La pandémie du Covid-19 a entraîné bien des bouleversements dans les familles du monde entier. La fermeture des écoles, le télétravail, parfois la perte de revenus ou encore la distanciation sociale sont des mesures difficiles à gérer, surtout pour des parents. Vous avez peut-être l’impression de ne plus maîtriser la situation. Même en faisant son possible pour s’adapter aux réalités du Covid-19, c’est normal de ressentir de l’inquiétude, de la confusion, de la déception, de la tristesse et surtout du stress, en situation de crise (autant pour les adultes que pour les enfants !). La pandémie perdurant, il nous faudra faire avec, comme ils disent, ce new normal qu’est devenu notre quotidien. Et souvent, à la maison, ce n’est pas évident. Comme dans toute situation de crise, la marche à suivre est l’adaptation. Notamment pour gérer les enfants.
Il y a deux semaines, Mélanie Vigier de Latour-Bérenger, psychosociologue, superviseure certifiée de psychologues, counsellors et thérapeutes, facilitatrice certifiée de Discipline Positive pour les Parents, vice-présidente de la Société des Professionnels en Psychologie à Maurice, membre du Kolektif Drwa Zanfan Morisien (KDZM) et du Kolektif Drwa Imin (KDI), et consultante au sein d’Action For Integral Human Development (AIHD), livrait ses pensées sur la situation actuelle, avec la hausse des cas et du nombre de décès dus au covid. Nous publions cette semaine ses quelques conseils, précieux sans doute, « en ces temps de fragilité, d’insécurité et d’incertitudes », et pour « choisir les étincelles de lumière et de joie qui existent. » Pour les enfants scotchés devant leur écran d’ordinateur, la psychosociologue soutient qu’« au-delà de quatre heures par jour, le risque de voir apparaître des problèmes émotionnels et une mauvaise estime de soi seraient accrus. De plus, ce temps passé devant les écrans empiète aussi sur le temps consacré à d’autres activités physiques et récréatives essentielles pour leur développement et l’apprentissage des valeurs telles que le partage, le respect de l’autre, etc. »
Elle invite à reprendre la règle du « 3-6-9-12 » de Serge Tisseron, psychiatre et docteur en psychologie :
– Avant 3 ans : éviter la télévision et les écrans non interactifs renforçant la passivité des jeunes enfants, les éloignant de ceux dont ils ont fondamentalement besoin : communiquer, interagir avec leur environnement en utilisant leurs cinq sens, jouer… Vraiment, éteignons les écrans pendant les repas des petits qui ressemblent alors plus à des gavages.
Puis, avec des règles claires jusqu’à l’adolescence ; sur le moment et la durée d’utilisation ; pas pendant les repas (seul ou en famille, espace d’échange et de lien) ; dans la communication de la pratique numérique ; dans le respect des âges spécifiques préconisés pour les jeux et applications… (pour rappel, Facebook et TikTok ne sont pas autorisés avant 13 ans !) considérer :
•À partir de 3 ans : la télévision introduite avec modération. Programmes choisis avec les enfants en respectant les âges recommandés. Les regarder avec l’enfant.
•Entre 3 et 6 ans : pas de console de jeu personnelle, covisionnage recommandé.
•Entre 6 et 9 ans : dans le temps d’écran autorisé, laisser la liberté à l’enfant de le répartir comme souhaité. Aborder le droit à l’image et à l’intimité. Ne pas se tenir très loin.
•À partir de 9 ans : initier l’enfant à Internet. L’accompagner dans cette découverte, expliquer les dangers de ce qui est mis sur le web étant public et pas effacé, pas nécessairement vrai et pouvant être utilisé à mauvais escient. Parler des risques de confrontation à des images violentes, scènes inappropriées à leur âge. Des risques des contacts en ligne, du harcèlement. Aborder l’âge, quitte à le revoir, à partir duquel il lui sera possible de disposer de son propre téléphone portable, fixant des balises en amont pour un usage raisonnable.
•Après 12 ans : laisser l’enfant naviguer seul sur le web, ayant bien intégré les risques, dangers, incluant ceux de la pornographie, du cyberbullying et le cadre ; voir ensemble les moments de connexion autorisés, évitant les connexions nocturnes et illimitées de sa chambre.
Et pour ce qui est de la gestion de la peur, elle explique que « la peur fonctionne comme un signal d’alarme pour attirer notre attention sur un danger, selon le psychiatre Christophe André. » Quelques pistes pour gérer le sentiment de peur :
•Écoutons et accueillons donc la peur, les sensations dans notre corps.
•Prenons conscience de ce qui est source de peur et informons-nous sur les craintes possibles et réponses rationnelles, selon Christophe André.
•Centrons-nous sur notre respiration : cela permet de diminuer nos sensations physiques émotionnelles et nous éloigne temporairement de nos ruminations, selon la psychiatre Stéphanie Hahusseau. Prendre quelques profondes inspirations et expirations permet de ralentir le rythme cardiaque et de se calmer.
•Marchons ; Éric Champ, psychologue et psychothérapeute, invite à se concentrer sur le contact de nos pieds avec le sol, sur le rythme que notre corps impulse et le bercement profond que nous ressentons. Marcher en pleine conscience permet de ne plus être en état d’alerte, de contrôler son environnement et de se centrer sur soi.
•Améliorons notre état et sensation de bien-être : exercice physique, bonne alimentation, relaxation, pour mieux gérer le stress et diminuer l’anxiété, etc.
Si la peur se déclenche trop souvent pour des seuils de dangerosité trop bas, elle peut alors être pathologique et il sera nécessaire de demander une aide professionnelle pour mieux gérer le quotidien.