Ces mots sont sur toutes les lèvres depuis une semaine déjà. La COP26, le sommet des leaders mondiaux à la conférence des Nations unies sur le climat, qui se tient actuellement à Glasgow en Écosse, a réuni les dirigeants du monde entier, dont l’île Maurice, avec le Premier ministre Pravind Jugnauth actuellement sur place.
Ayant pris la parole lundi, ce dernier a plaidé pour la réduction des gaz à effet de serre par 40% pour atteindre une énergie verte à 60%, pour se débarrasser de l’énergie fossile dans la génération de l’électricité, pour promouvoir une économie circulaire en intégrant 70% des déchets des centres d’enfouissement, encourager l’utilisation de véhicules électriques et promouvoir une smart agriculture et encourager plus de programmes de plantations d’arbres. Et tout cela, d’ici 2030 ! Les écocitoyens mauriciens n’ont pas tardé à réagir.
Krishna Pentayah (Sov Lanatir) :« L’Offshore Petroleum Bill fait tache »
« Work Together To Deliver est l’un des principaux objectifs que la COP26 souhaite atteindre. Le sommet a ainsi décrit cette devise par « we have to turn our ambitions into action by accelerating collaboration between governments, businesses and civil society to deliver on our climate goals faster », mais après le discours du Premier ministre et face aux réactions des ONG et intellectuels de Maurice, cela ne semble pas du tout être le cas. Ainsi, les Nationally Determined Contributions (NDCs), comme réduire les émissions de gaz à effet de serre par 40%, entre autres, semblent irréalisables si nous ne travaillons pas réellement ensemble, et cela en toute transparence. Par ailleurs, l’Offshore Petroleum Bill fait tache. Y a-t-il eu des études de faisabilité à ce sujet et, si oui, est-ce que les résultats ont été communiqués à la société civile ? Comment cette loi, si elle devait être passée, contribuera-t-elle au réchauffement climatique ? Comment sera-t-elle bénéfique pour le pays du point de vue économique ? Le Nigeria, par exemple, est vu comme étant le numéro un producteur de pétrole en Afrique, et est le 7e plus gros exportateur d’huile dans le monde, et détient la 10e plus grande réserve de gaz dans le monde. Malgré les revenus énormes découlant du pétrole, le Nigeria est classé parmi les pays les plus pauvres et les plus endettés du monde. Le transfert des fonds des coffres de l’État à certains individus, et l’obtention de permis, de contrats, et autres par des particuliers, ont largement affecté la croissance économique du Nigeria. Et ce que nous avons en commun avec le Nigeria, c’est que nous sommes aussi un pays en développement qui n’a aucune expertise dans l’exploitation pétrolière. Nous aurons donc besoin d’une aide internationale, ce qui diminuera notre part du gâteau. À la place d’un Offshore Petroleum Bill, nous aurions dû nous concentrer sur l’Offshore Wind Energy. »
Platform Moris Lanvironnman (PML) : « The failure to walk the talk is evident »

Dans une lettre ouverte destinée au Premier ministre, l’ONG PML ne cache pas sa déception face aux annonces faites. Elle écrit : « In its Update of the Nationally Determined Contribution of the Republic of Mauritius (NDC) to the United Nations Framework Convention on Climate Change (UNFCCC), Mauritius has pledged to transition out of coal and to expand renewable energy in the electricity mix from 40% to 60% by 2030. At COP26 you will most certainly focus on the conditional support for mitigation and adaptation from international sources and donor agencies amounting to USD 4.2 billion, accounting for 65% of total funds that need to be mobilised, as per figures released by your government on 11th October 2021. But within a few days of submitting this updated NDC your government announced the introduction of an Offshore Petroleum Bill in the National Assembly to provide a framework for ‘petroleum activities’ in the Mauritian maritime zone. Pleading for funds for climate change mitigation and adaptation at the climate summit in Glasgow, while simultaneously moving for fossil fuel exploration and extraction in its maritime territory hardly signals seriousness and trustworthiness, and undermines credibility. The implications of this decision will surely not be lost on other participants, attendees and potential funders. The introduction of the Bill a few days after the submission of the NDC leaves us, concerned Mauritian citizens, feeling bewildered and uneasy at the incoherence and contradiction between commitments under the NDC and the introduction of the Offshore Petroleum Bill. We feel let down in the face of scrutiny by the international community. The dissonance between speech and deed, the failure to walk the talk is evident when we consider how the decision to promote fossil fuel extraction and use conflicts with the Paris Climate Agreement’s global target of net-zero emissions by 2050, and about how this Bill may also be in contradiction with NDC commitments themselves. »
Pascal Laroulette (citoyen engagé) : « Il y a selon moi, beaucoup d’incohérences »
« Je pense que l’on aurait su si ce genre d’événement fonctionnait dès la troisième édition, et on en est à la 26e ! Cela veut tout dire. Il y a, selon moi, beaucoup d’incohérences, car comment Maurice peut se présenter à la COP26 alors qu’en même temps un projet de loi sur le pétrole a été déposé ? Il est plus clair que jamais qu’il faut «décarboniser» l’économie et s’orienter vers le ciel, le soleil, comme l’a suggéré Arthus Bertrand depuis 1992 dans son documentaire. Par ailleurs, Maurice est classée 3e parmi les pays utilisant le plus de pesticides. Pourquoi ne pas plaider pour une agriculture plus écologique au lieu de plaider pour toutes ces autres choses ? Aussi, j’avais fait un appel en amont de l’ouverture des frontières pour demander aux autorités de permettre aux touristes d’investir dans la restauration de nos écosystèmes, en leur proposant par exemple de sponsoriser un corail ou une mangrove. Cela aurait pu aider à restaurer nos lagons et à faire participer ces touristes à notre économie. Autre point important est l’introduction d’un programme dans les écoles sur la citoyenneté écologique. Il ne faut plus de cette top-down approach, mais il faut commencer par les écoliers, qui auront l’occasion pendant six ans d’apprendre à cultiver la terre, à arroser un arbre et à le voir grandir. C’est d’ailleurs ce que nous observons au niveau de l’ONG Action for Environment Protection. Par ailleurs, quid du plastique ? Pravind Jugnauth parle d’encourager la plantation d’arbres, mais combien d’arbres sacrifions-nous pour fabriquer ces couverts en bois ? Pourquoi ne pas encourager à utiliser des couverts en métal ? Bref, avant d’aller à la COP26, il aurait peut-être fallu apprendre tout cela. »