : « Habemus papam »
Une fois revêtu de sa nouvelle tenue blanche, le pape se rend dans la chapelle Pauline pour un bref moment de prière. Les cardinaux lui prêtent alors serment d’obéissance.

Puis, le protodiacre apparaît au balcon central de la basilique Saint-Pierre et proclame la célèbre formule latine : « Habemus Papam » (« Nous avons un pape »)
Environ 45 minutes après la fumée blanche, le nom du nouveau pape est rendu public. Dix minutes plus tard, il accorde sa première bénédiction « Urbi et Orbi » (« à la ville et au monde »).

Histoire insolite des conclaves : Entre tensions, intrigues et traditions
Le conclave est la procédure par laquelle les cardinaux de l’Église catholique élisent un nouveau pape après le décès ou la renonciation de son prédécesseur. Si aujourd’hui les conclaves sont strictement encadrés, confidentiels et hautement sécurisés, leur histoire est émaillée de scènes surprenantes, de blocages dramatiques et même… de farces ou de menaces.
Une évolution vers la discrétion absolue
De nos jours, les conclaves se déroulent à huis clos dans la chapelle Sixtine. Tous les participants — cardinaux, assistants, cuisiniers ou agents de santé — prêtent serment de confidentialité. Des détecteurs d’écoute et des vitres traitées empêchent toute tentative d’espionnage. Mais cela n’a pas toujours été le cas.

Des exemples marquants dans l’histoire
• 236 : Un prêtre nommé Fabien est élu pape après qu’une colombe s’est posée sur sa tête — interprétée comme un signe divin.
• 1241 : Les cardinaux, enfermés dans le palais du Septizodium à Rome sous une chaleur accablante, voient l’un des leurs mourir et plusieurs tomber malades. Face à l’impasse, le peuple menace de déterrer le corps du pape défunt pour faire pression.
• 1268–1271 : Le conclave le plus long de l’histoire (2 ans et 9 mois) a lieu à Viterbe. Trois cardinaux décèdent. Les habitants finissent par retirer le toit du bâtiment pour accélérer le vote.
• 1378 : Une foule romaine exige l’élection d’un pape italien, sous peine de massacre. Cela mène à l’élection d’Urbain VI, contesté, déclenchant un schisme qui divisera l’Église pendant 40 ans.
• 1492 : Dans le premier conclave tenu à la chapelle Sixtine, Rodrigo Borgia (Alexandre VI) corrompt ses pairs avec des promesses de postes.
• 1503 : Le conclave le plus court (quelques heures) élit Jules II, futur bâtisseur de Saint-Pierre et fondateur de la Garde suisse.
• 1605 : Un désaccord vire à la bagarre entre cardinaux, qui déchirent leurs ornements liturgiques.
• 1655 : Une plaisanterie tourne mal lorsqu’un cardinal déguisé en Saint-Esprit effraie ses confrères ; l’un d’eux meurt de froid après une chute nocturne.
• 1846 : Élection de Pie IX, qui sera pape durant 31 ans, le plus long pontificat après celui de saint Pierre.
• 1978 : Deux conclaves successifs aboutissent à l’élection de Jean-Paul II, premier pape non italien depuis 455 ans.

Le conclave, entre tradition et imprévu
Au fil des siècles, le conclave a su s’adapter aux défis de chaque époque, renforçant sa rigueur et son secret. Mais l’histoire montre qu’il peut aussi être le théâtre d’incidents humains, de tensions politiques et de décisions inattendues — parfois influencées autant par les hommes que par la foi.

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