La Gambling Regulatory Authority (GRA) de Dev Bheekary a essuyé un nouveau revers en Cour suprême mercredi dernier. Dans un jugement motivé long de 15 pages, la Senior Puisne Judge Nirmala Devat et le juge Benjamin Marie-Joseph ont quashed (annulé) la décision de l’instance régulatrice de placer sous scellés les Limited Payout Machines (LPM) de la société Hing Tse Investment Co Ltd.
L’affaire remonte à 2017. Hing Tse Investment Co Ltd opère des outlets dans divers endroits du pays, notamment à la rue Royale à Port-Louis, au Manhattan Shopping Complex à Curepipe et à Montagne-Longue. Elle soumet une demande de renouvellement de ses licences à la GRA et y adjoint deux chèques représentant le paiement de sa licence d’opérateur et ses permis pour les LPM. À son grand étonnement, la GRA refuse le paiement et lui retourne les deux chèques. Dans une correspondance en date du 14 juillet 2017, l’instance régulatrice l’informe que seules les licences concernant les LPM qui sont conformes au MS 182:2013 — le standard mauricien à satisfaire comme il est stipulé dans la General Notice 1000 de 2013 — seront renouvelées. Le certificat de conformité y relatif doit provenir d’une des agences accréditées et approuvées, notamment Gaming Laboratories International, NMi ou BMM.
Le 18 juillet 2017, Hing Tse Investment Co Ltd écrit à la GRA pour l’informer, entre autres, qu’à Maurice, il n’y a pas d’« accredited test laboratory for the purpose of testing and calibrating LPMs and no accredited agency to certify whether LPMs are compliant with regulation MS 182:2013. » De plus, Hing Tse Investment Co Ltd attire l’attention de la GRA que Gaming Laboratories Internatonal, NMi ou BMM ne sont pas des agences accréditées à Maurice.
Dans une note en date du 16 août 2017, Hing Tse Investment Co Ltd informe la GRA qu’elle allait continuer à opérer ses LPM en attendant l’accréditation d’une agence à Maurice pour effectuer des tests sur ses machines. Le même jour, sans aucune raison ou justification, des préposés de la GRA de-vaient apposer des scellés sur les LPM de la plaignante située à Port-Louis, au motif que la compagnie opérait sans licence et que ses machines n’étaient pas en règle. Quelques mois plus tard, soit le 29 mars 2018 et le 8 mai 2018, des préposés de la GRA, accompagnés des officiers de la Police des Jeux, devaient faire une descente dans les autres outlets de la compagnie se trouvant à Curepipe et à Montagne-Longue pour procéder à la saisie des LPM.
C’est par voie de révision judiciaire que Hing Tse Investment Co Ltd a contesté la décision de la GRA de mettre sous scellés ses LPM. Elle a argué qu’il appartenait à l’instance régulatrice de mettre à la disposition de tout opérateur de LPM une agence accréditée, un laboratoire d’essai et un système de contrôle central qui aurait facilité la mise en œuvre du standard MS 182:2013, faute de quoi, elle (Hing Tse Investment Co Ltd) ne pourrait se conformer à cette exigence légale et, de ce fait, ne pourrait opérer. Les juges ont retenu cet argument et ont ainsi quashed la décision de la GRA de placer sous scellés les LPM de Hing Tse Investment Co Ltd.
Hing Tse Investment Co Ltd avait retenu les services de Mes Gavin Glover, SC et Jaykar Gujadhur, SA. La GRA était représentée par Me Yvan Jean Louis, Ag. Assistant Solicitor General, alors que le commissaire de police, en sa qualité de codéfendeur, était représenté par Me Pooja Ramjeeawon-Varma, Assistant Parliamentary Counsel.
La GRA a essuyé son énième revers pour avoir abusivement bloqué des opérateurs afin de favoriser les desseins d’un de ses protégés, le magnat des paris Jean-Michel Lee Shim.
Des scellés pour rien ?
Au-delà du jugement qui a été rendu par la Cour suprême mercredi dernier, il s’avère que des scellés ont été apposés sur les LPM de Hing Tse Investment Co Ltd pour rien. C’est la conclusion à laquelle on arrive si on s’en tient à la lettre que la GRA avait envoyée à SMS Pariaz Ltd en novembre 2018 pour l’informer que « (1) (…) the technical standards MS 182:2013 are currently under review by the Mauritius Standard Bureau and subsequently the Limited Payout Machines should be compliant to revised standards and (2) The central server of the Mauritius Revenue Authority is not yet ready to connect to Limited Payout Machines. » Ce qui n’a pas empêché SMS Pariaz de continuer ses activités en toute impunité. Sans doute parce que son consultant — c’est comme ça qu’il se présente — avait financé le MSM à hauteur de Rs 10 millions aux dernières élections générales. Dix malheureux millions qui, décidément, lui ouvrent toutes les portes.
Drôle de coïncidence!
Alors que le jugement dans l’affaire Hing Tse Investment Co Ltd était attendu, on a retrouvé dans les annexes du discours budgétaire de mardi dernier des amendements à la GRA Act concernant les Limited Payment Machines, les machines à sous et les machines d’amusement. Seuls les détenteurs de licence pourront désormais les importer.
Dès que le budget sera entériné et le Finance Bill voté, à moins qu’il y ait amendement, la Gambling Regulatory Authority Act sera modifiée pour en faire une obligation légale que : (i) aucune machine à sous ne doit être importée par une personne autre que le titulaire de la licence de la maison de jeu dûment agréée par la GRA ; (ii) aucune machine à paiement limité ne doit être importée par une personne autre que le titulaire de la licence de la machine à paiement limité dûment autorisée par la GRA ; (iii) aucune machine d’amusement ne doit être importée par une personne autre que le titulaire de licence de machine d’amusement dûment autorisé par la GRA.
Quelles sont les raisons derrière ces changements qui semblent vouloir favoriser les détenteurs de licence actuels ? Chacun se souviendra qu’il est de notoriété publique que le magnat des paris est aussi détenteur de licences sur les LPM et machines à sous. Affaire à suivre.