•La GRA obtient gain de cause sur la base « qu’une autorisation illégalement accordée ne peut engendrer ni droits acquis ni attentes légitimes »
Le couperet est tombé. La société SMS Pariaz Ltd de Jean-Michel Lee Shim a été déboutée de sa demande d’autorisation pour contester deux directives de la Gambling Regulatory Authority (GRA), avec comme Chief Executive Officer (CEO), Divya Ringadoo, qui l’enjoignaient de cesser ses activités de paris à cote fixe par SMS sur les courses hippiques et les matchs de football se déroulant hors de Maurice. Dans un jugement rendu, hier, la Cour suprême a tranché sans ambiguïté : ces activités étaient menées sans base légale, et la GRA était dans son droit de les interdire.
Depuis 2017, SMS Pariaz prétendait agir légalement grâce à des lettres de la GRA qui lui auraient permis d’élargir sa licence de bookmaker à des paris sur courses hippiques étrangères, et plus récemment, sur des matchs de football internationaux, le tout via SMS. L’entreprise affirmait avoir reçu l’approbation de l’instance régulatrice et investi massivement dans ces segments.
Mais en mars 2025, quelques mois après les élections générales de novembre 2024, la nouvelle direction de la GRA, avec Divya Ringadoo à la barre, a pris une position diamétralement opposée.
Deux lettres directives ont été envoyées :
•GRA/LSMS/01/25, ordonnant l’arrêt des paris sur courses hippiques étrangères ;
•GRA/FOB011/02/25, ordonnant l’arrêt des paris sur matchs de football hors Maurice.
Ces autorisations, notamment celles des 6 avril, 7 juillet et 31 juillet 2020 (courses) et du 8 janvier 2024 (football), sont désormais considérées par la GRA comme nulles et non avenues, au motif qu’elles dépassaient le cadre légal de la GRA Act, qui n’accorde aucun pouvoir au Board pour étendre une licence existante à d’autres types de paris sans nouvelle demande formelle ni paiement des frais requis.
Combat judiciaire sans succès
SMS Pariaz a saisi la Cour suprême pour contester les directives, arguant qu’elles étaient illégales, déraisonnables, en violation de ses droits acquis et de ses attentes légitimes, et rendues sans respect des principes de justice naturelle.
Mais les juges Rita Teelock et Carole Green-Jokhoo ont rejeté la demande, déclarant que l’entreprise ne pouvait pas se fonder sur une situation que la loi considère elle-même comme illégale. Elles ont ajouté que la GRA avait agi conformément à l’article 100(1) de son propre cadre légal, qui lui permet de donner des directives à ses licenciés sur la conduite de leurs affaires, tant qu’elles ne contredisent pas la loi.
SMS Pariaz détenait 24 licences valides du 1er janvier au 15 août 2025, autorisant les paris à cote fixe par SMS uniquement :
•sur les courses de chevaux organisées à Maurice,
•et sur les matchs de football joués à l’étranger.
Mais selon les juges, le paiement de la redevance prévue par la loi (Rs 1 750 000 pour la licence principale) ne couvrait que les paris sur les courses locales, pas les autres activités. Et comme le stipule l’article 44(9) de la GRA Act : « Aucune licence de bookmaker ne peut être émise si les frais correspondants n’ont pas été réglés à l’Autorité. »
La Cour note d’ailleurs que les activités sur les courses étrangères n’étaient même pas mentionnées dans la licence produite par SMS Pariaz. Autrement dit, aucun droit légal n’existait pour opérer ces activités.
Ni droit acquis, ni attente légitime
La Cour a réitéré un principe fondamental du droit administratif : « une autorisation illégalement accordée ne peut engendrer ni droits acquis ni attentes légitimes. » Les juges ajoutent que la GRA, en prenant ces deux directives en 2025, a corrigé ses propres erreurs passées — ce qui, doit être salué et non empêché. Permettre une Judicial Review dans ce cas reviendrait à cautionner une illégalité reconnue.
Ce jugement envoie un signal fort à l’industrie : les régulateurs ne peuvent outrepasser leur mandat, même par erreur administrative, et les opérateurs doivent s’assurer que leurs activités reposent sur des licences valides, frais payés, et cadre légal strictement respecté.
La décision intervient aussi dans un climat de surveillance accrue du secteur des paris, aussi bien pour des considérations fiscales que morales.